Manila, Philippines (Far East ou la Scam City)


Advertisement
Philippines' flag
Asia » Philippines » Metromanila » Makati
March 31st 2017
Published: April 2nd 2017
Edit Blog Post

31 mars



Manila: Scam City.

Voilà le titre du paragraphe qui m'a sauté aux yeux en feuilletant mon guide de voyage.

Manille, ville d'arnaques.

C'est ainsi que j'atterit aux Philippines: avec appréhension.



Je n'ai pas même sorti de l'aéroport Ninoy Aquino qu'on m'averti déjà: "Keep your bag in front of you".

C'est le douanier qui me donna ce conseil.

"And which taxi should i take if i don't want to pay too much?" que j'ose demander au bon officier.

"I can't tell you" qu'il me répond alors en me pointant le brillant soleil à l'exterieur des portes vitrées de l'aéroport.

C'était une invitation à me lancer dans la cohue des chauffeurs de taxi ça.

J'acquiesce donc et apparaît aussitôt sur le quai ensoleillé, confus par mes 25 heures d'avion et mes 2 assommantes escales.



À droite de la porte vitrée, des chauffeurs accoudés à leurs taxis se frottent les mains en reniflant une belle occasion de surcharge...

tandis qu'un peu plus loin à gauche, un kiosque en retrait propose le service d'un "Grab Car" au prix fixé d'avance (un genre de Uber).

Voilà donc mon alternative espérée.



Le temps de réserver mon lift... et me voilà qui me dépose le voyageur dans une Toyota rouge flambant neuve.

Au volant, un joyeux philippin un peu boulotte replace un crucifix après son rétroviseur.

C'est ainsi que je quitte l'aéroport de Manille.

Simplement.



La Toyota accélère et s'éloigne de la cohue... alors que je me retourne et regarde par la vitre de derrière.

Sur le quai, un jeune couple de voyageurs vient d'être piégé par les loups chauffeurs de taxi de Manille.



...



Dans la Toyota rouge, une balade de Def Leppard joue à la radio.

Je ne pourrai pas vous dire laquelle: je ne suis pas un fan de Def Leppard.

Mais ça me fait sourire.



Il est 10h00 et un magnifique 30 degré brille sur Manille.

L'Asie du sud-est me revient en tête: Bangkok, et Kuala Lumpur un peu aussi.



Peu de temps s'écoule avant que mon "Grab Car" s'enlise dans un lourd trafic.

L'autoroute se bouche d'un seul coup.

Des voitures japonnaises impeccables et aucunement cabossées se coincent.

Les machines se frôlent, s'évitent et se frayent un chemin dans le puzzle urbain.

Des vendeurs itinérants soudainement apparaissent entre les voitures.

Ils essayent de vendre leur lot d'arachides à la poignée.





Le trafic est constant jusqu'à mon auberge, mais j'y arrive sain et sauf,

et bien en avance sur mon check-in de 14h00 aussi.

Je dépose donc mon pactole à la réception et en profite pour faire un petit tour du quartier Makati,

mains dans les poches et décidément sur mes gardes.

La mauvaise réputation de Manille à réussit à m'inquiéter on dirait.



Les routes sont serrées et les trottoirs à moitié absents se perdent un peu dans la ville.

Partout autour, les voitures demeurent la première préoccupation pour les piétons.

Des policiers avec de larges gants de jardinier remplacent difficilement les lumières aux carrefours.

Les automobilistes les écoute à peine.

Les temps sont durs pour les agents de circulation de Manille.



J'entre au hasard dans un petit resto de nouilles et me fait accueillir par un portier armé jusqu'aux dents.

À Scam City, les agents de sécurité pullulent.

Chaque restaurant et chaque commerce sont défendus par des gardiens armés qui desserrent les doigts de leur pistolet que pour ouvrir la porte aux clients.

Il y a de quoi se sentir en sécurité que je devrais me dire, non?

Avec toutes ces armes en circulation dans la ville....



Note à Moi-Même:

1- Je ne me suis jamais senti aussi en sécurité dans un restaurant Subway.



2- Population de Montréal: 1.75 millions d'habitants

Population de Manille: 12.8 millions d'habitants



3- J'ai mangé dans un restaurant coréen à Manille.

Je n'ai rien compris, ni de la bouffe, ni du protocole.





1 Avril

"Jesus, Mary, and Joseph, I love you very much.

I beg you to spare the life of the unborn baby

that i have spiritually adopted who is in danger of abortion"

Prayer of Our Lady of Guadalupe, Intercessor of the Unborn





Remis de mon décalage horaire, je me sens beaucoup plus d'aplomb à découvrir Manille ce matin.

Je me sens moins nerveux, maintenant que j'ai dormi une vraie nuit dans le dortoir climatisé du Z Hostel.



Avant de commencer toute chose, je vais m'enfiler un bien doux latté à la pâtisserie catholique du coin.

Il est bien charmant à première vue ce café "Mary Grace"... mais à un un certain moment,

lorsque vous vous mettez à bien observer,

vous réalisez qu'autour de vous, tout est militant Pro-Vie.

La tapisserie, les cadres, les colombes métalliques qui battent des ailes au plafond,

les messages subliminaux laissés sous le verre des tables: Pro-Vie.

Mary Grace a une obsession: à coups de cafés, elle s'oppose farouchement à l'avortement.



Trois femmes en robes fleurit entrent dans la pâtisserie: militantes Pro-Vie.

C'est leur quartier général ici.

Vous savez les femmes en première ligne au défilé du pape,

et bien elles boivent leur café ici-même, chez Mary Grace, assise à la table à côté de la mienne.



Les Philippines sont encore solidement ancrées dans la religion catholique on dirait.

Je doute fort que ce soit la dernière étrangeté catho que je découvre chez les Pinoy.

...



Mon Uber de ce matin me débarque au parc central de la ville.

Pour ce faire, on a dû traverser une partie de Manille où l'extrême pauvreté déchire le paysage urbain.

Les corridors étroits par lesquelles on a dû passer grouillaient de vermines et de sombre misère humaine.

Des vidangeurs improvisés y éventraient des sacs poubelles au fond des ruelles pour se nourrir.

Aussi, dans les racoins, des familles entières, incluant leurs très jeunes enfants étendus comme des cadavres,

comataient sur le restant de boîtes de carton crasseuses.

C'est à fendre le coeur.

Je les ai vu à maintes reprises ces tableaux de la misère humaine.

La vraie misère humaine je veux dire.

Mais on ne s'habitue jamais.



J'ai dû contourner quelques épaves disloquées dans le quartier de mon auberge hier.

Je ne pensais pas en parler, mais voilà qu'avec la randonnée dans les bas fonds de ce matin,

je ne fait que réaliser à quel point les quartiers touristiques ne sont aucunement représentatifs

de la réalité accablante des quartiers populaires de la Cité.



Scam City pas pour rien la Manille.

...



Le Rizal Park me permet certes de me dégourdir les jambes, mais encore une fois, il est difficile de fermer les yeux sur l'itinérance gangrenée à l'ombre des arbres du parc. Certains zombies vous suivent du regard, trop K.O. par la vie pour trouver la moindre force de lever la main pour quémander.



Un tit cul salit par de la cendre marche pieds nus le long d'une clôture délimitant la rue d'un terrain de golf un peu trop verdoyant pour une température si chaude.

"Birdy" que lance le golfeur

alors que le gamin affamé plis le coude et bois l'huile grisâtre laissée au fond d'une boîte-de-conserve vide trouvée dans un vieux sac poubelle.



À ce moment même, la pâtisserie catho où j'ai bu mon latté ce matin me revient en tête.

Pro-Vie que ça disait.

Ouais. Mais Pro-Vie à quel prix Mary Grace?





Un peu plus loin du Rizal Park se trouve l'intramuros, une forteresse qui a su traverser l'histoire, les tremblements de terre et les nombreuses guerres qui ont frappée Manille.

Des ramparts et des cathédrales.

Et des promenades en calèches aussi.

Ici, le nombre de policiers armés est décuplé.



Intramuros est sans conteste l'endroit le plus visité par les touristes à Manille.

Je sors enfin ma Nikon, et passerai ma journée ici même,

derrière les murs de la forteresse au coeur de l'imprenable capitale



...






Une Histoire sans Happy Ending




Le soleil se couche sur Scam City.

Ça grouille dans les rues du quartier entourant mon auberge.

On est samedi et les jeunes backpackers sortent en grappe pour une autre soûlerie aux alentours du quartier chaud de P. Burgos.

Pour ma part, je suis plutôt amortit par ma journée de découvertes mais je m'était promis de ne pas quitter Manille sans avoir assisté à cet étrange spectacle qui attira mon oeil hier soir.

C'est que sur le mur d'un bar louche à quelques coins de rues du Z Hostel, un panneau annonce Saturday Night. Midget Wrestling.

Oui oui, vous avez bien lu: Midget Wrestling.



Je me retrouve donc là, debout devant le bloc de béton sans fenêtre qui sert d'endroit pour le spectacle promis sur sa devanture.

Il est 21h45.

Un agent armé m'ouvre la porte:

j'imagine qu'il est là pour ne pas les laisser partir, les nains.



J'entre dans un bar cubique un peu glauque et me retrouve d'un coup devant un ring gonflable aux couleurs des USA, illuminé par des lumières et des néons aveuglants.

Je fige.

Décidément, ce n'est pas l'éclairage qui m'aveugle le plus en arrivant dans le bar...

mais l'accueil de ces huit bikinis hyperactives.



"Hello Sire"

"Where you from Sire?"

"Come sit Sire, come sit".



On m'agrippe par le bras.

La plus costaude des bikinis me tire vers une banquette devant le ring.



"No no. Just want a beer and see midget wrestling" que je lance à l'attroupement de mouettes...

alors que je me sens comme une patate-frite qu'on vient d'échapper par terre.



Je m'écrase au creux d'un divan mou alors que les bikinis m'encerclent.

"What's your name?" qu'une mouette me demande au travers de sa blonde tignasse coupée à la Ziggy Stardust.

"Etienne"

"Itchen" répète-t-elle en me tâtant la cuisse.

"No no. Only drink" que j'essaye de leur faire comprendre.

"My favorite number is 69" qu'on me dit (Oh God).

"You want to wrestle with me in the back?" que me demande une femme plutôt âgée, aux traits de visage beaucoup trop masculins pour la lourdeur que semble avoir sa poitrine.

"No. No thank you madame. Eee. You. No thank you, you".

Les mouettes s'esclaffent alors.

"You married?"

"Oh yes. Sooo yes" (quel moment parfait pour m'inventer une femme ça. Comme Salma Hayek par exemple).

"It's ok. She'll never know" que me dit la costaude en me frôlant l'interrupteur (Ohhh Secours).



On m'amène une bière San Miguel légère en me pointant un carnet avec le numéro de ma table.

Open Bill.

Ah voilà! Je sais tellement où ça s'enligne cette entourloupette à la thaïlandaise.

Je vais devoir la jouer à la dure (ne pas voir de jeu de mots ici).



Enfin, des nains apparaissent sur le ring,

des nains en couches et en bedaines.



Un téléviseur sur le mur joue des reprises de matchs de boxe de Manny Pacquiao

alors qu'Atchoum verse une pleine bouteille d'huile pour bébé sur le matelas gonflé dans l'arène.

"You can see the midget?" que me demande la costaude qui semble être devenue la porte-parole des bikinis.

"Yes yes" (suis-je vraiment entrain de vivre ça?)



Ding! Ding!

Son de cloche,

et voilà que quatre quart-d'hommes se mettent à faire un Royal Rumble sur l'arène huilée.

Simplet fait un vol plané et atterrit sur le Schtroumpf bricoleur.



"You buy drink for ladies?" que me demande la serveuse en ouvrant l'addition qui cherche à s'additionner davantage.

Les trois mouettes qui sont restées perchées à ma branche me regarde alors en attendant une réponse.

(Heureusement, un groupe de néo-zélandais intoxiqués et en rut est arrivé juste à temps pour le match de lutte

et ainsi, a attiré le reste des bikinis vers lui).

"No. I finish the beer and go"

"You give me tip?" que me demande Ziggy Stardust.

"No. Sorry."



Je me lance dans d'inutiles explications avec les mouettes... alors qu'on me tape la cuisse sous la table.

Surprise, les lutins huileux du ring sont là, tout sourire devant moi.

"You give tip for wrestlers?" que me demande Atchoum.

"Yes yes" (voilà quelques dollars pour soulager ma conscience).



Sans attendre la suite, je me lève enfin, paye ma bière que j'ai nerveusement calé, et quitte Pronto le bloc de béton louche en soufflant.

Dans ma poche, mon argent est toujours là.

Heureusement.

C'est que Ziggy Stardust semblait chercher autre chose que de me transmettre une syphilis.

...



Scam City.

Avec tout ces agents armés, ces tavernes louches, ces putes bas de gamme, ces arnaqueurs et parfois aussi, ces calèches sur les autoroutes,

Manille à quelque chose du Far West.

Quelque chose du Far East plutôt.

Oui.

Manille, c'est le Far East.



Etienne X



Note à Moi-Même:

Ne jamais accepter de massage du vieux pas propre

qui se promène avec son carton écrit dessus au crayon feutre: "Massage - Reflexology".

Advertisement



4th April 2017

Voyage
Tu as également une belle plume (d ecriture)
6th April 2017

Voyage
Très belles photos et tu serais bon pour travailler au poste evasion. En plus des photos ton écriture est belles ,comique et interressante. Mais je ne me vois pas seul ou tu es en fauteuil roulant ou béquille ahahah

Tot: 0.111s; Tpl: 0.016s; cc: 18; qc: 27; dbt: 0.0605s; 1; m:domysql w:travelblog (10.17.0.13); sld: 1; ; mem: 1.2mb