Trekking around Sucre, Bolivia (ou Comment Transformer un Fruit en Sourire)


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Published: March 6th 2012
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3 mars

Ça s´est décidé très rapidement hier soir alors que j´errais dans les environs du "Mercado" de Sucre. Je suis entré dans l´agence touristique "Condor Trekkers" par un hasard complet. Courte introduction d´un trek proposé par l´agence, et me voilà qui acquiessais à l´aventure. Quatre jours de trek dans les environs de Sucre, à la découverte de la campagne bolivienne.





Mon cadran m´alarme. Il est 4h09 du matin. Je dois me rendre à l´agence "Condor Trekkers" pour 5h00AM. Je me prend une douche plutôt tiède alors que l´hôtel, le corridor, le ciel, tout est noir autour de moi. Je me rend à la sortie à pas feutrés et je disparais dans la nuit.

On est cinq à participer au trek: Thomas et Marion les français, Isabelle l´allemande, Renée l´américaine et moi-même.

1h30 de route en montagnes pour se rendre au point de départ.

Chatakila.

Ce n'est même pas un village. Ce n'est qu'une église en morceaux où un dessin mérite des offrandes de feuilles de coca.

En parlant de coca, il est l'heure de mâchouiller mon tit tas de feuilles: ça remplacera mon petit café matinal.





On marche calmement dans les montagnes rocailleuses.

Mon packsack est plutôt lourd mais ça se tolère.

On visite des fonds de cavernes en équilibre sur le fil de l'horizon. Des peintures rupestres vieilles de 2000 ans nous observent passer en silence.

Une faible bruine se change en pluie. Le ciel s'assombrit et le tonnerre éclate au delà du paysage montagnard.

On est là, peinard, sur le chemin détrempé alors qu´on croise une bergère amenant son troupeau en sécurité. Quelques chèvres nous regardent bêtement passer alors qu'elles se demandent probablement pourquoi elles se sentent humides.

Il y a des ânes, des vaches et des champs de maïs aussi.

Et des chiens qui jappent en espagnol.

On passe devant une cabane des plus rustiques lorsque trois gamins y sortent et s'accrochent à notre regard. Thomas, Marion et moi décidons de leur offrir chacun une orange qui s'ennuyait au fond de nos lourds packsacks.

Qu'un fruit.

Pour nous, ce n'était qu'un fruit.

Mais pas pour eux. On ne sourit pas comme ça pour un fruit. Sinon, pourquoi une orange ne me fait-elle plus sourire?

4h00PM. On rejoind notre campement. La maisonnette au toit de paille n'a aucun lit. On devra dormir sur le sol, en rang d´oignons. Et si un gros méchant loup passait et soufflait sur la maison?

Notes à Moi-Même:

1- Peintures "rupestres"... quel adjectif horrible! On dirait le nom d´un chien dans un cartoon!

2- Avec les feuilles de coca, ils en font des biscuits: Les Cocacookies.





4 mars

Il a un grand coeur notre hôte. Pour plus de confort, il nous a fournit des matelas qu'il a enligné sur le plancher en pierres du gîte. La nuit sera plus agréable que prévu.

Mais au moment de se mettre au pieu, j'aperçois une petite souris pas plus grosse qu'un pouce qui semble chercher des miettes dans le packsack de Renée. C´est la panique. Branle-bas de combat pour chasser la vermine. Mais personne n'arrive à retrouver la bestiole. Tant pis. On cache donc la bouffe du mieux qu'on peut avant de se glisser dans nos sleeping bag.

Hésitations.

Mon matelas est foutrement sale et sort probablement du fond d'une grange poussièreuse.

Il était sûrement serré entre le boeuf et l'âne parce que je vous le jure, ça sent l´Christ! Une odeur de fouin mouillé et de crottin de mulots.

Oh mais je comprend... juste là, dans mon matelas, c'est bel et bien un trou de souris ça? Et oui, la souris avait de toute évidence fait son nid au creux de la ouatte de ma paillasse... et l'hôte nous a amené le nid de souris avec grande amabilité.

Fuck.

Hésitations.

J'ai des souvenirs d'un certain soir au Laos où j´avais passé la nuit dans une pièce infestée de souris.... et je n'ai pas l´intention de revivre la même expérience, croyez-moi.

Je tord, je piétine, je bats, j'écrase ce qui me servira de couchette.

Rien n'y sort. C'est bon signe.

Et puis merde, j'ai connu pire. Je me couche donc sur ma paillasse en espérant ne pas me faire réveiller avec une souris dans le creux du cou.





Ploc! Ploc! Ploc!

2h15 du matin.

Ploc! Ploc! Ploc!





Averse nocturne. Il y a une fuite dans le plafond en paille de notre gîte. Heureusement (pour moi), les écoulements ne sont pas de mon côté de chambre. C´est Thomas et Marion qui écopent. Et ça semble être la merde! Au matin, on ne pourra pas s'empêcher d'en rire.

On est tous d'accord: ce n'est pas la nuit la plus réparatrice qu´on aura eu durant un trek.





On quitte l'abris de Chainaca pour se rendre à Maraga. Une petite pluie fine devient rapidement une petite pluie pas mal moins fine. Puis le soleil sort. Et puis des nuages nous ramène la pluie. Et le soleil ardent reprend le dessus. Disons que la température est imprévisible dans les montagnes.

On passe de l'imperméable à la crème solaire en quelques minutes.

Le décor ici est encore une fois époustouflant. On escalade des montagnes, on longe des rivières aux eaux couleurs de brique, on traverse des torrents d'eaux troubles sur des ponts suspendus... du pur plaisir.

Cactus en fleurs et odeurs d'eucalyptus.

On croise beaucoup d'enfants timides qui baissent les yeux à notre passage. Certains tentent de nous vendre des bracelets colorés enroulés autour de veilles bouteilles de plastique, d'autres espèrent récolter quelques bolivianos en vendant des bouts de fossils trouvés dans les replis de la montagne. Mais beaucoup d'autres aussi ne font que nous observer, cachés dans un champ de maïs ou derrière la porte chambranlante d'un abris de fortune.

À l'entrée d'un village, un chien est intrigué par ma présence. Il me suit en espion, en gardant toujours ses distances. Dès que je me retourne, il fige.

Statue.

Il faudrait lui expliquer que ce n'est pas parce qu'on ne bouge pas qu'on devient invisible.

Je l'ai finalement nommé "Rupestre".





Maraga. Le village campagnard est situé au milieu d'un cratère causé par un météorite. C'est ce que les scientifiques affirment. Les villageois, eux, ont une toute autre explication pour le phénomène: ce serait ici même que Dieu serait atterrit sur terre. Jolie tout ça.

Tout près de notre gîte, une femme fait paître ses moutons sur un terrain de foot. Je m'amuse à photographier les bêtes frisées alors que la bergère s'approche de moi. Elle me tend les mains en me regardant de ses yeux rougis (par le vent je suppose). Elle veut une rétrébution. Bon. Voilà que je joue le pusher maintenant en lui refilant une poignée de feuilles de coca. C'est tout ce qu'ils désirent des touristes ici, paraît-il.

Pas de problème. Je suis le CocaKing.





Note à Moi-Même:

Ne plus jeter le papier Q dans la toilette. Il faut le mettre dans la corbeille comme tout le monde sinon ça bouche le trône et ça mets tout le monde mal à l'aise.







5 mars

On quitte notre gîte plus tard que prévu aujourd'hui. Tant mieux car ça nous permettra de croiser les enfants se rendant à l'école et de leur donner des crayons que notre guide transportait en secret. Les gamins s'accrochent en silence à leur cadeau et s'enfuient en souriant. On est en pleine campagne ici. Aucun commerce, donc impossible d'acheter quoi-que-ce-soit. Vous pouvez vous l'imaginer, lers crayons de plomb sont un luxe au creux des montagnes.

On croise beaucoup de troupeaux de chèvres sécurisés par des chiens maigrelets plutôt lunatiques et des bergères qui lancent des pierres aux bêtes qui s'éloignent un peu trop.

Les ânes braillent dans les enclos alors que les moutons profitents du buffet dans les pâturages.

Tout autour, le vert des champs contraste avec le rouge terracota des Andes. Dans le ciel qui s'étend à perte de vue, les nuages de laine passent du blanc au gris.

Superposition de couleurs.

La nature est le plus grand des peintres.

À l'heure du lunch, on se repose sous un arbrisseau, à deux pas d'empreintes de dinosaures dans le roc. La preuve de l'existence de la préhistoire est juste là, sous mes yeux. Au Canada, un site comme celui-là serait sans doute protégé. Ici, et bien, pas vraiment. En fait, je mange un sandwich au fromage (et cumin) assis sur une des empreinte en écoutant gronder le ciel.

L'après-midi est pénible. Mes mollets s'enflent et j'ai des ampoules grosses comme des talons derrière les deux pieds. Mes épaules n'en peuvent plus de promener mon lourd packsack depuis trois jours. Et la pluie qui s'en mêle. L'heure du repos sera bien mérité ce soir.





Note à Moi-Même:

Aujourd'hui encore, j'ai offert une orange a une gamine qui se trouvait à l'orée d'un village. Je ne peux peut-être pas encore sortir un lapin de mon chapeau mais j'ai appris comment transformer un fruit en sourire.





Etienne X


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