Allemagne - Bilan, 13 jours avant de partir


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North America » Canada » Quebec » Montréal
July 28th 2009
Published: September 26th 2009
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Quand je suis allée en Australie, j'écrivais un blog afin que mes proches puissent suivre mes aventures à l'autre bout de la planète.

Sachant que j'avais rendu bien des gens heureux en utilisant cette méthode pour donner de mes nouvelles et considérant mon départ imminent à l'étranger encore une fois dans quelques jours, je me suis donc dis qu'il serait peut-être bien de répéter l'expérience.

Cependant, tout en y réfléchissant, j'en ai conclu que la forme devrait changer puisqu'il ne s'agit pas là d'un voyage, mais bien d'aller s'installer à l'étranger. Mon blog penchera donc plus vers une tangente de réflexions sur ce qu'est la vie, disons-le, d'immigrante. Et vous savez comme moi que partout, les préjugés sont tenaces sur les immigrant(e)s.
Pour ceux et celles qui ne le savent pas encore, je m'en vais m'installer en Allemagne. Un pays dont je ne parle pas la langue, où je ne connais personne et où les moeurs me sont encore étrangères.
Pis moi, ben, ça a l'air que j'me lance là-dedans.



Procédons donc.


Prise dans une multitude de préparatifs pour le départ, plus le déménagement, le shipping de mes choses, les passeports, la vente de tout ce que j'avais accumulé ces dernières 5 années, l'été, la famille, la petite... je n'avais pas vu le temps passer et la date butoire arriver. Mais oui, oui, elle arrive.

Et franchement, là, je freak out complètement.

Première raison.
J'ai une peur bleue de l'avion. Je sais, ça sonne fou quand je pense que j'ai pris plus de quinze fois l'avion, j'ai toujours eu peur, mais là, ça dépasse des limites. J'y pense quand j'me couche, ça m'empêche de dormir, et pis quand enfin, j'm'endors, j'en fais des cauchemars. C'est quelque chose de prendre l'avion seule et d'avoir peur pour sa seule personne. Mais prendre l'avion avec ma fille et avoir pour elle aussi, ça me tue. Alors je commence à délirer sur des choses complètement débiles et je me fais encore plus peur. Quand l'avion au Brésil a crashé, il y avait un bébé à bord. Ce doit être horrible de savoir que ton bébé a peur. Je l'écris et j'ai des frissons. Je sais que ça fait super cliché de dire ça, mais faut vraiment être parent pour le comprendre. Mais tout ça, c'est con, je le sais, je me le répète et puis je passe à autre chose. Ben, j'essaie.

Deuxième raison.
On ne se comptera pas de menteries: si dans quelques années, on est bien installés, bien entourés, on a de bons emplois, de bons ami(e)s, un bel appartement... voudra-t-on VRAIMENT encore redéménager outre-mer et recommencer à zéro?
Probablement pas.
Montréal deviendrait donc une destination-vacances, le Québec, mon chez-moi deviendrait une destination-vacances. Tout simplement. Je ne me plains pas; j'ai la chance de vivre ici une expérience extraordinaire et pour ma famille, mon chum et ma fille, je suis prête à faire tous les sacrifices imaginables et à vivre sur la lune s'il le faut.
Mais alors, je me mets à réfléchir sur ce que sera ma vie loin de Montréal, SI l'hypothétique devient bel et bien vrai...
Une vie sans Iced Capp du Tim? Sans poutine? C'est possible? Sans Festival de Jazz? Sans cinéma québécois? Sans concert de Patrick Watson, Mara Tremblay, Malajube? Sans être québécoise, mais "french canadian"? Et puis, j'me dis que je compenserai, que je vais trouver un moyen, mais voilà, je continue à penser, je me mets à creuser encore plus loin.

Troisième raison.
Prendre l'avion le 10 août prochain, ça veut aussi dire que je devrai peut-être renoncer à tous les plans de vie (si nombreux soit-il) que j'avais établis pour mon avenir depuis les 20 dernières années (okay, peut-être 15). Jamais je ne ferai mes études à l'UQAM comme je l'ai toujours cru, jamais je n'aurai un pied à terre à St-Jean et à Montréal en même temps, jamais je n'aurai de loft dans le Vieux-Port, jamais je n'enseignerai à Iberville, jamais je n'aurai mon resto (auquel j'ai tant tenu) sur la bande du canal, jamais je ne grandirai avec ma soeur ni serai sa meilleure amie, jamais je n'irai souper le dimanche chez ma mère, jamais mon bébé ne connaîtra vraiment ma famille comme moi j'ai connu la famille de ma mère. Et puis là, je m'embarque sur un terrain plus-que-glissant. Et ça commence à être dangereux pour ma petite tête.

Quatrième raison.
J'ai toujours cru que quand j'aurais mon premier enfant, je serais mariée (ben oui, j'suis old school de même moé), j'aurais une carrière, un bel appartement. Bon, le moindre qu'on puisse dire, c'est que ça ne s'est pas exactement passé comme ça. Mais ce à quoi je ne m'attendais pas, c'est que ma fille n'est pas la même enfance que moi. En tout cas, une enfance québécoise. En partant, je sais très bien que ma fille ne connaîtra pas ce que c'est que de manquer l'école un matin de février à cause d'une tempête de neige, ni la frénésie de la fin des classes au mois de juin, ou juste d'aller à l'école de 8 à 4. Elle ne vivra pas des choses aussi futiles que de dîner à midi et souper à 5 heures. Elle ne passera pas son premier Halloween, ne mangera pas de tourtière à Noël et ne construirera pas de snowman pendant ses vacances d'hiver. Elle ne saura pas c'est quoi le thrill de boire illégalement à 16 ans, et croira qu'un nid-de-poule c'est vraiment un nid de poule. Et, je ne fais pas d'illusions, elle délaissera probablement le français de plus en plus en grandissant et quand elle le parlera, elle aura soit une pointe d'accent allemand et/ou français. Comme écrivaine, lectrice et amoureuse en général de la culture francophone, c'est un gros, très gros morceau de ma vie que j'avais envie de transmettre à ma fille et qui se retrouve menacé maintenant.

En prenant l'avion le 10 août, je prend le risque de renoncer à ce que ma fille soit québécoise. Et ça, ça me brise le coeur.

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