Sucre et Potosì : « dolce vita » versus génocide !


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South America » Bolivia » Chuquisaca Department » Sucre
August 17th 2011
Published: August 18th 2011
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Sucre : les vacances boliviennes

Bon bon bon, après quasiment 2 semaines d’absence totale sur notre blog, il faut qu’on s’y remette ! On ne vous cache pas qu’on a pris du retard et que beaucoup de choses se sont passées depuis…
Si on réussit à se remettre à jour, les posts du blog vont pulluler sous peu ! C’est parti !

Nous avons donc rejoint la « deuxième capitale » du pays, Sucre, il y a maintenant plus de 2 semaines ! Nous quittons l’Altiplano momentanément pour passer quelques jours dans cette charmante ex-capitale bolivienne, à la douceur plus qu’agréable !

Sucre, à 2790 mètres d’altitude, se trouve dans la région des « Vallées », une région qui longe tout l’Altiplano bolivien mais quelques mètres (voire kilomètres) en-dessous. Un climat bien plus clément du coup, fortement apprécié après les rigueurs de l’Altiplano.
Sucre, aujourd’hui 260'000 habitants, est connue pour être « le bijou de l’art baroque d’Amérique latine ». Également appelée « La Cité blanche » ou « la ville repos », elle n’a pas menti et sa beauté ainsi que sa douceur nous ont fortement charmé !

Un petit plongeon dans l’histoire de la ville :

Sucre fut fondée en 1538 et connu la première université du pays en 1624, l’université « San Francisco Xavier », berceau de l’indépendance (également deuxième université du continent). Depuis lors, ses étudiants ont toujours été connus comme étant des révolutionnaires aux idées les plus radicales et innovantes.

La ville ne s’est pas toujours appelée ainsi, au contraire, elle connut 4 noms différents ! Rien que ça. Tout d’abord appelée « Charcas » lors de sa fondation, en référence au peuple « Charkas » qui vivait dans la région. Puis très rapidement, elle se fait appeler « La Plata », jusqu’en 1776, car elle se situe dans une zone géographique particulière, appelée en ces temps « La Cuenca de la Plata » autrement dit : « le Bassin de l’Argent » (en référence aux mines d’argent proches). En 1776, elle change à nouveau de nom et est alors dénommée « Chuquisaca » jusqu’en 1825.
En 1825, lorsque la ville est sur le point de devenir capitale bolivienne, elle est rebaptisée « Sucre », en l’honneur de Monsieur Antonio José de Sucre, camarade d’arme de Simon Bolìvar, libérateur de la Bolivie ainsi que du Venezuela, Colombie, Equateur, Pérou !
Par la suite, la ville verra petit à petit les organismes principaux se déplacer à La Paz, en plein essor, et perd alors son titre officiel de capitale. Même si, de nos jours, les habitants de la ville vous garantissent dur comme fer que la vraie capitale de la Bolivie, c’est Sucre ! :D (véridique)
Finalement, en 1991, Sucre et son centre historique exceptionnel sont classés au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Aujourd’hui, Sucre est encore capitale constitutionnelle de la Bolivie. Elle a gardé ce visage « authentique » d’une ville qui ne s’est jamais vraiment modernisée. Quel plaisir !
De plus, la ville est aujourd’hui un important centre universitaire, ce qui anime la cité d’une teinte jeune, dynamique et très agréable du coup !
Vous l’avez compris, notre séjour dans ce petit bijou a été des plus appréciés !

Nous avons donc débarqués à Sucre en avion, nous évitant ainsi 13h de bus la nuit (très froide !) depuis La Paz. Et tout cela pour 60 francs suisses. Pas mal ! Nous avons du coup eu droit à un spectacle magnifique, survolant l’Altiplano inhabité durant le trajet !

A Sucre, nous avons également eu le plaisir d’assister à la fête nationale de la Bolivie, le 6 août. Et il faut savoir que par ici, les jours précédents la fête, les cortèges et les défilés se suivent, sous prétexte de répétitions ! Donc le spectacle, on l’a en fait eu tous les jours bien avant la fête en question ! :D

Nous avons donc parcouru durant 5 jours cette superbe ville aux façades et aux bâtiments tous plus beaux les uns que les autres. Quasiment tout est blanc, ce n’est pas qu’une légende !
L’ambiance y est tout sauf bolivienne ! Ici la pauvreté n’est pas vraiment à l’ordre du jour, en tout cas dans le centre. Ça change du reste du pays ! On sent la population aisée, moderne, se baladant avec leur iPhone ou leur ordinateur portable ! Ça fait presque bizarre !

C’est également ici que nous avons retrouvé nos deux amis suisses, avec qui nous avons voyagé entre l’Equateur et le Pérou. Nos retrouvailles furent…. Arrosées, dansantes et des plus sympathiques ! De quoi tester les lits de notre chambre d’hôtel pour une bonne grasse matinée le jour suivant !

Nous avons finalement passés un jour ensemble au célèbre marché du village de Tarabuco, une soixantaine de kilomètres plus à l’est de Sucre. Ce village est connu dans toute la Bolivie pour son marché du dimanche, réunissant toutes les populations alentours (Indiens yamparas et tarabucos) qui viennent à pied ou en camionnettes y vendre leur textile et autre pièce originale.
Les motifs de textile « Tarabuco » sont également connus comme certains des motifs les plus fins d’Amérique du sud.
Le porte-monnaie s’est donc ouvert quelquefois, mais le marchandage est rude par ici ! Les touristes y viennent régulièrement et les Indiens ont la tête dure ! :D


Ainsi s’est achevé notre très plaisant séjour dans cette charmante ville « sucrée ». Nous avons quitté la cité en bus pour nous diriger 150 km plus au sud, dans une ville au caractère et au charme tout différent…

Potosì : dans l’enfer des mines…

Potosì…….. une ville au lourd passé historique. Un génocide humain. Un esclavage sans limite. Tout ça pour l’enrichissement du peuple espagnol et par conséquence du peuple européen tout entier ! Ce lieu est chargé d’un passé inimaginable et atroce. Ouvrez grand vos mirettes :

Potosì, aujourd’hui 145'000 habitants, cité coloniale à 4090 mètres d’altitude, ce qui en fait la ville de plus de 100'000 habitants la plus haute du monde. Inscrite depuis 1987 au patrimoine mondial de l’UNESCO, elle est un des trésors de l’art baroque du continent. Deuxième plus belle ville du pays après Sucre, elle n’a pourtant pas un passé du même gabarit !

Potosì se situe sur une petite plaine, dans l’Altiplano bolivien, collée aux montagnes et principalement à la plus importante de l’Histoire : « El Cerro Rico » ou « La Colline Riche ». (voir panorama ci-dessus)
C’est en fait un Inca, Huayna Capac qui la découvrit en premier, au XVIe siècle. Mais ce fût l’Indien Huallpa qui révéla son existence à un espagnol conquistador aux alentours de 1545. Et sans le vouloir, il venait de déclencher un effet domino qui allait s’avérer être un des épisodes les plus atroces de l’Histoire locale.

En effet, la dite colline abritait alors une mine d’argent si fabuleuse que la puissance espagnole allait pouvoir se propulser au-devant de la scène uniquement avec les richesses durement récupérées au plus profond de cet enfer noir ! En effet, Potosì fut élevée au rang de capitale impériale par Charles Quint, roi de l’empire d’Espagne à cette époque. On donne alors à la ville une devise sans équivoque : « Je suis la riche Potosì, le trésor du monde, la reine des montagnes et la convoitise des rois ». Tout est dit.

La mine fut exploitée durant trois siècles par les Espagnols, elle fut percée de toute part (jusqu’à 10'000 galeries et plusieurs milliers d’entrées !). Potosì grandit au rythme de cette exploitation inimaginable. Au milieu du XVIIe siècle, Potosì avait même plus d’habitants qu’aujourd’hui ! Et avec ces 165'000 âmes, elle était alors plus grande que Paris ou Londres, la ville la plus grande du monde à cette époque !
On retrouve même des expressions populaires datant de cette époque. Par exemple, dans le film « Don Quichotte », l’expression « Vale un potosì » a une signification quasi égale à l’expression française « C’est le Pérou » c’est-à-dire dans les deux cas une expression relative à une grande richesse.

Parlons maintenant plus concrètement de tout cela : 6 millions d’Indiens aymaras et quechua ont perdu la vie dans ces mines, exploités par des conquistadores seulement préoccupés par l’appât du gain ! Les conditions de travail dans ces mines d’argent ont été catastrophiques ! Mort d’intoxication, éboulement, épuisement et j’en passe ! De plus, ce réel travail forcé (appelé à l’époque la « mita ») n’était évidemment pas rémunéré ! Les espagnols ayant également amenés avec eux des maladies inconnues par ici, ceux qui ne mouraient pas à la mine mourait en dehors !
À cela, on peut également y ajouter tout un peuple de personnes africaines, esclaves, amenés ici par les espagnols pour travailler dans l’industrie de monnaie de Potosì, la « Casa de la Moneda ». C’est là qu’on frappait les pièces d’argent, monnaie universelle entre l’Amérique du sud et l’Espagne à ce moment de l’Histoire.

Il est dit que la quantité d’argent énorme que les exploités retirèrent des mines de Potosi suffirait à construire un pont reliant Potosì à l’Espagne, mais que la quantité d’ossements humains venant des victimes de cette exploitation aussi ! Glauque mais tellement vrai.

Après 1800, l’argent s’épuise petit à petit à Potosì et l’étain devient plus important sur le marché. C’est le début du déclin des mines. Potosì s’épuise, comme son « Cerro Rico », et elle ne compte plus que 9000 habitants en 1825 !

De nos jours, le minage est encore d’actualité mais à petite amplitude, par contre toujours dans des conditions totalement insécures et terribles. Mais quoiqu’il en soit, l’Histoire de cette ville montre les atrocités de l’humain. La Couronne d’Espagne s’est enrichie au détriment de millions de vies humaines, traitées sans aucune valeur ni pitié ! De quoi cracher sur les Ibériques, on peut comprendre ! …

Malgré ce passé très lourd, la ville de Potosì nous a semblé moins rude que ce que l’on s’attendait à voir. En fait, c’est une ville fort paisible de nos jours, vivant à son rythme sous sa montagne de l’Enfer, bien visible !

Nous avons visité avec beaucoup d’intérêt sa « Casa de la Moneda », maison énorme pleine d’histoire qui relate l’abomination du traitement des Espagnols envers les populations locales. La maison possède encore beaucoup de pièces originales utilisées pour frapper les pièces de monnaie à l’époque. Visite très intéressante.

Nous avons également visité la cathédrale de Potosì, très belle construction baroque mais en pleine rénovation. La commune de Potosì a par contre récemment suspendu le financement de ces réparations. Elles sont cependant maintenues grâce au financement du Japon ! Quelle ironie ! En fait, le Japon exploite actuellement des mines au sud du pays et en contrepartie participe légèrement à la rénovation de pièce importante telle la cathédrale ! …

Une des attractions phare du lieu : la visite touristique des mines de Potosì ! Beaucoup d’agences de tourisme la proposent : visite des bas-fonds dans une chaleur abominable (dépassant parfois les 50°C), dans un noir le plus absolu rempli de poussière et dépourvu d’oxygène. On fait connaissance avec certains mineurs en plein labeur et on contribue par notre visite à aider un peu financièrement ces personnes. Mais la chose ne nous a pas trop tentés.
Déjà faut pas être claustrophobes, collés dans le noir et pliés en 4… ensuite, c’est un peu glauque tout de même. Dire que là-dedans moururent des milliers de personnes, ça fait un peu « tourisme voyeurisme »… bref nous n’y sommes pas allés. Nous nous sommes contentés d’observer de loin ce géant rouge, le « Cerro Rico », impressionnante montagne dominant cette ville meurtrie.

Comme vous avez pu le lire, les visites de Sucre et Potosì ont été totalement différentes ! Les deux nous ont plus, chacune à leur façon.
Ce sont les 2 dernières villes boliviennes que nous avons visité. La suite de l’aventure se passe dans un autre monde…

Nous allons plonger durant 3 jours dans le plus profond de la Bolivie pour voir des paysages exceptionnels, dans le Salar d’Uyuni, plus grand désert de sel du monde ainsi que dans le Sud-Lipez, la zone sud de la Bolivie, faisant frontière avec le Chili.
Préparez-vous pour la suite, ça va être du lourd…




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