Mardi mercredi jeudi…


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Senegal's flag
Africa » Senegal » Cape Verde Peninsula » Dakar
October 13th 2016
Published: October 14th 2016
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Votre serviteur sur son poste de travail
Mardi après-midi a été marquée par mon entretien avec M. le Directeur et une journée au bureau assez longue : de 8h à 19h30.

Mon entretien s’est vraiment bien passé. Cet ancien colonel des forces spéciales parachutistes, un homme brillant et fort, laisse cependant transparaître beaucoup de sollicitude et un vrai paternalisme. Mon passé au Prytanée Militaire m’aide à comprendre le personnage. Il veut que je sois son bras droit, un bras droit parmi les autres, cependant le seul qui puisse vraiment le rejoindre en esprit dans ce lieu où nous restons étrangers. Il me fait l’honneur de sa confiance, une confiance presque au-dessus de mes compétences j’en ai peur. Cependant je n’ai que des opportunités ici et des soutiens partout. L’homme de bonne volonté a déjà les bonnes armes pour réussir, je veux en faire partie.

Nous sortons le soir, rejoindre Emeraude qui occupait le même poste que le mien pendant un an. Elle a cependant une expérience de trois ans au Sénégal. Elle est mordue par le pays même si elle souhaite passer plus de temps en France. Ce soir-là c’est la Flag que j’ai pu déguster, un peu plus forte que la Gazelle. C’est la «
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CHOM : à l'étage l’hôtellerie, dont ma chambre à l'extrême droite, au RDC : cuisine, salle à manger, salle de formation
bière africaine de luxe », telle qu’elle se décrit. Vous la boirez dans un pub à Dakar pour 1.5 euros. Ce prix-là équivaut à 1000 Francs CFA. Avec 1000 Fr on fait de nombreuses choses à Dakar. On s’achète un bidon de 10L d’eau minérale, la Kirène locale (l’eau Evian est 6 fois plus cher). C’est indispensable pour nos pauvres et propres petits bidons français. Je me demande comment font pour supporter nos sénégalais cette eau du robinet javellisée, enrichie de pesticides et de minerais industriels et à l’odeur vaseuse. Avec 1000 Fr on peut faire 10 à 15 min de taxi, quand cela est bien négocié par le toubab. Avec 1000 Fr on peut aussi aller chez le coiffeur pour la dernière coupe football du coin.

Nous rentrons de ce verre avec la charmante Emeraude et sa petite chienne de deux mois. Je suis fatigué, il n’est pourtant que 23h. En chemin les premiers musulmans sortent un peu de chez eux. Ce soir c'est la Tabaski, le nouvel an musulman. C’est une sorte de carnaval puisqu’ici les enfants se déguisent en vieillard et même le comble : les hommes en femmes et vice-versa. Ma connaissance de l’africain étant
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Parking et chambres septiques derrières
assez faible rend l’expérience troublante, le sénégalais voilé et rasé ressemble étrangement à quelques belles sénégalaises que j’ai pu déjà rencontrer à l’hôpital. Le taxi arrive vite, ils ont une capacité incroyable à repérer le toubab de loin, foncer sur lui et klaxonner pour nous offrir ses services. Nous rentrons sains et saufs, alors que le moteur cale dès le moindre dos d’âne. Rouler en taxi à Dakar est vraiment une expérience cocasse dont je ne me lasse pas encore. Ils se ressemblent tous de l’extérieur mais à l’intérieur pas un n’est similaire tant le piteux état du véhicule laisse place à une multitude de contingence. Puis il y a les scooters que nous croisons, ceux qui aiment flirter avec le capot des voitures, ceux qui ne portent pas le casque, ceux qui promènent les couples et les filles se mettent parfois dans leur plus belle robe pour ce destrier. Il y a enfin cette multitude de variété de bus, des colorés surbondés, des crasseux et « rouilleux » qui manquent de s’écrouler au moindre accrochage. Tout a finalement tellement de goût et d’odeur… Qu’ils soient bons ou mauvais, cela fait du bien de sortir un peu de nos sens
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Vue depuis le couloir extérieur devant ma chambre, la chapelle sur la gauche
aseptisés. On se rend compte que chaque chose a une vie ici, et qu’elle est exploitée jusqu’à son extinction.

Nous rentrons dans l’hôpital. Pour situer le CHOM il faut se représenter l’entrée de l’hôpital Fann comme celle d’un immense complexe où se trouvent une université, plusieurs hôpitaux ou centres de soins, des boutiques et des propriétés closes comme le CHOM. Il y a comme une ville dans une ville. Hier soir Google Map a validé l'ajout que j'ai fait du CHOM sur l'application, vous pourrez voir.

Je suis heureux de pouvoir enfin installer ma moustiquaire. La maille reste tout de même assez large. Si bien qu’au réveil je trouve le gentil moustique au-dedans. Je l’éclate, pas de sang, pas de palud alors pour le moment, je l’espère. Depuis que je suis arrivé nous avons eu trois cas de paludisme à l’hôpital dont deux parmi le personnel. Les moustiques se promenant de chambre en chambre je tente de faire de la mienne un vrai bunker.

Mercredi matin est marqué par une jolie grasse matinée. Même si j’ai été réveillé plusieurs fois, j’émerge finalement de mon lit à 10h30. Une nouvelle coupe de cheveux perso, une autre taille de
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Dans le fond le batiment de direction
barbe, une douce toilette et me voilà sorti de la chambre à 12h. Nous pourrons aller à la plage de façon fringante. Des sardines à l’huile et une baguette de pain rassie feront notre repas. L’après-midi est marquée par des discussions sur des nattes en plastique, sous un parasol miteux mais indispensable. Nous faisons nos touristes de base à être sur la plus belle plage de Dakar pendant que mes chers lépreux sont en train de souffrir dans le chaud de leur chambre d’hôpital. Nous jouons sur une banane en plastique récupérée par une ancienne volontaire dans le commerce équitable. Nous échangeons des parties de beach ball, nous nous baignons dans cette eau pas moins chaude que son soleil, et assez salée. Quelques vagues, quelques paroles échangées avec les tenants sénégalais de la plage, et nous repartons en taxi. Le gardien de l’hôpital Fann salue le « docteur Chom », en réalité c'est Benoit le stagiaire ingénieur depuis deux mois au CHOM. Une douche, une sortie dans un restaurant occidental où je mange un panini trois fromages raté mais présenté comme une assiette top-chef. Nous revenons pour nous coucher en complétant notre stock de flotte minérale : 10L dans chaque main. Tout un exercice pour les cinq bonnes minutes de marche qui nous sépare depuis nos chambres.

J’ai osé faire la comparaison de mes lépreux et de mes instants de plage. Je lisais justement « Etoile au grand large » de Guy de Larigaudie sur la dite place. Il écrivait : « En fauchant à coups de cravache la tête des carottes sauvages, en mâchonnant un brin d'herbe, en se rasant le matin, on peut répéter à Dieu, sans se lasser, tout simplement, qu'on l'aime et cela vaut bien autant que les torrents de larmes jamais versées des livres de piété. Se conter à soi-même, en chantant, toute sa vie passée et les rêves que l'on forme pour les jours à venir, et parler ainsi à son Dieu en chantant. Et lui parler encore en dansant de joie au soleil, sur la plage, ou en glissant à skis sur la neige. Avoir toujours près de soi Dieu, comme un compagnon à qui l'on se confie. »

J’aide mon prochain parce que je vois le bon Dieu dans la détresse de la maladie et de la pauvreté, où l’homme s’abaisse pour mieux accueillir le divin. Si je ne voyais
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Pimprenelle et Jacky dans le taxi
pas l’action divine dans mes gestes de charité, ils ne seraient pas durables, sincères et profonds, il y resterait une part de moi-même. Je suis allé sur cette plage alors que d’autres souffraient. J’espère avoir accompagné mes "amis" tout autant que mes patients en réalité, et les bonnes actions pour les uns ne peuvent me faire oublier les bonnes actions pour les autres : avoir toujours près de soi le bon Dieu…

La réalité du reste le lendemain est tout autre. Elle commence par une matinée consacrée à la visite du personnel et des patients, en accompagnant le directeur. Nous sommes tous les deux accompagnés de ci et là par certains responsables de services. Je suis à l’écoute attentive, prends des notes. Des axes d’améliorations, des soucis encore bénins aujourd’hui mais inévitables demain. Une femme en niqab qui refuse de se faire soigner parce que son mari n’est pas encore passé ce matin pour lui donner la permission de guérir…

Il y a cet enfant de 8 ans, ici depuis un mois, atteints par la lèpre il se déplace en béquille et tente d’apprendre le français. Il y a encore Ali, on lui a retiré une jambe. A
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bus typique
17 ans sa vie semble brisée. Et comme cela ne suffirait pas, depuis une semaine il souffre d’une violente crise de palud. Mardi il était immobile, mort, aujourd’hui il peut tout de même se retourner sur son lit.

Chacun des membres du personnel mériterait aussi un portrait, je le ferai je l’espère d’ici mon année. J’ai tellement de chose à dire de profonde en fait que je m’évade dans les récits plus artificiels comme un succès damné. Ce n’est pas grave, tout est bien et je vous aime.


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aperçu du monument à la gloire de la renaissance africaine
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Arrivée à la place des Mamelles
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petite plage des Mamelles
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coucher de soleil


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