Hitler et le jus d'orange

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Après deux semaines passées à Concepción, je peux enfin dire que j'ai une vision parfaitement subjective et incomplète du Chili. Néanmoins je suis sur que mon avis t'intéressera, toi, cher lecteur.

Beaucoup des autochtones vont diront qu'il y a mille choses à faire à Concepción, et ils auront probablement raison. Mais la notion de ville ici est très large. Ainsi, on m'a assuré qu'il y avait un superbe volcan à voir "à deux pas d'ici". En effet, le volcan d'Antuco ne se trouve qu'à 182km à vol d'oiseau de la ville. Un "pas chilien" vaut donc 91km, je note. Quand un Chilien viendra en Belgique, je pourrai lui dire que le plus beau en Belgique, c'est le Manneken pis de Namur ou encore les fameux canaux de Charleroi, la Venise belge.

Ce qui frappe en premier à Concepción, surtout pour quelqu'un qui habite à Liège, c'est l'absence d'un équivalent à nos barakis. Ici point de famille groseille dont la mère aux cheveux dégoulinants d'huile de friture matraque son gosse à coups de fricadelles surgelées devant la clientèle médusée du Aldi. Il faudra se contenter de quelques thugs et encore, ils sont rares.

Mais je t'entends d'ici, cher lecteur. Tu t'insurges déjà. Comment? Point de baraki? Mais à qui peut donc se comparer la ménagère pour se dire que, "bon, heureusement, il y a pire que nous", hein? Eh bien au risque d'en décevoir beaucoup, le rebèle est également absent de la ville. Ainsi, on ne croisera pas de Clothilde, jeune militante en marge de la société, dont les mèches bleues cachent les écarteurs de 13cm de diamètre et son tatouage de papillon sur la nuque. Non, pour changer la société, les Chiliens sont bien emmerdés, ils sont obligés de faire des manifestations. Des manifestations? Non mais pourquoi pas changer les choses tant qu'on y est? Heurseument, en Belgique, nous, on a compris que pour renverser le capitalisme, il fallait se tondre les cheveux sur un seul côté et porter des sarouels. 'sont cons, ces Chiliens quand même. En plus, leur revendications sont bidons. Les étudiants, par exemple, font des grèves pour avoir droit à des cours de philo. Faudra qu'on leur explique qu'ils devraient plutôt militer pour avoir congé le lendemain des grosses beuveries, quand même. Mais bon, pour ça faudrait qu'ils soient civilisés, comme nous les Belges. Rome ne s'est pas faite en un jour...

Un peu perdu au milieu de cet environnement peu familier, j'ai vite décidé de rester en terrain connu et de manger dans le plus fin restaurant international que je connaisse : le McDonald's. Je bredouillai au serveur ma commande en acquiesçant à chacune de ses questions, auxquelles je ne pigeais de toute façon pas un traitre mot. Une fois assis à ma table, je pus vérifier avec soulagement qu'au Chili aussi, les burgers sont trois fois moins épais que sur la photo. On a eu chaud. Plongeant ma main dans un sachet de frite qui ne nourrirait pas une anorexique constipée, je faillis m'étouffer en constatant qu'on m'avait servi un jus d'orange en guise d'accompagnement. Décidemment, ils cherchaient l'incident diplomatique. Convaincu que même les anglais pro-Brexit ne prenaient pas leur petit déj à 14h, je partis donc expliquer au serveur qu'Hitler avait envahit la Pologne pour moins que ça, et après quelques minutes d'échanges aussi incompréhensibles qu'inutiles, compris qu'ils ne servaient que du jus d'orange. Alors le choc des cultures, c'est bien joli hein, les sauterelles grillées, tout ça, mais un McDo avec un jus d'orange, faudrait voir à pas se foutre de notre gueule.



Voilà ce que j'ai appris depuis que je suis ici. La semaine prochaine, nous verrons comment Hughes Aufray a mal recopié le nom de la capitale et en a fait une chanson. Je sais, je sais, tu en veux plus, cher lecteur, mais il te faudra être patient. D'ici là, hasta luego

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