Chapitre 17 - Oriente, Bolivia, 20 de abril - 6 de mayo 2010


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South America » Bolivia
May 16th 2010
Published: May 16th 2010
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Après une dizaine de jours à La Paz bien fatigants, nous cherchons un peu de repos et décidons de descendre un peu de nos hauteurs, direction l’est du pays. L’altitude est éprouvante, nous dormons mal, et nous aimerions trouver quelque endroit plus calme, et moins de touristes !
Première étape à Coroico, puis nous filons à l’orée de l’Amazonie : Caranavi, San Borja puis San Ignacio de Moxos. La piste est une fois de plus bien pourrie, mais nous avons de la chance tout de même car il y a quelques semaines, il n’y avait pas de route par ici… Pendant la saison des pluies ce tronçon est impraticable ; nous héritons ainsi de nombreux nids de poule, d’aquaplanings sur des centaines de mètres et de quelques enlisements pas bien méchants.
Nous souhaitons visiter dans le coin une réserve de la biosphère perdue au milieu de la savane bolivienne ; nous espérons monter à cheval, faire un peu de pirogue et voir quelques bestioles. Sur le papier ça à l‘air bien sympathique.
A peine déposés par le dernier bus de la journée, vers 11h du matin, on découvre un lieu à l’abandon, des chambres sales presque miteuses, des constructions déconstruites ;
Rio IbareRio IbareRio Ibare

les piranhas, prets a sauter dans la casserole
l’atmosphère est glauque, tout est pesant, voire triste à mourir. Nous sommes malgré tout accueillis par un jeune homme pas très causant qui nous propose de dormir là et de faire du cheval, tout cela pour des prix franchement pas valables… On repart à pied, sous une chaleur écrasante, pour rejoindre la communauté située un bon kilomètre plus loin, quelques peu amers vous comprendrez.
A l’abri du soleil sous un toit traditionnel en bambou et palmier, nous mangeons un bon almuerzo, accompagnés par quelques locaux. Une mère discute longuement avec nous de religion - évangélisme évidemment - et nous apprend qu’Evo Morales veut gouverner le monde, que c’est écrit dans la Bible, et qu’il s’ensuivra 7 ans de bonheur puis 7 ans de grand malheur… Dieu est apparu par deux fois dans ses rêves, ce qui l’a sauvée du pêché ! Désormais sa famille est à l’abri de tout désastre, et qui sait, la vie éternelle existe peut-être…
Heureux de l’apprendre, nous terminons notre almuerzo sous une pluie battante, et chopons in extremis vers 15h30 una mobilidad (tout ce qui roule et qui moyennant quelques sous fait office de taxi) qui passe par là et nous amène jusqu’à la ville
CaranaviCaranaviCaranavi

en transit, terminal de bus, un ptit gars ecoute sa radio, peinard
la plus proche. Dieu nous a sauvé d’une nuit dans la savane, à dormir sur une terre humide avec les moustiques…
Le lendemain nous continuons notre route jusqu’à Trinidad. La chaleur est parfois à la limite du supportable dans cette région, avoisinant les 40°C. Les habitants se déplacent majoritairement en moto et nous assistons à des défilés comiques autour des places de chaque ville traversée. A Trinidad par exemple il y a pas loin de 6500 habitants, pour 3000 mototaxis enregistrés… c’est dire le bazar !
Nous sommes donc à l’entrée de l’Amazonie, et nous espérons bien entrer, enfin, dans cette jungle !! C’est chose faite avec Nilo, guide sympathique et très bavard, qui nous embarque sur son bateau pendant trois jours sur le rio Ibare, un des nombreux confluents de l’Amazone. Comme c’est tout juste la fin de la saison des pluies, le niveau des fleuves commence à baisser mais les animaux restent cachés, tout est détrempé, il nous est impossible de marcher dans la forêt… Dommage, nous ne verrons que quelques toucans et dauphins roses de très loin et de nombreux perroquets de très haut… Heureusement, nous rencontrons les habitants des communautés du fleuve, car Nilo connaît tout le monde. Nous pêchons des piranhas, mangeons des piranhas, Benj se baigne parmi les piranhas… nous découvrons les arbres à calebasses, et apprenons à vider les fruits pour ensuite les utiliser dans la cuisine que l’on a pas encore…
Nous suçons les graines de cacao et nous en gardons une bonne vingtaine que nous tentons de faire sécher tant bien que mal sur notre route. Nous espérons bien en faire du chocolat une fois rentrés en France ! On aperçoit également les bateaux de la police anti narco avec leurs belles mitraillettes. On se croirait dans un film à les voir passer à toute bombe remuant les eaux du fleuve endormi. Nous sommes tout de même sur la route de la drogue, et ici, tout le monde, d’une façon plus ou moins directe travaille en relation avec ce secteur. L’économie de la drogue représenterait entre 30 et 40% du PIB de la Bolivie, c’est dire si ce n’est pas prêt d’arrêter… surtout que l’on nous rabâche que Morales était tout de même le président du syndicat des cocaleros (ramasseurs de coca)…

Les personnes que l’on rencontre sont très attachantes, la vie est dure ici bas : difficile de mener
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paume au milieu de nulle part, discussion avec une evangeliste fanatique
à bien ses récoltes lorsque la pluie et le rio engloutissent tout. Les gens sont pauvres mais semblent heureux et solidaires. Ils nous fournissent du bois sec pour cuisiner et nous partageons nos repas avec eux, et des moments de discussion. Nilo est particulièrement fort pour raconter des histoires. Ce doit être un sport local, nous avons vu une affiche annonçant un festival de historias y chistes (histoires et blagues). Evidemment, Nilo s’intègre d’une façon ou d’une autre dans chacune d’elles, mais impossible de savoir le vrai du faux… l’art et la manière de raconter !

****
Une histoire de vengeance racontée par Nilo, guide depuis 20 ans et mototaxista dans la région du Béni… Ames sensibles s’abstenir…

Don Pedro, orphelin de naissance, est élevé par Dona Violeta, mère de Don Roberto ; les deux garçons grandissent ensemble, mais très tôt déjà se révèle le caractère violent de Pedro par maints petits détails. Roberto quant à lui à peur de tout et pleure à peine on l’effleure. A la vingtaine, en plein mois d’août, Pedro avait repéré une demoiselle qu’il aurait bien aimé épouser. Les choses vont très vite dans ces cas là tu sais bien.
- « Carla,
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la poule protectrice
veux tu bien m’épouser ? Je t’aime à la folie ! » demande t’il tout simplement.
- « Ah oui, bon très bien Pedro », répond-elle bien sagement. Il faut dire qu’il était plutôt bel homme malgré son caractère détrempé.
L’affaire est dans le sac, mais voilà que quelques jours plus tard, n’en pouvant plus d’attendre, Pedro s’approche un peu trop près de la Carlita.
- « Il faut être patient Pedrito, tu le sais bien, nous nous marions bientôt. »
N’écoutant que son bon plaisir et son envie de jouir de la situation bien plus tôt que prévu, il s’approche encore, mais bien plus férocement cette fois, et frappe la jeune demoiselle en pleine figure ; cette dernière se rattrape comme elle peut sur la table de la cuisine et s’enfuie aussi vite qu’elle le peut, s’en plaindre à Dona Violeta.
- « Votre fils Pedro vient de me frapper ! Nous devons attendre avant de nous marier, et je ne suis plus sûre de vouloir d’un mari tel que lui », crie t’elle à travers la maison.
Pour Pedro c’en est trop, il entre dans une rage terrible et tombe violemment sur sa mère de lait qui venait de passer la porte, et ne cesse
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quand ca tombe, ca tombe ! Pluies tropicales
de la frapper, à mort. La pauvre Carlita fuit cette fois pour de bon et nous ne la reverrons plus. Seul Roberto est témoin de la scène suivante, tremblant comme une feuille, sous le lit de sa mère. En proie à une folie extrême, Pedro se couche sur sa mère et met à la violer de toutes ses forces, alors qu’elle repose dans son sang, bien morte sur le sol de sa cuisine.
Sur ce, Pedro s’enfuie loin, très loin, et même que personne ne sait où il s’en est allé. Aucune nouvelle, aucune trace, aucune plainte, comme s’il s’était enterré lui-même…

C’était il y a quinze ans cette sale histoire, et la semaine dernière, voilà que Roberto tape à ma porte et vient me demander si je ne connais pas un pilote d’avion.
- « Bien sûr » que je lui dis, « Il y bien l’Ignacio, le fils de la Maria, tu sais bien, celui qui a épousé ma cousine. » Sans un mot, le voilà qui part à sa recherche.
C’est Ignacio qui m’a raconté tout ça pas plus tard qu’hier en vérité.

Roberto explique alors à Ignacio qu’il doit se rendre d’urgence dans une estancia près de San Borja pour chercher un cochon. Il lui paiera le prix qu’il voudra, c’est important, c’est pour fêter les 80 ans de sa grand-mère. Pour 1000 pesos l’affaire est conclue, ils partent sur le champ.
Une fois arrivés, Ignacio attend tranquillement dans son avioneta le retour de Roberto.
- « Tu veux pas un peu d’aide amigo ? » qu’il lui demande Ignacio.
- « Non ça va aller, je reviens bien vite » lui répond alors Roberto le regard vide, fusil à la main, couteau à la ceinture.

Roberto se présente alors devant le propriétaire de l’estancia et voilà ce qu’il lui demande : - « Don Pablo, j’ai appris il y a quelques jours que vous hébergez ici un certain Pedro. Je dois le voir immédiatement pour régler une affaire urgente. »
- « Ah Pedro, c’est un de mes meilleurs ouvriers, y’en a pas deux comme lui pour ramener mes vaches. Il doit être en train de déjeuner dans la maison que vous voyiez au fond, je vous y emmène. »
Il faisait très chaud ce jour là, Ignacio aperçoit les deux hommes traverser la cour pour atteindre la maison.
- « Attendez-moi ici je vous le ramène. Pedro, un monsieur qui semble te connaître souhaite te
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les vaches locales, enfin pas si locales, ca vient d'Inde, no ?
parler d’une chose urgente dehors, tu devrais te dépêcher. » annonce Don Pablo, quelque peu agité par l’attirail que porte Roberto.
-  « Très bien Don Pablo, me voici » répond Pedro en avalant sa dernière bouchée.
En sortant du baraquement, le soleil dans les yeux il ne voit pas bien qui souhaite le rencontrer en plein almuerzo.
- « Bien le bonjour cher frère de lait. Enfin je te retrouve ! » s’exclame Roberto.
Pedro n’a pas le temps de se retourner que Roberto tire une balle bien rapide qui vient se loger dans l’épaule de son frère encore tout ahuri.
Don Pablo s’insurge ; prêt à saisir Roberto à la gorge, il lui demande ce qu’il se passe.
Roberto lui raconte toute l’histoire, Carla, l’assassinat et le viol de sa mère, ses années de recherche.
- « Ce n’est pas contre vous que j’en ai Don Pablo, mais comprenez que l’histoire que j’ai à régler avec cet homme ne concerne que nous. »
Don Pablo se calme, compréhensif et dégoûté par ce qu’il vient d’apprendre.
- « Très bien, je vous abandonne cet homme. »

Roberto assomme Pedro avant de le coucher à terre et de bien lui attacher les mains et les pieds ensemble comme
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traversee du rio Mamore avec barques geantes en bois pour atteindre Trinidad
il le ferait avec un cochon que l’on emmène à l’abattoir.

Ignacio a tout vu de loin, et c’est encore tremblant qu’il reçoit Roberto avec son drôle de chargement.
Devant l’air interloqué et tout de même apeuré d’Ignacio, Roberto entreprend de lui raconter toute cette histoire bien calmement, depuis le début.
- « Maintenant dépose nous dans la jungle, je dois terminer ce travail. »
- « Pas de problème Don Roberto. »

Désormais seuls dans la jungle, la lumière rasante de cette fin d’après midi pour seul témoin, c’est le moment de vérité. Roberto détache soigneusement Pedro qui fait semblant d’être toujours dans les vapes. Celui-ci se relève d’un coup d’un seul et tente d’attraper le couteau qui pend à la ceinture de son frère. S’ensuit un long combat bien furieux. Ignacio m’a raconté qu’il ne savait pas quoi faire, attendre ou les abandonner là à leur triste bataille ? Il n’aurait pas eu envie de se retrouver seul avec Pedro je crois bien, l’est pas très courageux l’Ignacio !
Roberto finit par prendre le dessus, et tire une nouvelle balle, dans la jambe cette fois, qui a le mérite de paralyser Pedro, qui s’écroule instantanément.
C’est ainsi que devant un Ignacio
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la charrette est toujours la, entre deux motos
pétrifié commence une véritable torture : d’abord les oreilles, l’une après l’autre, au couteau qu’il lui coupe, bien consciencieusement. Les cris sont affreux, heureusement, il n’y a personne d’autre pour les entendre, et les bêtes sauvages ont fui depuis bien longtemps… elles reviendront sans doute pour manger ce qu’il reste. Car après les oreilles, c’est au tour des doigts, et de chaque doigt, l’un après l’autre. Roberto, au fil des gémissements, pense à sa mère, puis à la petite Carlita, et partage sa peine avec Pedro.
- « Tu vois Pedro, je t’ai retrouvé, je me l’étais promis. J’en rêvais depuis longtemps pendant que tu travaillais bien tranquillement dans cette estancia, loin de tout, loin de ton affreux passé. »

« Pedro est mort quand Roberto en est arrivé à l’épaule gauche, et oui c’est exactement comme ça que ça s’est passé, Ignacio m’a tout raconté ! » s’exclame Nilo, alors que nous avons du mal à finir notre assiette. On ne saura jamais si c’est cette histoire ou les centaines de moustiques qui nous tournent autour qui nous ont coupé l’appétit…

***

Après Trinidad et les histoires à croquer de la région du Béni, nous filons vers Santa Cruz. C’est
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le paresseux sur la place du bled, dans les arbres haut perches, traverse parfois la route, alors les ptits vieux qui paressent sur les bancs le sauvent du trafic
une ville métissée et « européenne » dans le sens commercial du terme (boutiques Clarks, Benetton etc.), la plus développée du pays par son économie, grâce aux nombreux gisements gazéifères et autres ressources naturelles à ses portes. Les habitants revendiquent leur autonomie et sont dans l’ensemble contre le pouvoir en place qui a tendance à nationaliser à gogo histoire que cela profite à tout le pays, d’où le mécontentement de cette région. On nous a même dit qu’il pourrait très bien y avoir une guerre entre l’est et l’ouest un de ces jours en Bolivie. Entre ce qui se dit et ce qui est, il faut toujours faire le tri mais cela met un bel accent sur les divergences, non ?

Notre route continue toujours plus à l’est, vers la frontière du Brésil, à la découverte des missions jésuites. Les jésuites furent peut-être les seuls à respecter les populations indigènes, en Bolivie, au Paraguay et en Argentine. Ils ont intégré leur savoir faire et leurs compétences multiples tout en leur inculquant normes vestimentaires et religieuses évidemment. Toujours est-il que l’équilibre s’est créé, et que de magnifiques églises ont été érigées. L’artisanat s’est développé (peinture, tissage et menuiserie notamment), et la musique
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le meme paresseux
a envahi la forêt. Nous avons la chance d’avoir pu assister à quelques concerts de musique baroque car chaque année à cette époque, un festival a lieu à travers ces villages.
Ce furent quelques jours au calme et sous la chaleur écrasante de cet oriente bolivien, avant de remonter vers l’altiplano et la capitale constitutionnelle du pays, Sucre la blanche. Le temps nous est compté désormais, il nous reste un mois !



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Trinidad

ecolieres locales, toujours des tenues reglementaires pas possible
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Trinidad

les motos a gogo
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le cacao et ses feves, a sucer c'est tout sucre. Maintenant il faut que ca seche pour faire du chocolat
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une pirogue
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notre petite barque


17th May 2010

MAGNIFIQUES!!
L'histoire de Nilo me laisse rêveuse....et toute votre aventure aussi...alez même si il ne reste qu'un mois il peut s'en passer des choses!!! dans tous les cas soyez sûr que l'on vous attend les bras ouverts et les oreilles frétillantes d'entendre vos récits. je pense à vous!! C'est CA le tourisme solidaire, partager et vivre des choses que JAMAIS le club med proposera de peur d'attraper des trucs bizarres!!! AH AH AH...au moins il reste de la place pour nous pour découvrir la vraie vie au fin fond des pays du globe (je m'occupe de l'est et vous de l'ouest) Je vous embrasse avec pleins de besitos PS : ils embauchent pour ramasser les paresseux à Trinidad??!!
20th May 2010

et alors ? et alors ? Zorro est arrivéééé, sans se presser, le grand Zorro avec son cheval et son grand lasso!
13th June 2010

Merci
Bonjour, je suis tombée sur votre blog par hasard car je cherche un moyen de faire l'amazonie bolivienne sans me rendre à Rurre que je pense trop touristique. Comment peut on contacter ce Nilo qui m'a l'air d'être le guide parfait ?

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