Karakorum (Хархорум), Mongolia (ou La Fondue Chinoise)


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Asia » Mongolia » Kharkorin
July 30th 2019
Published: July 30th 2019
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20 juillet

Je quitte ce matin le campement de yourtes alors que dans la pâle lueur du jour, les nomades détachent leur bétail pour leur permettre de disparaître dans le paysage jusqu'au prochain coucher de soleil.

Les vaches reviendront d'elles-mêmes ce soir.

Par centaine, les chèvres tout près seront, elles, récupérées parfois à cheval, mais plus souvent en selle d'une moto.

Puis les chevaux eux, ne reviendront jamais.

Ils seront récupérés au besoin, après un coup de téléphone (peut-être) d'un voisin de yourte, à des kilomètres de là.



Dans la steppe, des nerveuses musaraignes et des écureuils de Sibérie s'éclipsent dans les bosquets de lichen à l'approche de notre véhicule.

Les rapaces tournoient en un 8 infini dans le ciel vide, prêt à décocher leurs serres sur les plus imprudents carnassiers.

Il y a peu de place pour se cacher dans les grands espaces de la Mongolie.

Lorsque les petites bêtes ne sont pas en sécurité dans leurs tunnels, ils sont inévitablement à la merci des oiseaux de proie.



Notre van russe retrouve la route principale et poursuit sa lancé vers Karakorum, première capitale du Pays. À l'époque des grands massacres de Genghis Khan, cette cité fortifiée était le coeur reliant toute l'Asie médiévale.

Aujourd'hui (plus de 800 ans plus tard), on y retrouve que quelques monastères bouddhistes tibétains (dont le plus vieux lieu de culte du Pays), un musée et une averse de touristes coréens qui viennent enfiler des costumes traditionnels en ricassant, le temps d'une photo pour impressionner les amis encore à Séoul.



Ici, on peut aussi devenir le perchoir d'un aigle agoraphobe qui panique devant le regard paparazzique des appareils-photo.

Évidemment, l'aigle n'aime pas les foules.

L'aigle aime davantage tourner en rond dans le ciel en chassant les carnassiers.

...



On quitte Karakorum lorsque soudainement, Mr.Happy bifurque sèchement vers l'ouest et entre à nouveau dans le décor, par un chemin terreux cette fois, une veine tracée par les empruntes des 4X4.

Les collines auparavant décharnées bientôt se colorent de conifères sombres et regroupés, presque des contours en parfait coups de pinceaux.

En hiver, les nomades iront s'y réfugier, revissant leur yourte pour la froide saison, à l'abris des grands vents sibériens.



Notre van s'arrête enfin dans une vallée éloignée de la route principale, là où se trouve un hôtel difficilement accessible, perdu là comme un bunker militaire insondable par les satellites ennemis.

L'emplacement de l'hôtel n'est pas anodin: ici coule une source chaude et ferreuse aux propriétés supposément curative.

Des bains thermaux y ont été installés, au pied d'un chapelet de yourtes numérotées.



Alors qu'on descend de notre véhicule, de jeunes nomades serrées dans des t-shirts jaune décolorés s'activent à débarquer nos boîtes de nourriture et notre matériel de camping vers notre chambre d'hôtel, en série, comme une armée de fourmis charpentières.

La plus courte d'entre elles agrippe l'enflure de mon packsack en titubant.

Ficelée par ses bretelles, la fourmis ricane en simulant de crouler sous le poids de mon bagage.

Bousculant sa voisine, elle enclenche presque un effondrement de dominos dans les rangs.

J'ai présentement l'impression d'être dans un épisode des Minions.



Dans la chambre qu'on partagera tous les 4, la coquette Nyamka allume ses deux fours à propane de camping pour préparer le repas: de la soupe et puis de la chèvre.

L'air inspiré durant notre sommeil aura donc l'odeur graisseuse de cette cuisson de viande rouge.

Je le répète: il faut être bien carnivore pour venir visiter la Mongolie.



Bientôt, j'enfile mon maillot et doucement, je me rend aux spas en ébullition pour enfin me tremper le zizi dans l'eau bouillonnante des bains.

Je me retrouve donc là, dans les puits, fixant le ciel grisonnant qui annonce, ce soir encore, une pluie forte et électrique.



Se tenant loin de moi (allez savoir pourquoi), des coréens groupés macèrent aussi dans la soupe chaude.

Je me ferme les yeux, me détend le corps et sans forcer, me fais sortir les orteils de l'eau

comme du choux fleurs en flottaison dans une fondue chinoise.

J'ai l'impression que ma peau tranquillement passe du gris au rosé, à l'image d'une grosse crevette dans un bouillon fumant.



L'un des baigneurs émergeant, lisse et rondelet comme un champignon, discute bruyamment sur son cellulaire aquatique.

J'ouvre le regard pour constater que ce dernier m'observe ramollir dans le spa en poursuivant son importante conversation téléphonique.

Subtilement, le coréen déplie le coude en me présentant son interlocuteur à l'écran.

Coucou!

L'amie virtuelle, surprise, me fait un visage de beigne à l'écran en me secouant la main.

Coucou!

Je suis clairement le blanc en bedaine qu'on veut partager avec ses amis absents.



Etienne X



Note à Moi-Même:

Mettre des raisins secs dans de l'eau chaude et appeler ça du jus de raisin, c'est non.

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