Trekking in Sikkim ( ou Quand c'est la faute à l'Altitude )


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Asia » India » Sikkim » Kangchendzonga
March 17th 2007
Published: February 8th 2013
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17 mars:

On est à Yuksom. On se lève, il est 8h00 Am.



Je prends un grand respire avant de partir pour ce trek au Sikkim.

Le beau temps est de la partie.

Bien.



Les nuages sont quasi absents et les montagnes prennent tout l’espace.





Tout ce qu’on aura à faire, c’est de mettre un pied devant l’autre et avancer.



On atteint le premier campement à 1h30 Pm. Ce n’est qu’une cabane de bois dans une jungle en feuilles.

Assis sur des pierres, on prend du soleil en se faisant servir du thé noir.

Notre guide nous mentionne qu’il n’est pas sécuritaire de monter plus haut aujourd’hui. Il faudra s’habituer à l’altitude. Tant mieux car je ressens déjà ses effets : j’ai un mal de tête intense comme le lendemain d’une bonne cuite.



On est tout près de Bakhim, situé à 2500 mètres d’altitude.



18 mars:

Il est 8H00 Am et on entame la deuxième étape de notre trek. Le but aujourd’hui est de se rendre à Tsokha, situé à 3035 mètres d’altitude.



Ça devient plus difficile.

On ne fait que monter.



Il nous manque de l’énergie, il nous manque de l’endurance.

Il nous manque quatre mois de vitamines.



Après un cinq heures d’ascension, on atteint finalement le deuxième campement.

J’ai un court-circuit dans les mollets.



La vue de Tsokha est plus que grandiose. On est en plein cœur de l’Himalaya.

Le ciel est clair devant nous.

D’un côté, on retrouve les montagnes enneigées à la frontière du Népal. Et puis de l’autre côté, c’est l’immense Mont Pandim (6693 mètres) au cap d’hiver éternel qui occupe tout le paysage.



Demain, on devrait atteindre Dzongri, la dernière étape de notre montée.

‘’Tomorrow difficult’’ que nous dit notre guide avant qu’on s’endorme.

Bon. C’est ça la petite histoire qu’on aura droit avant de fermer les yeux.



19 mars:

On nous réveille à 6H30 ce matin. Je m’étire et je vais me laver le visage… avec un bas.



On déjeune en vitesse, on "pack les p’tits" et on quitte notre cabane perchée.

En route.

C’est la pire journée de notre trek qui nous attend!! On va souffrir.



On se tape donc un cinq heures d’ascension à 88 degré de dénivellation... en pleine neige.

L’altitude nous frappe de plein fouet.

Mon cerveau se fait serrer comme une botte de ski. Mes jointures enflent.

J’ai l’impression d’être Arnold dans "Total Recall".



On a droit à des paysages hallucinants comme consolation à nos migraines.

Je serre mon bâton de marche à chaque tournant au cas où je tomberais face à face avec l’abominable homme des neiges. Et Oui! On est en plein territoire du Yeti.

Je suis dans "Tintin au Tibet".



On arrive enfin à Dzongri (ou "D’zone grise", mi- terre/mi- ciel). On est ici perché à 4030 mètres d’altitude.

Le soleil nous brûle la peau du visage, et le vent nous gèle le cul.

Mais quel Paysage!

On est encerclé de montagnes enneigées. Partout.

Et juste devant nous se trouve le Mont Kanchendzonga, auréolé d’un nuage.

C’est le troisième sommet le plus élevé au monde.



Je vous jure, je me sens haut.

On a monté de 1000 mètres en une seule journée.

Mon corps me le fait grandement sentir qu’on a monté trop rapidement aujourd’hui.



Alors qu’on prend place dans nos sacs-de-couchage au creux d’un abri de bois, je me mets à trembler comme une feuille au milieu d’une tornade. Impossible de m’arrêter. J’ai un froid soudain qui me fait grelotter comme jamais. Court-circuit dans mes nerfs.

Mais que m’arrive-t-il?

J’enfile tout mon linge, je m’enroule de toutes les couvertures qui traînent aux alentours…. mais rien n’y fait. Mon corps ne cesse de trembler comme si la montagne m’avait transmis le Parkinson.



Marilou s’inquiète. Mon guide s’inquiète. Et je m’inquiète.

‘’Tomorrow morning go down’’ que me dit le guide.

Je suis bien d’accord. Mais qu’est-ce que je fais jusque-là? Je me remémore ma vie?



J’essaie de manger le popcorn que le guide nous a préparé. Tout grelotte encore en moi. Je n’arrive pratiquement pas à viser ma bouche avec le maïs éclaté.

Et c’est encore plus difficile avec la tasse de thé….

Bordel. Je me sens comme TRÈS loin pour me taper une pneumonie.



J’essaie de dormir mais mon corps m’en empêche. Je fais une fièvre intense.



Il est minuit.

Je sens soudainement mon estomac se remplir comme si c’était une gourde qu’on avait accroché à un robinet ouvert au maximum. J’entends même le glougloutement à travers ma bedaine.

Mais qu’est-ce que c’est que ce truc, bordel? Suis-je possédé? Y-a-t-il un Alien qui va me perforer le nombril?

Je me lève donc, toujours aussi tremblotant, et j’accroche ma lampe frontale.

C’est que j’ai une envie urgente de me vider.

Maintenant.



Il fait nuit noire. Le ciel est tapissé d’étoiles comme nulle part ailleurs.

Et moi, je titube dans la froideur de la neige pour atteindre rapidos la bécosse qui semble plutôt éloigné du campement.



Je me vide.

Carmin ou noir mélasse.

Bile ou sang.

J’arrive difficilement à constater l’ampleur des dégâts.

Je suis plutôt confus par la fièvre et j’arrive plus ou moins à garder mon équilibre.

Je remarque que très peu la grandiloquence de la voie lactée alors que je retourne au creux de ma couchette.



Ouf.



Je suis vraiment inquiet. J’ai l’impression que mon corps tente de se purifier d’un quelconque empoisonnement.

Serait-ce à cause de ma dose d’Apo-méfloquine ingérée en matinée?

Peut-être est-ce le résultat du venin de l’altitude?



Qui sait….



Bref, je passerai cette horrible nuit à penser à ma famille et à mes amis…

…tout en faisant l’aller-retour sac-de-couchage / bécosse aux quinze minutes.





20 mars:

J’ouvre les yeux (au sens propre).

Ouf.

Je n’ai pas fermé l’œil de la nuit (au sens figuré).



Et quelle frousse j’ai eu.



Bon. Ça va un peu mieux ce matin. Mais évidemment, les plans ont changés. On devait rester une journée de plus à Dzongri, mais la haute altitude m’a clairement un peu trop affecté (ou infecté). On va donc redescendre à Tsokha aujourd’hui, à 1000 mètres plus bas.

J’ai l’impression d’être sur un Lendemain de Veille Sidéral, un Hangover de Pirate. C’est intolérable.





Maintenant à Tsokha, je gobe deux ibuprofènes, et tout rentre dans l’ordre.

Je suis heureux.

Vraiment.

Je suis toujours en vie.





21 mars:

3H00AM.

J’ouvre les yeux et je me rends en silence aux bécosses à l’extérieur de notre cabane de bois. Mon estomac s’est réajusté. Retour à la normal. Soulagement.

Il fait froid dehors, et il y a une petite pluie fine qui tombe sur les tentes installées sur un plateau derrière notre abri. Une vache rôde dans la nuit. Elle broute autour des maisons en toile. Deding! Dedong! résonne la cloche dans son cou.

Le campement est en plein vert pâturage.



Toujours somnolent, je retourne à la cabane... dans ma chambre... à mon lit… au fond de mon sleeping bag.

Il me reste encore quelques heures à dormir.



Au loin, derrière les murs, j’entends les Deding! Dedong! que fait la vache.



Tout près de ma tête de lit, Kwiik! Kwiik! fait une souris. Je l’entends qui marche sur le rebord de la fenêtre. Elle n’est aucunement effrayée. Elle ne doit pas sentir notre odeur humaine. C’est bien normal, ça fait six jours qu’on ne s’est pas réellement lavé. Quelques semaines encore ici et on ressemblerait aux gipsies du Kashmir.



Je me réveille, pour de bon cette fois.

On retourne à Yoksum aujourd’hui. C’est un seize kilomètres de marche en forêt qui nous ramènera au point de départ.



Enfin, on retrouve l’auberge qui nous avait accueillis à notre arrivée à Yoksum.

Enfin aussi, j’ai le droit à une douche bouillante.

Enfin.

Fini de boire de la neige fondue.



Et merci encore Himalaya de m’avoir épargné.



22 mars:

Il est 6H30 Am alors qu’on prend place dans une jeep pour retourner à Gangtok.

Le véhicule est bien plein de passagers, et j’ai le ventre vide.

Je suis fatigué, mon linge est crotté et je suis vraiment mêlé.



On arrive à destination, et sans plus attendre, on se rend à notre hôtel pour s’écraser dans l’humidité de nos couvertures.

Enfin, je vais pouvoir manger de la viande ce soir. Ça fait une semaine que je trouve mes protéines que dans les foutus œufs, pauvre carnivore que je suis.

Je comprends maintenant pourquoi la grippe aviaire était une réelle tragédie en Orient. Non mais, on mange ici l’équivalent d’un œuf à chaque repas!



23 mars :

J’ouvre la lumière de la salle de toilette et je me vois dans le miroir.

Mon visage est comme une tomate sorti de l’eau bouillante: ma peau décolle. Ça, c’est encore la faute à l’altitude.

J’espère juste que ce n’est pas une mutation permanente dû au trop fort rayonnement du soleil himalayen.



J’espère aussi que je n’aurai pas d’écailles qui apparaîtront sous ma peau faciale comme dans la série « V »… bon, j’imagine que ça, je vais le constater au rasage.



Aujourd’hui est une journée relax à arpenter la rue principale de Gangtok. Je crois qu’on l’a bien mérité celle-là.



Il y aura beaucoup de route à faire demain.

Ouaip, car demain, ce sera au tour du Népal de nous recevoir.



Etienne X en altitude


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