Premier Jet ... en classe économique bien sûr !


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Senegal's flag
Africa » Senegal
October 11th 2016
Published: October 11th 2016
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Je décolle donc le lundi 10. Le jour est venu. Tout est allé si vite finalement. Cela dit j'ai passé un mois de septembre extraordinaire partagé entre la Bretagne, me az kar, le GR20 Corse et la capitale de mon monde universel : Rome. J'ai aussi passé mes derniers jours avant mon départ en très bonne compagnie où les rires avaient le monopole excluant en fin de compte toute tristesse de quitter les miens. On est le 11 maintenant war raok, en avant !

Quelques réflexions ont parcouru mon esprit durant mon vol. J'avais beau voyager en classe économique, l'avalanche de services proposés par Airfrance, dont bière, vin, champagne et cognac, me porta finalement assez à la méditation.

Je quitte le vieux continent. Le monde européen dont on m'a tant appris à en être fier. Une fierté parfois exclusive. Je revois ces visages déjà connus mais de couleurs différentes de la mienne. Je me souviens de toutes ces relations gagnées depuis 28 ans. Le jeune homme que je suis est catholique. C'est le premier mot par lequel je veux me définir tant j'adhère à cette vie d'amour proposé par Notre Seigneur Jésus. Catholique veut dire "universel" en grec. Si ces juifs avaient gardé leur haute lignée et le zèle de leur race de peuple élu, je n'aurai sans doute pas pu connaître la liturgie extraordinaire et le chant grégorien, la Sainte Eglise Romaine, la charité et l'espérance qui transpirent dans tout l’Évangile. Je suis donc breton catholique romain. Quasi bilingue en latin et pétri par mon histoire d'occidental, je me sens chez moi à Rome. Gagné par la beauté du pays qui m'a vu naître, son éblouissant patrimoine culturel et la diversité incroyable de ses régions, j'aime la France. Mon sang, ma famille, mon identité, mon caractère et mes terres, tout ceci contribue enfin à mon appartenance infaillible et intime de Breton.

De tout ceci que reste-t-il maintenant que je suis vraiment étranger, de Bretagne parmi les français, de France parmi les Africains, toubab parmi par les Sénégalais ? Moi qui ait tant appris à voir le noir pour l'étranger je ne suis plus chez moi, je suis humilié par ce climat, ce confort instable, cette honte de n'avoir pas leur couleur mais celle de l'ancien colonisateur, de l'esclavagiste, du prétentieux qui se croit supérieur simplement de par sa race. Je reste ferme et droit. Je les regarde tous pour ce qu'ils sont, je leur souris, je m'adapte, j'essaie de répondre au mieux selon les usages qu'ils affectionnent. Je reste moi bien sûr. Breton catholique romain, rien ne me l'enlèvera je l'espère. Je ne perdrai rien de ce dont je suis fier en m'intégrant à eux, en recevant de leur culture, en acceptant l'interculturalisme. Être identitaire n'est pas une perversion. Je remercie mes amis de défendre leur valeur, leur patrie, leur race même, le mot est posé. C'est grâce à eux que "la certaine idée de la France" (pas toujours bien défendue par son auteur), que cet idéal garde en partie de sa pureté. La violence éclabousse de son sang pourtant les meilleures intentions à l'origine. En aucun cas l'identité ne peut être préférée à la bonté qui est transcendante. Le patriote français est un idiot s'il croit qu'il protège quelque chose en écartant l'étranger venu comme moi en Afrique, servir. L'identitaire est haïssable même s'il pense que bouter celui qu'il voit comme un ennemi hors de son sol est une solution, pire un vertu. La bonté est universelle, elle n'a pas de frontière, elle peut aller où bon lui plait, elle doit être reçue avec tout autant de générosité qu'elle se mobilise elle-même. Des africains peuplent mon pays, depuis plus d'un siècle maintenant. Ils sont nombreux, parfois même plus en nombre que mes frères gaulois ou celtes dans nos propres villes. Cela pose question, problème même quand on en voit les conséquences : communautarisme et radicalisme. Je ne suis pas responsable politique, pas même penseur. Mais je suis catholique avant d'être breton même. J'aime le bon Dieu, j'aime mon prochain. Mon prochain prie, rend service, chante et me sourit. Dois-je le bannir ? Dois je le préférer à celui qui a renié son histoire, son sang, son savoir vivre et sa culture ? Je réfléchis à écriture haute. Je n'ai pas toutes les réponses mais la seule sur laquelle je veux m'appuyer c'est la charité. Et la vérité n'est jamais ad finem la contradiction du bon. Je veux le bien, je choisis donc le bon.

Mon avion atterrit suite à un plan de vol parfait, non comme cette petite dissertation. Cependant je vous rassure je la laisse s’écraser.

Arrivée à Dakar : l'air chaud brûle déjà ma chemise dès la sortie de ce géant de l’air qui nous a transporté. La longue attente avec le passage des douanes se fait plus difficilement : la climatisation est hors service et le plafond bas. Je garde cependant les manches de ma chemise baissée : il faut m'habituer. Il fait trente degrés et une humidité de bain marie, rien à voir avec l’hiver qui commençait à sévir sur Paris.

Je fais la première expérience du "ça va ?" africain. Le douanier me demande mon passeport. Puis me demande si je vais bien. M'y étant préparé je lui répond "ça va, et vous ça va ?". Je ne pousse pas le vice à prendre des nouvelles de sa famille. Il n'en a pas pris lui-même. Rien à voir cependant avec le bon douanier moyen qui est en France, spécialiste en mutisme.

Après avoir failli rater mes camarades qui m’attendaient à l’aéroport, les sénégalais peuvent être taquin et nous emmener sur leur pirogue arnaqueuse, je retrouve Benoit et Babacar. Surprise, Pimprenelle est la polytechnicienne qui va rester six mois à mes côtés, nous avons pris le même vol en fait.

Direction la villa du Directeur de l’hôpital, Isabelle son épouse nous reçoit du mieux qu’elle peut. On se rafraîchit avec la Gazelle, cervoise brassée ici. La soirée est sympathique, nous rentrons dans nos locaux vers 11h, heure locale. Il est 1h à Paris et mes 6 petites heures de sommeil au total sur les deux derniers jours me font violence.

La chambre où je suis est confortable. Cependant j’ai l’impression de revenir dans l’avion, la climatisation fait autant de bruit qu’un réacteur. De plus mon sommeil est marqué par l’absence de moustiquaire promise. Mon psychisme veille presque toute la nuit contre tout moustique paludéen qui oserait venir se caresser contre moi…

Ce matin visite des lieux avec le Directeur, la masse des dossiers me semble une montagne, et le temps que j’ai consacré à vous écrire ces nouvelles ne ressemble en rien au télésiège que je devrai prendre pour la gravir.

Je vous avoue que vos yeux et vos regards mes amis me manquent déjà. Je suis cependant tellement heureux de votre amour que ce bonheur m'est une réelle force, alors que je suis loin de vous.

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