DM en Ayiti


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Published: July 3rd 2016
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Samedi 25 juin. Voilà ma dernière fin de semaine en terre haïtienne qui débute. Sachant que la prochaine semaine serait très mouvementée et chargée, j’ai décidé de me lever tôt et de consacrer ma matinée à mon projet sur la collaboration intersectorielle. Je dois bonifier les livrables que j’ai présentés à la dernière consultation avec les Directions du ministère de la santé en fonction des commentaires qui ont été formulés, puis je dois préparer ma présentation finale pour jeudi prochain. Mes projets de l’après-midi me motivaient à bien travailler, et ce fut le cas! En début d’après-midi, Élise et Iker sont passés me chercher à l’appartement. Ayant vu à quel point j’avais aimé notre dernière journée de surf, ils ont décidé de me ramener à la plage Kabik pour répéter l’expérience. Elvira, une amie espagnole, s’est jointe à nous. Me hisser sur la planche, nager le ventre contre la planche pour avancer vers le large, me retourner assis sur la planche pour faire face à la plage, attendre la vague idéale pour me laisser pousser et hop, une fois qu’on ressent cette sensation d’être porté par la vague, sauter pour terminer en position debout et stable sur la planche : la routine était maintenant bien intégrée. Maintenant, il faut pratiquer et m’interroger à chaque chute sur ce qui a fait défaut. Iker m’a prodigué de judicieux conseils, patient et généreux de nature. Il a partagé ma joie lorsque j’ai réussi à me lever et à surfer sur quelques vagues sans tomber. Encore une fois, quelle merveilleuse sensation! Je dois avouer que de tomber dans une mer chaude et turquoise plutôt que froide et bleu foncé ajoute à l’agréable de la chose. Après un certain temps, les vagues sont devenues beaucoup plus grosses et fréquentes, au point où j’ai commencé à avoir la nausée. C’était le temps de revenir à la plage. Sur le chemin du retour, Iker et Élise ont voulu me montrer un étang qui se situait à quelques kilomètres de la route principale. Selon la légende, un pauvre homme est venu de très loin et demandait de l’eau à ceux qu’il croisait sur sa route. Tout le monde refusait, jusqu’à la dernière maison sur son chemin, où une personne généreuse lui offrit ce qu’il voulait. L’homme fit alors disparaître une montagne et créa un étang pour que la famille de cette maison ne manque jamais d’eau. Cet étang était maintenant devant nous. En bordure de ce bel étang, il y avait plusieurs plants de canne à sucre, un moulin pour les moudre et une installation pour la cuisson. On m’expliqua comment utiliser la machine, qui était barrée pour l’instant. Après un moment, je retourne chez moi et continue de travailler avant de m’endormir.





Dimanche 26 juin. En matinée, nous retournons à la plage pour surfer, à Timouillage cette fois. Les vagues sont moins grandes et plus abordables pour des débutants comme Élise, Elvira et moi. Iker est toujours présent pour nous conseiller. Je comprends que le plus important est de lire la vague. Dépendamment de si elle est en train de casser ou si elle est encore toute formée, de si elle est verticale ou non, de sa hauteur et de sa puissance, il faut se tenir à un endroit différent sur la planche, ajuster son poids vers l’avant ou vers l’arrière et placer sa planche vers l’avant ou un peu sur le côté. Bref, une question de physique…! Mais d’abord, il faut être capable de passer d’une position couchée sur le ventre à une position debout avec les genoux fléchis en un seul mouvement. Le surf et la plage sous un soleil brillant, voilà une excellente façon de profiter de mon dernier dimanche en Haïti. En début d’après-midi, nous sommes allés dîner à l’auberge de la Colline enchantée, ce même endroit où j’étais allé avec Rose-Francesse et son conjoint sans pouvoir profiter de la vue et de la nourriture. Cette fois, ce fut différent. J’ai mangé un excellent griot, alors que mes amis savouraient un steak au poivre et un poulet à l’estragon. Une rareté en Haïti…! Le tout était accompagné de riz aux haricots, salade de mangues et tomates, bananes pesées et pommes de terre frites. Après ce repas, nous sommes passés à l’hôtel Cyvadier pour que je puisse saluer mes amis du personnel. Malheureusement, l’un d’entre eux était malade. J’ai échangé mes coordonnées avec ces amis, qui voulaient continuer de m’aider avec le créole en m’écrivant dans cette langue. Les merveilles de la technologie…! En soirée, Figaro m’a invité à sortir en ville avec un de ses amis. Nous nous sommes posés au Bar de l’air, en bordure de Lakou New-York, où des dizaines d’Haïtiens dansaient aux rythmes du kompa et de la musique latine. Figaro a dû s’absenter pendant quelques moments, donc j’ai discuté avec son ami fort sympathique. Après quelques questions, nous en sommes venus à parler de relations de couple. Celui-ci me contait sa perception de la chose, qui correspondait exactement à ce que plusieurs déplorent ici. Cet homme a une copine depuis quelques années déjà avec qui il prévoit se marier, mais il a des aventures presque toutes les semaines avec d’autres filles. Sa copine s’en doute et s’en rend parfois compte, mais elle demeure avec lui. Il excuse son comportement par le fait que ce serait quelque chose de « culturel » ou encore de « culturellement accepté ». Lorsque je lui demande si sa copine a les mêmes droits que lui, il me fait comprendre que non, une femme a le devoir d’être fidèle à son mari. Malheureusement, cette pensée machiste et dégradante pour les femmes semble être répandue chez les jeunes hommes haïtiens. J’ai compris qu’une grande partie de ceux que je rencontrais y adhéraient, sans toutefois que je ne creuse le sujet davantage. Heureusement, des femmes fortes et certains hommes critiquent et dénoncent cette pratique libertine. On n’allait pas régler le sort du monde ce soir, donc nous sommes revenus à des sujets de conversation plus divertissants, tout en mangeant une délicieuse pizza. Figaro nous avait rejoints. Après un moment, l’ami en question part avec sa conjointe pour « fè bon koupe »… je vous laisse deviner ce que ça veut dire! Je continue donc de jaser avec Figaro, qui me parle de son rêve de cinéma. Il veut devenir producteur pour partager les histoires de la belle Haïti. Il y a tant de choses à conter sur ce beau pays… Figaro veut se servir du 7e art pour éduquer et sensibiliser les gens. Il est passionné par cette discipline et en voyant la façon dont il en parle, je sens qu’il saura s’émanciper à travers celle-ci. Une bonne partie de sa famille habite aux États-Unis et il planifie les y rejoindre sous peu. En retournant vers la voiture, nous saluons un chauffeur de la Croix-Rouge qui danse avec talent sur les rythmes latins avec sa femme. Je n’aurais jamais imaginé que cet homme au physique imposant pouvait se déhancher ainsi. Arrivé chez moi, je reçois un appel de Rose-Francesse qui m’informe que la coordonnatrice de l’Unité de santé internationale (USI) avec qui je fais un de mes projets de stage, de même que deux professionnelles de la Direction de santé publique de Montréal impliquées en Haïti, sont avec elle à Port-au-Prince. Je passerai une partie de la semaine avec elles.



Lundi 27 juin. Oups, je crois que j’ai lésiné sur la crème solaire dans le dos en fin de semaine. Ça tire! Je me rends aux bureaux de la Croix-Rouge tôt en matinée pour travailler sur ma présentation de jeudi sur la collaboration intersectorielle. Celle du lendemain sur mon projet d’évaluation de la référence/contre-référence me semble déjà prête. Pendant ce temps, Magdala s’est mise sur la (re)confirmation de présence par téléphone des personnes invitées à assister à ma présentation finale du lendemain. Puisqu’elle est employée par l’USI, cette tâche lui a été assignée, me libérant pour que je puisse travailler sur autre chose. En après-midi, je réussis à terminer ma présentation du jeudi. Me voilà fin prêt pour la conclusion de mes deux projets en Haïti. Un poids de moins sur mes épaules, puisqu’il ne me reste qu’à présenter le matériel que j’ai préparé, ce qui ne me stresse aucunement. En début de soirée, je me rends sur la terrasse d’Élise pour une autre séance d’entraînement avec mes sympathiques amis expatriés. Nous devons nous rencontrer un peu plus tard à l’Alliance française pour un spectacle d’un groupe français que Corentine, notre amie française, connaît bien. Malheureusement, il commence à pleuvoir avec intensité dès que nous terminons l’entraînement. Je reste donc chez Élise en attendant le concert. Après une douche, Iker arrive et nous visionnons des vidéos de groupes argentins et basques sur Youtube. Après un bon souper plein de légumes (ça faisait longtemps!), la pluie cesse et nous nous rendons à l’Alliance française. Corentine a les yeux brillants, d’autant plus que le groupe l’invite à chanter un extrait d’une de leurs chansons. Nous rions, buvons et chantons tous ensemble. Finalement, je retourne chez moi vers 23h. Le chauffeur Barthelemy, qui a toujours été très timide et discret, n’a pas cessé de me parler. Je crois que celui-ci était gêné de son français et est maintenant bien heureux de pouvoir communiquer en créole avec moi. Encore une autre preuve que des portes s’ouvrent lorsqu’on apprend les bases de la langue locale…!



Mardi 28 juin. Le jour J pour mon projet sur la référence/contre-référence. J’arrive au bureau tôt en matinée, où Magdala continue de (re-re-?)confirmer la présence des invités. Ses efforts auront valu la peine : près d’une trentaine de personnes étaient présentes, de tous les côtés du département du sud-est. Certains avaient fait plus de 4 heures pour assister à la rencontre. J’en fus profondément touché. Islene Lazo, la coordonnatrice de l’Unité de santé internationale, de même qu’une des personnes de la Direction de santé publique de Montréal et Rose-Francesse étaient également présentes. Certains collègues de la Croix-Rouge sont aussi venus assister à la présentation. Celle-ci s’est très bien déroulée. Les commentaires des participants étaient fort pertinents et ont contribué à améliorer la qualité du matériel et des recommandations que je présenterai dans mon rapport final, qui servira de base pour la suite à donner dans ce dossier. Après une mise en contexte, j’ai présenté les détails de ma méthodologie. Ensuite, j’ai fait état de mon analyse des résultats émanant des 24 entrevues et 6 séances d’observation que j’ai réalisées. J’ai pris des cadres d’analyse reconnus en santé publique pour organiser ces idées. Ainsi, j’ai exposé les forces et faiblesses des outils d’aide à la référence/contre-référence (RCR) de l’USI, un état des lieux de la RCR dans le département du sud-est, puis les obstacles et facteurs facilitant la RCR de façon plus globale. Finalement, j’ai interprété ces résultats et partagé mes recommandations, autant à l’USI qu’à l’équipe de direction départementale et aux prestataires de soins. Si jamais vous voulez parcourir ma présentation powerpoint, ce sera un plaisir pour moi de vous l’envoyer. Une fois la présentation terminée, la personne de la Direction de santé publique de Montréal a profité de la présence de l’équipe de direction départementale pour faire une séance de consultation sur le développement des instances communales en appui à la santé (tables thématiques communautaires, comités de santé communautaires, etc.). Cet échange était fort intéressant et m’a permis d’approfondir ma compréhension du système de santé haïtien à un autre niveau. J’avais déjà une bonne idée de l’organisation des soins et services aux niveaux national et départemental, j’étais maintenant exposé à son fonctionnement au niveau des communes (l’équivalent des CSSS chez nous, avec une participation beaucoup plus importante de la communauté). Après cette belle journée dont nous étions tous satisfaits, Rose-Francesse, Valérie (de la DSP de Montréal) et moi sommes allés à l’hôtel Cap Lamandou pour attendre Mylène (une médecin en santé publique de la DSP de Montréal) et Dre Byron (ma superviseure qui est aussi la directrice adjointe de la Direction de promotion de la santé et de protection de l’environnement au Ministère de la santé). Après de riches discussions, je suis retourné chez moi pour me reposer après une journée bien remplie. Je devais voir Vladimir pour lui dire au revoir, mais celui-ci ne se sentait pas bien. Partie remise!



Mercredi 29 juin. Cette journée est dédiée à la mission de la coordonnatrice de l’USI et des professionnelles de la Direction de santé publique de Montréal. Ces partenaires forment un partenariat avec la Croix-Rouge canadienne, la Croix-Rouge haïtienne, l’Hôpital Ste-Justine de Montréal et le Ministère de la santé haïtien. Ensemble, ils mettent un œuvre un Programme intégré de santé (PIS) qui agit à différents niveaux du continuum de santé (promotion, prévention, curatif, gestion, etc.) selon les expertises de chacun. Nous rencontrons donc le directeur départemental récemment nommé, Dr Jean Levelt. Celui-ci était un clinicien infectiologue avant de faire une maîtrise en santé publique en Thaïlande il y a une dizaine d’années. Cependant, il n’a pas été plongé dans le monde de la santé publique bien longtemps. Ce manque de connaissances ou d’expérience transparaissait dans les questions qu’il posait, mais il semblait être plein de bonne volonté. Il a été nommé à ce poste entre autres pour régler le dossier de l’hôpital St-Michel, qui est complètement dysfonctionnel depuis le début de la grève des médecins résidents. Il est inadmissible que les soins de base ne soient pas offerts dans ce seul hôpital spécialisé de 3e ligne dans le département. Espérons qu’il aura les reins solides…! Cette fois, nous discutons des façons d’articuler le leadership en santé aux niveaux départemental et communal. C’était fort intéressant. La DSP de Montréal offre un soutien plus particulièrement en rapport avec le renforcement des fonctions de santé publique (promotion, prévention, protection, surveillance) de la Direction départementale sanitaire et avec la coordination des interventions au niveau communautaire et départemental. Ils ont donc saisi l’occasion de mon projet sur la redéfinition de la structure centrale du Ministère de la santé pour se positionner en lien avec les niveaux hiérarchiques inférieurs. Judicieux! L’échange fut fort intéressant. En après-midi, j’ai accompagné Rose-Francesse et Islene (coordo USI) pour visiter quelques établissements de santé. Nous sommes passés par un petit dispensaire dans la section communale Cyvadier (centre de santé avec seulement une infirmière auxiliaire pour des soins de base), le centre de santé SONU-B de Cayes-Jacmel qui était vide à cette heure-ci, l’hôpital privé Martinez qui constitue l’option de rechange du côté privé maintenant que l’hôpital St-Michel est fermé, et finalement les nouvelles installations de l’hôpital St-Michel. L’ancien établissement a été grandement endommagé par le tremblement en terre en 2010. Depuis, la Croix-Rouge canadienne a déboursé un grand montant pour en construire un nouveau. Un partenaire japonais s’occupait également d’une partie de l’hôpital. Celui-ci sera prêt sous peu. En attendant, l’ancien hôpital devrait être toujours fonctionnel, s’il n’y avait pas de grève. Cet hôpital était énorme et impressionnant. Je me demandais s’ils allaient réussir à avoir un personnel suffisant pour remplir cet hôpital, sans drainer les ressources des centres de santé moins spécialisés. Aussi, pourront-ils payer leurs employés, alors que les médecins et infirmières dans plusieurs SONU-B du département ne sont pas payés depuis près d’un an? Je suis sceptique, mais j’espère être agréablement surpris. Les installations étaient superbes. Ses murs immaculés brillaient sous le soleil. Après cette visite, je retourne au bureau. Mes amis de la Croix-Rouge viennent me voir un à un à mon bureau pour me dire au revoir. Figaro, Gamael, Miss Magdala, Jimmy… Je règles quelques détails avant mon départ, puis je retourne finalement chez moi. Vladimir vient terminer le gâteau qu’il avait déjà entamé et s’en va juste avant que l’électricité ne soit coupée. Un chauffeur de la Croix-Rouge vient ensuite me chercher pour m’amener… où? J’apprends que le directeur départemental nous a invités chez lui pour la soirée. Il nous raconte son parcours académique, puis nous parlons des différences entre le Québec et Haïti, de même que du créole. Il nous partage ce qu’il sait sur l’origine de certains mots. Par exemple, « marassa » signifie « jumeaux » en créole. Il y a quelques siècles, une femme caucasienne et un homme haïtien auraient eu des jumeaux. Puisque les jumeaux sont très rares chez les Haïtiens, la femme se serait exclamée « c’est ma race, ça! » en voyant qu’elle donnait naissance pas à un mais bien à deux petits êtres humains. Cette expression a ensuite été transformée en « marassa ». De plus, les Marassa sont des divinités vaudous sous forme de jumeaux, qui sont encore plus puissants que les lwa. Après un certain temps, nous nous rendons dans un bar en ville, le Barak, pour manger une pizza et prendre un verre. Le directeur départemental trinque un peu trop et une discussion qui avait débuté tranquillement sur les apatrides haïtiens, ces personnes d’origine haïtienne nés en République dominicaine qui ont été violemment chassées de ce pays et qui sont revenues en Haïti avec rien, devient un débat presqu’agressif. Rose-Francesse a eu la bonne idée de demander l’addition pour que chacun retourne chez soi. Belle soirée tout de même. Lorsque je suis retourné à l’appartement, il n’y avait toujours pas d’électricité. Je fais donc ma valise dans l’obscurité. Je vérifierai demain matin si j’oublie quelque chose. Épuisé, je m’endors en position de l’étoile sur mon lit, suant à grosses gouttes.



Jeudi 30 juin. Cette journée que je redoutais depuis quelque temps finit par arriver. Je quitte Jacmel vers 6h30, le cœur gros, à bord de l’immense camionnette au klaxon tonitruant conduite par Bélizaire. À chaque fois qu’il klaxonne, je ris. Bélizaire est plutôt petit, mais son klaxon pourrait réveiller une ville entière. Malgré tout, il l’utilise quand même pour saluer les gens, aviser qu’il va dépasser un véhicule, etc., comme il est de coutume ici. À chaque fois, les gens autour de nous font le saut et nous dévisagent, alors que le sourire de Bélizaire – et le mien par le fait même – s’agrandit. Déjà à 6h30, les Jacméliens sont actifs et sillonnent les rues que nous traversons à toute vitesse. Je vois pour une dernière fois la rivière qui longe la route, le pont inachevé qui simplifierait tellement le transit, la vue de Jacmel depuis la montagne, le marché à la terre rouge, le petit resto-bar où tout est couvert de coquillages, la vieille voiture abandonnée en bordure de route, les enfants sur leur âne aux côtés des femmes aux lourds paniers sur leur tête. Cette petite ville et le chemin de l’Amitié qui mène à Port-au-Prince me sont devenus familiers. Voilà pourquoi je me sentais si bien ici, je commençais à me sentir un peu chez moi. Une fois à Port-au-Prince, nous sommes passés chercher Dr Joseph, le Directeur de santé scolaire du Ministère de l’éducation puis nous sommes arrivés au Laboratoire national de santé publique d’Haïti, où j’allais faire ma présentation finale du projet sur la collaboration intersectorielle. Nous nous installons, alors que les invités commencent à arriver. Certains d’entre eux ont une vingtaine de minutes de retard, mais j’y suis maintenant habitué. Beaucoup d’invités des différentes directions du Ministère de la santé étaient présents, de même que plusieurs partenaires tels qu’UNICEF, l’organisation panaméricaine de la santé de l’OMS et le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP). Les gens se sont bien impliqués dans la discussion sur les outils que je leur présentais. Tout d’abord, il y avait le modèle organisationnel, où je propose d’ajouter une instance relevant de la Direction générale et menée par l’Unité d’étude et de programmation du Ministère. Cette instance aurait le mandat de veiller à l’intégration de la programmation en agissant comme un goulot où tous les projets soumis par la Direction générale et par les partenaires auraient à passer. Ainsi, une programmation intégrée pourrait avoir lieu, de même que son suivi et son évaluation. Cette transformation débutera avec un projet pilote ciblant seulement la santé scolaire, avant de s’étendre à l’ensemble de la programmation en santé si ça fonctionne bien. Le deuxième outil que je présentais était le cadre de collaboration interministérielle qui permettrait au Ministère de la santé d’utiliser certaines étapes de façon systématique pour former des partenariats avec d’autres ministères sur certaines thématiques, tel que c’est le cas en santé scolaire avec le Ministère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle. Finalement, j’ai présenté les plans d’action qui accompagnent ces cadres, afin qu’un échéancier précis avec des indicateurs de suivi facilite leur mise en œuvre. J’ai senti un réel intérêt à utiliser ces outils de la part des Directions du Ministère de la santé, ce qui m’a soulagé. J’ai fait tout ce que j’ai pu pour que ces outils soient aussi user-friendly que possible, mais leur mise en œuvre dépendra principalement du leadership, de la motivation et de la volonté des membres du Ministère de la santé. Avec le RÉFIPS, nous accompagnerons le Ministère au besoin et assurerons un suivi. À suivre! Après avoir salué une dernière fois Dre Byron – ma superviseure dans ce projet – et les autres invités, nous avons laissé Dr Joseph chez lui et sommes passés à l’épicerie pour acheter du rhum Barbancourt. Voilà un excellent cadeau pour la famille au Québec! Ensuite, nous arrivons à l’hôtel El Rancho. Afin de célébrer la fin de mon stage, la venue des professionnelles de la DSP de Montréal et l’avancée du Programme intégré en santé, nous avons décidé de passer la nuit à ce superbe hôtel. Celle-ci a une gigantesque piscine et un grand restaurant. Je ne me sentais plus vraiment en Haïti, mais c’était une transition intéressante vers le Québec. Je me suis dépêché à enfiler mon maillot de bain, puis me suis précipité dans la piscine où j’ai passé l’après-midi. En soirée, alors que nous soupions, un collègue et ami de Rose-Francesse, qui travaille pour l’Unité d’études et de programmation du Ministère de la santé, est venu nous voir. Je lui ai parlé en long et en large de mon projet, mais celui-ci est devenu beaucoup plus politique, n’étant plus vraiment à jour par rapport au contenu de sa Direction. Nous parlons donc des élections et de la situation d’Haïti en général. Il confirme ce que j’avais déjà entendu : les organisations internationales font souvent plus de mal que de bien dans ce pays. Les différents organes des Nations Unies sont carrément en compétition avec l’État haïtien dans la mise en œuvre de politiques et d’une programmation qui permettra le développement de sa population. Lorsque l’État décide d’imposer sa façon de faire, ces organes onusiens passent par d’autres canaux officieux pour faire approuver leurs projets et arriver à leurs fins, affaiblissant du même coup l’autonomie du gouvernement haïtien. Cette situation peut être le résultat d’un manque flagrant de leadership de la part des instances politiques centrales en Haïti, de l’omniprésence des organisations internationales dans ce pays depuis plusieurs décennies et du besoin criant en ressources financières qui le placent à la merci de l’aide extérieure. Une discussion bien intéressante, quoique plutôt désespérante. Décidément, il faut investir dans la société civile haïtienne et dans les instances politiques de contenu, non corrompues et stables. Plus facile à dire qu’à faire…! Vers 22h30, nous partons vers le Café Olofson afin d’assister au spectacle de Ram, un groupe musical haïtien dit « racine », qui utilise des rythmes classiques vaudous sur lesquels il superpose des mélodies entraînantes. Certaines personnes entrent en transe et incarnent des lwa lorsqu’ils entendent cette musique. À notre grand malheur, nous avons appris que la représentation de la soirée était annulée vu que l’électricité était coupée et que les génératrices étaient défectueuses. Nous sommes donc passés par le bar Yandalou, où il y avait beaucoup de monde, pour terminer au Jet set. Il y avait peu de monde à ce bar, donc nous avons pu demander au DJ de mettre des chansons de Ram, pour satisfaire nos intentions initiales de la soirée. Il a également fait jouer de la musique latine, au grand bonheur d’Islene, qui a fait montre de ses racines colombiennes en dansant la salsa avec grâce. Nous avons beaucoup ri, puis sommes revenus à l’hôtel El Rancho.





Vendredi 1er juillet. Ce matin, Rose-Francesse et une des professionnelles de la DSP de Montréal sont retournées à Jacmel pour continuer leur mandat, me laissant avec Islene (USI) et Mylène (DSP de Montréal). Nous avons passé une bonne partie de la matinée dans la piscine, puis préparé notre valise pour nous rendre à l’aéroport vers midi. Nous avons croisé Sean Penn, qui était sur le même vol que nous pour retourner à Miami. Celui-ci a sa propre fondation en Haïti et vient souvent dans ce pays pour assurer le suivi de ses activités. Déjà un peu déconnecté d’Haïti, je vois ce magnifique pays disparaître sous les nuages après quelques minutes de vol…


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