Nouvelle-Zélande : Retour sur les hauteurs


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Oceania » New Zealand » South Island » Fox Glacier
February 21st 2010
Published: March 3rd 2010
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Quittant Fiordland, ma route s'oriente au nord, une direction que je ne lâcherai plus pour un moment. Mes prochaines destinations ont pour noms Queenstown, Wanaka et Fox Glacier et vont m'emmener à nouveau au cœur des Southern Alps. La montagne me plaît toujours autant, à croire que les paysages si terriblement magnifiques de Milford Sound ne sont en définitive pas parvenu à me blaser. Il faut tout de même ajouter que cette étape alpestre a aussi été le théâtre d'une chasse frénétique aux lieux de tournage du Seigneur des Anneaux ; de quoi combler mes aspirations et faire passer en un éclair une nouvelle semaine sous le soleil de Nouvelle-Zélande. Voyons cela de plus près.

L'appel de la montagne

Un lac, des montagnes, des rivières, des canyons, des forêts et au milieu de tout ça : Queenstown. La Mecque des destinations touristiques néo-zélandaises orientées jeune, sport et adrénaline offre un choix sans fin d'activités, moyennant un peu de cash et beaucoup de cran ; certains diront l'inverse. Ici, tout ou presque est possible : sauter d'un pont les pieds attachés à un élastique, jouer les Clint à bord d'un avion de chasse, remonter des rapides sur un jet-boat virevoltant ou sauter d'un avion attaché a un parfait inconnu. Soucieux de préserver la longévité de mon cœur et de celui de mon banquier (!), je n'ai fait qu'un arrêt très rapide à Queenstown. La ville n'est pas désagréable, du moment que l'on se met dans l'ambiance "station de ski", bordée de boutiques à touristes et bondée de teenagers bourrés. Non, soyons juste, Queenstown vaut certainement mieux que ça, mais mon inclinaison à la tranquillité m'a fait parcourir quelques km de plus le long du lac Wakatipu, jusqu'au hameau relax de Glenorchy. Point de départ de fabuleuses randonnées sur plusieurs jours, le coin voit débarquer presque exclusivement des marcheurs se préparant à gagner les hauteurs ou en revenant. Certains treks sont si populaires qu'il faut s'y prendre des semaines, voire des mois, à l'avance pour se réserver un lit en cabane.

Mais parmi tous ces fanatiques de nuits au milieu des ronflements sonores et des odeurs de godasses, il y en avait trois qui étaient différents. Ils ne dénigraient certes pas l'effort d'une petite marche offrant la récompense d'époustouflants points de vue, mais ils étaient là pour autre chose, leur volonté toute entière concentrée sur cette chose qui leur était si importante, si... préssscieuse. Et ces trois-là ont fini par se rencontrer non loin d'Isengard et, au solstice d'hiver, ils ont franchi la rivière Isen sous l'apparence d'un marin californien, d'une violoniste berlinoise et d'un blondin valaisan. Alliant leurs connaissances dans l'accomplissement de leur obsession commune, ils se mirent en quatre pour retrouver les lieux qui, voici plus de dix ans, ont servi au tournage du Seigneur des Anneaux.

Avant d'entrer dans le détail de cette quête, évoquons d'abord cette journée sublime passée sur la montagne. Huit heures de marche le long d'anciens sentiers parfois encore à peine visibles, utilisés autrefois par les mineurs et leurs carrioles, traversant des rivières dépourvues de pont et descendant (ou grimpant !) des raidillons vertigineux, jusque sur le Mt McIntosh, d'où la vue sur le lac Wakatipu et les reliefs environnants fait oublier tous les efforts consentis. Quant à la descente, elle fut épique, le "chemin" consistant à suivre une clôture droit en bas un pré, en évitant de se ramasser sur les rochers saillants. Je souris encore en pensant au gars de l'info center à Glenorchy : " Non, non, il n'y a absolument rien de difficile dans cette marche", avait-il répondu à notre Berlinoise pour qui c'était la première randonnée.

Chasseurs de sites

La fameuse quête évoquée plus haut a donc débuté à Glenorchy. Cette région, ainsi que celles de Queenstown et de Wanaka, toutes proches, regroupent la plus forte densité de sites de tournage de tout le pays. Notre triade germano-helvetico-californienne, deux exemplaires du "Lord of the Rings locations guide book" de Ian Brodie en poche, s'est donc embarquée à bord de l'USS Enterprise (merci Traz pour la référence !), dont je suis le navigateur. Notre première étape n'est rien moins que le paradis : Paradise, un lieu-dit, même pas une localité, qui n'a pas volé son nom. Parfaitement idyllique, avec ses verts pâturages, ses denses forêts et ses montagnes parant l'horizon de tous côtés. Nos deux premiers sites sont forestiers, puisqu'il s'agit des bois de la Lorien et de Hamon Hen, là où Boromir finit percé de multiples traits et où Pippin et Merry se font capturés par un groupe d'Uruk-hai à la botte de Saroumane. Hu hu... bon. Bin ouais, une forêt reste une forêt et bien que les lieux paraissent incontestablement familiers, il est difficile de reconnaitre précisément l'endroit ou tout arriva. Une jeep safari avec une plaque taguée "ORCS" fait des aller-retour dans le coin, preuve indéniable que nous sommes sur la bonne piste. Mais pour les certitudes, il nous faudrait faire tourner le film en live au milieu des bois. J'ai bien le portable sous la main, mais il nous manque les DVD ! On s'est donc bien baladés dans les bois et on dira qu'il y a de fortes chances pour que nous ayons traversé les lieux du tournage. Il est en revanche certain que nous avons mis les pieds en Isengard, un peu plus loin sur la route qui, de Glenorchy, mène vers le départ du mythique Routeburn Trek. Même s'il n'y a pas la moindre trace de tour ou de bruits de forge gobeline, évidemment numérisés par ordinateur, le relief des montagnes alentours ne trompe pas l'œil du spécialiste.

Entre Glenorchy et Queenstown, les rives du lac Wakatipu ont servi de décors pour Ithilien, où Sam voit son premier oliphant et où Faramir entre scène. Au nord de Queenstown, Arrowtown et son unique rue sortie tout droit d'un western dispose de deux sites de tournage. Le premier est le Gué de Bruinen, où Arwen catapulte des trombes d'eau en furie sur les Nazghuls. Le second, également en bord de rivière, est le bois où Isildur trouve sa fin, trahi par l'Anneau Unique qui finit sa course dans la flotte pour un moment, en attendant de prendre au piège ce bon vieux Sméagol. Plus impressionnant et reconnaissable, les gorges de la rivière Kawarau ont servi à filmer le fleuve Anduin, ainsi que l'Argonath et ses gigantesques statues de rois. Évidemment, ne vous attendez pas à voir les ouvrages en question. Par contre, si un saut dans les eaux bleues du fleuve vous tente, il est ici possible de se jeter d'un pont surplombant la rivière, les pieds solidement attachés à un élastique bien sûr. Pour ma part, j'ai préféré aller déguster quelques crus du domaine sis juste au dessus des gorges. La route menant à la cave suffit à donner le tournis avant même d'avoir porter les lèvres au premier verre de vin, raison pour laquelle je n'ai pas eu de mal à me modérer.

Plus loin, sur la route de Wanaka, l'on trouve la forêt de pins où Arwen cravache à brides abattues en direction de Fondcombe, les cavaliers noirs sur ses jolis talons d'elfe. Enfin, les paysages de collines au sud de Fondcombe, où la communauté fait ses premiers pas en quittant la demeure d'Elrond, ont été filmés non loin des rives du lac Wanaka, sur la route du Mt Aspiring National Park.

Voilà une bonne volée de sites en image, mais la quête est loin d'être finie et devrait se poursuivre, certes moins intensément je présume, tout au long de mon séjour néo-zélandais.

Appaloosa

Entre Queenstown et Wanaka, les lacets de la route panoramique se succèdent à un rythme valaisan et finissent par mener à la vallée de Cardrona. C'est à travers ces collines herbeuses brûlées par le soleil que je suis allé débusquer le lièvre et l'Uruk-hai, monté sur mon fier destrier Appaloosa. Ces chevaux robustes, longtemps utilisés par les mineurs et les chercheurs d'or, sont plutôt dociles et bonne pâte. Pas toujours simple cependant de tenir la bête quelques instants et garder ses distances, alors que les autres partent au triple galop. J'ai du perdre en pratique depuis la Mongolie, car ce jour-là, je n'ai jamais été en mesure de suivre le rythme du canasson, que ce soit au trot ou au galop. Grace à Dieu, je ne m'étais embarqué que pour deux heures dans cette expédition équestre, ce qui fait que j'étais toujours capable de m'asseoir à la fin de l'exercice.

Il n'y a pas grand chose à Cardrona. Si l'on n'y vient pas pour faire de l'équitation, on s'y rend pour son hôtel-restaurant réputé dans toute la région ; un lieu historique délicieux dont l'intérieur sombre, la dominance de bois et le grand âtre ne sont pas sans rappeler l'Auberge du Poney Fringuant. Je me suis cependant abstenu de demander après Gandalf et n'ai pas vu de rôdeur encapuchonné fumant la pipe dans un coin. L'endroit dispose en outre d'un charmant et vaste jardin intérieur ou des tables sont disposées à bonne distance les unes des autres, lieu idéal pour manger une morce après une rude journée de cheval.

Holiday on ice

Mon dernier arrêt dans les Alpes se trouve déjà sur la côte ouest, région réputée pour sa végétation luxuriante et ses pluies diluviennes. Avec Franz Joseph (oui, bizarrement c'est le nom d'un village), quelque 25 km au nord, Fox Glacier est une destination de choix pour approcher de près ces géants de glace et s'offrir une ballade guidée les crampons aux pieds. Ok, je sais ! Si c'était pour aller crapahuter sur un glacier, y avait pas besoin d'aller à l'autre bout du monde. J'ai cependant été surpris d'apprendre que la Nouvelle-Zélande à elle-seule compte plus de glaciers que l'Europe entière ; ils sont ici plus de 4'300. Par ailleurs, ma dernière expérience du genre remontant à l'école de recrue, je n'ai pas résisté à l'opportunité de passer une pleine journée sur la glace, en dépit d'une météo que l'on annonçait grise, voire pluvieuse, pour plusieurs jours. Coup de bol, je me réveille le matin du jour J sous un ciel uniformément bleu. Trop heureux pour suggérer à la brigade des narcotiques de faire une descente chez les météorologistes, je file grand train vers le lac Matheson, à une poignée de km, pour quelques photos matinales, à travers des paysages encore parés de brumes. Puis, je regagne Fox Glacier à 9h00 tapantes pour le début de "l'expédition". A mon grand désarroi, les Salomons ne passent pas l'expertise des guides et on me refile une paire de vieilles boots en cuir plus rigides que des souliers de ski. J'ai des doutes, mais ces grolles se révéleront en fait assez confortables. Après avoir également emprunté une paire de gants en laine, j'embarque à bord du vieux bus qui nous emmène au point de départ de notre marche.

Un peu plus d'une heure sur de petits sentiers traversant la "rainforest" et nous voilà au-dessus du glacier. Avec l'Amérique du sud et le Canada, la Nouvelle-Zélande est l'un des rares endroits du globe où l'on trouve des glaciers à si basse altitude (Fox est quasiment au niveau de la mer), coexistant avec la forêt. Un décor entièrement nouveau pour moi : voir cette immense masse de glace au milieu des arbres et des cascades me paraît bien étrange. Le phénomène s'explique notamment par l'abondance de précipitations – sous forme de neige en altitude, à la base du glacier – et l'étroitesse des vallées qui conserve une température relativement fraîche même en été. Arrivés au bord de l'objectif, nous rajoutons une couche de vêtement, ajustons les crampons aux souliers et prenons en main notre bourdon de montagnard, judicieux pour éviter de se prendre une gamelle. Jeff, notre guide, est un vétéran du Népal et de la Cordillère et n'est jamais en reste d'anecdotes sympas sur le mal des montagnes ou les engelures, histoires qui paraissent affreuses mais qu'il conclut toujours en souriant par un "It was awesome !". C'est ce qu'on appelle être passionné. Jeff, donc, prend la tête du groupe et nous lui laissons bien de la place car il a tendance à mouliner du pic à glace pour ouvrir la voie et façonner de petites marches pour faciliter et sécuriser la progression des débutants que nous sommes. Le temps est toujours au beau fixe et nous progressons sur le glacier à un bon rythme. Après avoir cassé la croûte sur la glace, Jeff nous emmène toujours plus haut sur le glacier, jusque sur les premiers pics déchiquetés d'une cathédrale de glace, infranchissable pour nous autres. Il nous avoue n'être jamais parvenu aussi haut sur la glace depuis presque cinq ans. Une sacrée bonne journée pour lui et pour nous tous. Nous serons de retour sur la terre ferme plus de cinq heures après l'avoir quittée. Ah, j'ai rien vu passé ! Une fois de plus le "time sink" a fait son office.

Le jour suivant, avant de filer le long de la côte et de laisser derrière moi la pays de glaciers, je me suis arrêté de bon matin à Franz Joseph pour aller jeter un coup d'œil a l'autre monstre. Selon la légende maorie, le glacier serait né des larmes de la fille des avalanches, une maorie fondue d'expéditions en montagne qui y aurait perdu l'amour de sa vie, tombé dans un abîme. Les larmes fut si nombreuses qu'elles submergèrent la vallée et les Dieux décidèrent de les transformer en glace, afin que tous se souviennent des dangers de la montagne. Et bien les larmes ont bien diminué depuis l'époque. De nos jours, le glacier Franz Joseph, comme le Fox, se cantonne en fond de vallée. Il est assez bluffant de voir à quel point le glacier a bougé au cours des 250 dernières années. Comparés à leurs cousins européens, les glaciers Franz Joseph et Fox sont sacrément dynamiques et peuvent avancer ou reculer jusqu'à un mètre par jour. Oui, par jour ! Et il paraît qu'il y a 250 ans, la glace recouvrait presque la totalité de la vallée, ce qu'on a peine à réaliser. Étrangement, les deux glaciers étaient en phase d'avancement depuis les seventies, mais le processus s'est inversé au début des années 2000 et ils sont maintenant en cure d'amaigrissement intensive, comme un peu partout.


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3rd March 2010

Superbe encore une fois ! Bon c'est vrai qu'entre le film et la réalité tu as pas mal de différences! Si tu n'avais pas mis les dénominations je n'aurai pas deviné les endroits, et pourtant je suis un fanatique du seigneur des anneaux !!
7th March 2010

Salut Chief ! Yep, parfaitement raison, si tu comptes que les paysages peuvent pas mal changer selon l'angle de vue, les saisons et les années, sans parler des effets numeriques, il est illusoire de retrouver les lieux de tournages tels que vus dans les films. Mais, avec de bonnes indications, on se débrouille et les coins paraissent bizarrement familiers. Nous avons d'ailleurs loué le premier volet de la trilogie pour rafraichir les souvenirs apres-coup :)

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