DM en Ayiti


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Published: May 28th 2016
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Voilà que j’accumule du retard dans ce blog. Ce n’est certainement pas faute d’expériences intéressantes à partager… mais bien au contraire, j’ai l’impression d’être constamment en train de commencer une histoire sans avoir terminé la précédente. Mes sens sont simulés de toutes parts, souvent en même temps. Parfois, je me demande si on s’habitue à l’émerveillement. Est-ce que l’émerveillement est simplement une série de réactions chimiques qui stimulent des vieux récepteurs ultimement rabougris et fatigués? Ou est-ce que l’irrationnel des sentiments nous sauve de cette tolérance éventuelle? J’ai pour mon dire que l’attitude et la capacité à demeurer réceptif à ce qui nous entoure ont une grande part de responsabilité dans l’émerveillement perpétuel. Pour ma part, j’ai la chance d’être du genre contemplatif. Je peux rester des heures assis sur une rue à regarder les gens passer, à m’imaginer ce que pourrait être la vie de chacun, vers où ils vont et d’où ils viennent, ce qui les préoccupe. Même chose devant un paysage statique, où j’admire les jeux d’ombres et de lumière qu’il présente selon la position de la lune ou du soleil, ou encore où je ne pense à rien, tentant de m’imprégner de la grâce du moment. Le fait de contempler nous permet parfois de déceler certains petits détails qui auraient échappé au coup d’œil rapide. Une horde de fourmis qui transportent un objet aux dimensions impressionnantes, un paysan tirant un âne borné en montagne, une vieille publicité de Coke malmenée par la végétation, des instants de communion entre l’Homme et ses produits, la faune et la flore. N’importe quel détail peut devenir une histoire.



Jeudi 12 mai. Je me lève dans ce petit sauna que j’affectionne de plus en plus. Quelques exercices, un peu de pain et fromage, une douche froide et me voilà prêt pour le travail! J’appelle ma superviseure afin de lui demander si je peux me rendre à pied au bureau, qui est à environ 10 minutes de marche de chez moi. Ainsi, je me disais que j’éviterais du trouble aux chauffeurs. Réponse claire, nette et indiscutable : je dois demander une voiture de la Croix-Rouge pour m’y rendre. Reconnue pour le confort et la sécurité qu’elle garantit aux expatriés et stagiaires, cette organisation contraint du fait même la liberté de ceux qui aiment explorer. Ma mère s’en trouvera certainement soulagée… mais quant à moi je suis resté un peu déçu. Heureusement, cette (sur?)précaution vient avec certains avantages, tels que le fait de pouvoir demander une voiture pour explorer la région. En même, je me demande… à force de se protéger de l’environnement dans lequel évolue la population avec laquelle on travaille, ne crée-t-on pas des barrières qui nous empêchent de comprendre ses mécanismes sociaux, ses règles non dites? On y reviendra. Ce matin, j’ai décidé d’élaborer les grilles d’entrevues et d’observation que j’utiliserai pour mon projet d’évaluation en référence/contre-référence. Puisqu’on a déploré le fait que mes grilles d’entrevues utilisées auprès des Directions du Ministère de la santé ne s’inspiraient pas de cadres reconnus de santé publique ou de la littérature scientifique, j’ai décidé d’y mettre le paquet cette fois. Alors que je jonglais entre les théories de Green, de Rogers, la matrice de Haddon et des études passées sur les transferts intra-hospitaliers en pays en voie de développement, je suis tombé sur certains documents officiels haïtiens. À première vue, certains choix syntaxiques, relevant parfois de l’exploit, m’ont intrigué. « Les jeunes et les adolescents effectuent des transformations physiques, mentales et sexuelles. » … vivent? subissent? « Une revue de littérature a été exploitée. » …effectuée, réalisée? « Le MSPP est l’organe étatique qui charrie le mandat de la santé. » Charrier un mandat, je me demande bien si c’est une bonne chose ou non. Mais qui suis-je pour crier à l’inexactitude, si notre bon vieux français québécois d’usage est tout aussi épatant? Chez nous, on se tire une bûche, on va faire un bout et on wri-file notre tinque à windsheerwâsheur. Ces expressions ne se trouveront jamais dans des politiques nationales, mais nous rappellent quand même que la langue que nous ont inculqués nos ancêtres colons (ou colons ancêtres…?) a évolué bien différemment aux quatre coins du monde, sans être mieux pour autant dans un endroit que dans un autre (sans rancune, mes chers amis français!). En soirée, je ne pensais pas que viendrait aussi rapidement une opportunité d’entrave à la règle stricte du transport de la Croix-Rouge. En effet, une collègue et amie du Québec, Marie-Ève Goyer, était de passage à Jacmel pour travailler sur un projet. Elle m’a donc invité à rencontrer son équipe et celle de Plateruse, l’organisation avec laquelle ils travaillent. Je suis donc parti de chez moi à bord de la camionnette de l’organisation, qui arborait fièrement sur son capot des petites lumières dignes d’une discothèque des années 1980. J’ai passé une superbe soirée. Tout d’abord, j’ai découvert des travailleurs de rue haïtiens et québécois engagés, tant localement qu’à l’international, de même que des médecins qui se dédient aux plus poqués, ici et ailleurs. Le projet qui en est encore à ses balbutiements vise à ajouter un volet soins de santé à l’intervention des travailleurs de rue jacméliens qui se déplacent pour aider les enfants sans abri ou présentant certaines problématiques. J’ai été confronté de plein fouet à l’essence même de tous mes questionnements en matière d’assistance humanitaire. Quel modèle devrait-on prôner? Est-ce que la nature de cette assistance devrait être établie par des organisations internationales qui ont une expertise de plusieurs décennies en planification, une vision globale (quoiqu’externe) des problématiques en jeu et jouissent de multiples ressources conseils? Sinon, est-ce une approche efficace que d’apporter un soutien selon les priorités identifiées par des personnes du terrain, empreintes du contexte dans lequel elles évoluent, mais qui n’ont pas nécessairement le recul pour avoir une approche globale et encore moins une expertise en planification e priorisation? Est-ce que l’assistance de l’international peut pallier cette faiblesse d’avoir le nez directement dans le problème qu’on veut régler? Est-ce que ces deux modèles devraient coexister? Ce qui m’a fait grandement plaisir, c’est de voir que chaque personne autour de la table, un morceau de viande de chèvre pris entre les dents ou une bière Prestige à la main, s’interrogeait sur ces principes fondamentaux. Vraiment une chouette équipe. Après avoir sillonné dans les ruelles de terre sans lumière pour faire quelques achats chez Gwo Madam (cette propriétaire de kiosque pas si plantureuse, en fait, qui se désigne elle-même ainsi), un délicieux repas partagé entre amis, quelques gorgées d’une boisson au gingembre dont je n’essaierai même pas de deviner le pourcentage d’alcool, des rires et des grandes promesses, je suis revenu chez moi. J’avais le cœur léger, malgré le fait que je venais de contrevenir à une règle de la Croix-Rouge. Après tout, les règles ne seraient pas règles sans leurs exceptions!



Mon plaisir en bonne compagnie ne faisait que débuter. Le vendredi 13 mai, j’ai demandé (sagement) une voiture de la Croix-Rouge pour aller chercher deux amis en visite à Jacmel. Il s’agit de Nicolas et Kelly, un résident en médecine familiale et une infirmière qui font un stage clinique d’un mois dans un village nommé Labrousse, à plusieurs heures à l’ouest de Jacmel. Libres pour une fin de semaine, ils ont décidé de venir me visiter. Nicolas, un ami depuis plusieurs années, connaissait déjà la ville pour y être resté quelques semaines, avant le tremblement de terre. Je leur ai concocté un plan d’activités pour la fin de semaine, où s’entremêlaient repos et découvertes. J’ai aussi invité Vladimir, ce jeune serviteur dont j’ai parlé plus tôt. Puisqu’il peut avoir des permissions pour sortir de la maison et nous guider dans la ville, j’ai demandé à ce qu’il nous accompagne pour la journée. Même si nous n’avions pas réellement besoin d’un guide ou d’un accompagnateur, je me disais que ça le libérerait de ses tâches et préoccupations pendant un instant. Tous ensembles, nous sommes donc allés à Lakou New York, une belle promenade au pavé assorti de pierres de toutes les couleurs, qui longe la mer. Des tonnes de déchets formaient une plage peu invitante, où s’amusaient tout de même des enfants aux culottes un peu trop grandes. Ensuite, nous avons parcouru les rues avoisinantes, tombant parfois sur des petites merveilles qui décorent les cartes postales de la ville, telles que l’Hôtel Florita et sa petite galerie d’art, ou encore l’Hôtel Colins où nous avons englouti un jus de mangue bien rafraîchissant. Le soleil tapait dur! Nous avons tout de même décidé de braver cette chaleur irradiante pour aller… à la plage Raymond-les-bains! (Je sais, on fait presque pitié.) Une fois sur place, une dizaine de jeunes hommes se battaient pour avoir l’immense honneur de nous placer une table sous un cocotier, près de la mer. Vous l’aurez deviné, nous étions les seuls non-Haïtiens à cet endroit. Alors qu’on se rafraîchissait, les vendeurs défilaient avec leurs petites sculptures et objets parfois excentriques (qui se rendrait sur une plage pour acheter un pilon et un mortier?), alors qu’on nous offrait des victuailles dont les mouches semblaient raffoler. Notre ami Vladimir, un sourire en coin, nous a dit qu’il connaissait une personne de confiance qui nous préparerait tout un repas. Une heure et demie plus tard, nous avions deux écrevisses, un poisson et des lambis parfaitement cuits et généreusement assaisonnés devant nous. Le tout s’accompagnait de bananes pesées (plantain écrapouti et frit) sur lesquelles on mettait du pikliz (une espèce de salade de chou qui fait cracher du feu). Nous buvions le jus de coco directement de ces noix, qu’un jeune adolescent tranchait dangereusement avec une machette digne de Rambo. Pendant notre dégustation, une vingtaine de jeunes d’un âge indéterminé (j’ai encore de la difficulté à dire si un Haïtien a 15 ans ou 35 ans…) s’amusaient dans la mer. En Haïti, les gens se baignent soit tout habillés ou tout nus. Le simple costume de bain ne semble pas être la mode du moment. À un certains points, ils sont tous sortis de l’eau en courant et sont venus en arrière de nous pour prendre une photo, sans dire un mot de plus. Grands sourires, quelques flash et ils étaient déjà repartis dans l’eau. Les filles se faisaient porter dans les bras des garçons. Lorsqu’on est allés se baigner à notre tour (avec maillots de bain, je vous rassure), quelques-uns d’entre eux se sont approchés de nous pour se présenter. Il s’agissait en fait d’un groupe d’étudiants et professeurs de plusieurs niveaux en sortie de classe. Pour plusieurs, il s’agissait d’une première sortie à Jacmel, d’où leur excitation assez impressionnante. À un certains moments, un fameux tandem garçon musclé/fille portée s’est approché de moi. Je pensais qu’ils voulaient me parler, mais à ma grande surprise, le garçon a laissé tomber la fille, s’attendant que je la rattrape. Je ne suis pas certain que cette fille ait apprécié cette immersion saline inattendue. La leçon de cette histoire : lorsqu’on vous lance une fille dans les bras, assurez-vous de l’attraper! Après quelques heures passées à la plage, nous sommes retournés à l’hôtel Cyvadier où restaient mes deux amis québécois. Nous avons essayé différents drinks du bar que nous ne connaissions pas (rhum punch, une liqueur d’hibiscus, crémasse – un caramel alcoolisé), grignoté un peu et passé un moment blotti dans un hamac au bord de la mer. Des pizzas alléchantes nous passaient sous le nez, mais la mer nous avait déjà rempli l’estomac bien assez. Les pizzas seront pour demain!



Pour cette seconde journée de visite, le samedi 14 mai, j’ai décidé d’amener Vladimir et mes amis québécois à un coin de paradis du département du sud-est : le bassin bleu. On m’avait déjà vanté cet endroit, dont l’eau était d’un bleu clair lorsque les conditions météorologqiues étaient parfaites, mais d’un brun poubelle lorsqu’il pleut. Il avait plu quelques minutes chez moi tôt le matin, mais les zones d’averses sont tellement disparates que ça ne voulait rien dire pour ce bassin situé à plusieurs dizaines de kilomètres de Jacmel. Un chauffeur de la Croix-Rouge bien sympathique, prénommé Figaro, nous a amené. Ce passionné de production cinématographique a une mère à New York mais n’aime pas tant les États-Unis. Puisqu’il a la chance de pouvoir voyager, nous nous sommes donc acharnés à lui vendre notre beau Québec, afin qu’il vienne le visiter. Bien sûr, nous lui avons recommandé plusieurs œuvres du cinéma québécois et parlé de Xavier Dolan, qu’il connaissait déjà. Avant de gravir la montagne abritant le bassin bleu, nous devions traverser une rivière en voiture, puisque le pont qui surplombe la rivière est en construction depuis une éternité. C’est comique d’ailleurs, parce qu’il ne reste qu’un minime tronçon d’environ 2 mètres à compléter, mais il semblerait qu’il y ait des problèmes puisque ça stagne. Bref, on remerciait la Croix-Rouge de nous avoir laissé une jeep pour nous rendre au Bassin-bleu. Après une heure à parcourir les chemins rocailleux bordés de falaises en montagne, nous sommes enfin arrivés à une petite station avec un abri de bois, où des dizaines de personnes se tenaient, nonchalamment, probablement blasés de voir des touristes arriver des quatre coins du monde. Dans ce petit abri pittoresque se trouvait, étrangement, un grand gaillard aux allures de rappeur, avec plus de bagues que de doigts, lunettes de soleil et rasta en combo. Après lui avoir payé 100 gourdes, il nous a présenté Dickson (que j’ai appelé Nixon tout le long sans savoir son vrai nom), notre guide pour la petite expédition. En effet, c’était une expédition! Traverser des ruisseaux, sauter sur des rochers un peu glissants, descendre une façade avec une corde, pour enfin traverser un bassin verdâtre où nous avions de l’eau jusqu’à la mi-thorax... la suite en a vraiment valu la peine. Alors que nous arrivions un énorme groupe de touristes quittait, nous laissant totalement seuls devant ce coin de paradis, Nicolas, Kelly, Vladimir, Dickson-Nixon et moi. Les mots ne suffiraient pas pour décrire la beauté de cet endroit. Une photo vous donnera une meilleure idée. Tout autour de nous, d’immenses façades rocailleuses où s’entremêlaient lichen, arbustes jusqu’au sommet où des arbres protégeaient cet oasis. Malgré leur feuillage garni, quelques faisceaux de soleil aux contours bien définis plongeaient jusque dans l’eau bleu azur. Un air à l’odeur de végétation humide et pleine de vie nous remplissait les poumons. Le son apaisant et régulier d’une magnifique chute n’était entrecoupé que par les piaillements mélodieux des oiseaux environnants. L’Homme aurait voulu créer une scène aussi parfaite ; il n’aurait jamais su faire aussi bien que ce que la Nature nous offrait aujourd’hui. Nous sommes restés près de trois heures à nager dans ce bassin et escalader les rochers mouillés pour laisser la chute nous masser la tête, les épaules ou le dos, avant de replonger dans l’eau fraîche. Nous n’avions pas besoin de nous le dire : chacun appréciait le silence de l’autre pour capter toute la sérénité de l’instant. Vladimir nous a conté la légende de Simdy, la lwa aux allures de sirène, è la peau opale et aux longs cheveux, qui tirait parfois les pieds des baigneurs pour qu’ils lui gardent compagnie à tout jamais. Après ce ressourcement, nous sommes retournés où Figaro nous a laissés. En attendant qu’il revienne, nous avons joué à un jeu où il fallait deviner le nom qui figurait sur un carton collé à notre front. Bob l’éponge, Ponce Pilate, Michael Phelps, Picasso, Duvalier père, Iron Man, l’inspiration était au rendez-vous! Nous sommes passés par l’épicerie en revenant, histoire d’acheter quelques cochonneries sucrées et salées qui nous obsédaient depuis quelques jours, puis nous sommes retournés à l’hôtel Cyvadier après avoir déposé Vladimir. La relaxation a continué… baignade dans la mer houleuse, saucette dans la piscine de l’hôtel, quelques drinks, le hamac, quel bonheur! Marie-Ève Goyer (qui connaît aussi Nicolas) et ses acolytes se sont joints à nous pour savourer un délicieux souper, composé de langoustines, crevettes, homard, poisson, bananes pesées, riz… quelle journée de rêve.





Dimanche 15 mai au matin, je suis retourné au Cyvadier pour saluer Nicolas et Kelly, qui retournaient à La Brousse. En chemin, j’ai vu des jeunes hommes qui aplanissaient la rue à l’aide de sable et rochers. Il avait beaucoup plu pendant la nuit. Les précipitations sont si puissantes ici que l’eau qui dévale les montagnes creuse des sillons et abîme les routes. Puisque la municipalité ne fait rien pour les réparer, les citoyens le font eux-mêmes. En échange de ce service, quelqu’un parmi eux ralentit le trafic pour demander une contribution volontaire. C’est merveilleux (et triste à la fois), tous ces exemples d’initiatives citoyennes pour pallier les manques de l’État. L’après-midi fut calme. Je suis resté le reste de la journée à cet hôtel où le wi-fi est disponible pour travailler sur mes grilles d’entrevue et mon projet d’évaluation à Jacmel. J’ai aussi pu terminer toutes les sections de grammaire de mon livre d’apprentissage du créole, en savourant un jus de mangue. J’ai pu m’exercer en créole avec le personnel fort sympathique de l’endroit, qui était amusé de me voir réfléchir aussi intensément pour pondre une phrase toute simple.

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31st May 2016

Bonjour David-Martin. Ce matin, j'ai pris le temps de lire tes billets relatant ton travail et ton insertion à Jacmel et ailleurs en Ayiti. Quelle belle insertion, tu vis, n'est-ce pas? Dans tes récits, on sent l'accueil de tes hôtes ainsi que le plaisir que tu as à les côtoyer, à les connaître, à découvrir la vie au pays à travers les personnes et le mode de vie... et la mangue (quel bonheur de déguster ce fruit; un coulis de mangue avec du poisson et du riz, c'est pas mal bon). En te lisant, on sourit, on rit, on apprend, tout en appréciant ton travail et ton style d'écriture imagé. Dans les photos que tu as postées, j'aime celle du vieil homme et la mer: ce type de photo me fait toujours penser à la chance que possède l'être humain de pouvoir s'arrêter afin de contempler ou d'observer ce qui l'entoure, pour réfléchir à la beauté du monde, certes, mais aussi pour retrouver en soi son propre fil conducteur parmi le tourbillon des expériences de vie. C'est difficile de s'arrêter dans notre vie trépidante. Je suis de cette nature tranquille, mais forte. L'autre photo que j'aime bien, c'est celle de l'allée colorée de Lakou New York. Évidemment, ça rejoint mon champ d'intérêt pour l'art visuel. Au fait, pour toi, de quelle couleur serait Ayiti? Couleur de mangue? Dans un de tes billets, tu te questionnais sur le modèle d'intervention qui met en scène des coopérants dans différentes sociétés. N'ayant pas fait de coopération dans ma vie, je me risquerais à penser qu'il s'agit d'un échange d'expertise, en quelque sorte, et qu'il faut prendre le temps de connaître la société où l'on intervenient, car l'inverse est sûrement vrai: les sociétés où l'on intervient doivent aussi prendre le temps de connaître les coopérants (et les organisations). Pour chacune des parties, il faut gagner la confiance de l'autre. Sur le plan personnel et sur le plan collectif, je trouve qu'il faut prendre le temps de se connaître pour nouer des liens solides..., étape qu'on a perdu de vue à notre époque qui valorise l'instantanéité ou la rapidité. Qui sait, je suis peut-être d'une autre école de pensée...
31st May 2016

Ayiti verte!
Bonjour Johanne, Merci pour ton message! Je me reconnais dans plusieurs choses que tu dis, entre autres par rapport à ta relation avec le monde. S'arrêter et contempler, réfléchir à la beauté du monde, trouver son fil conducteur... C'est peut-être pour ça qu'on s'entend si bien! Je me suis questionné à savoir quelle couleur je donnerais à Haïti... Je crois qu'il s'agit d'un vert chlorophylle. Oui il y a eu beaucoup de déforestation et oui l'absence de collecte de déchets fait qu'on les retrouve partout. Certains parleraient davantage de brun, ou même de noir. Mais ce qui me fascine, c'est de voir autant de vert, partout. Un arbre qui est tombé suite au tremblement de terre et qui s'est redressé en plein milieu d'un champ, sans autre support. Une plante qui perce l'asphalte fissurée de la route, la forêt danse qui couvre les maisons isolées dans les montagnes, les manguiers, les 'arbres véritables', les cocotiers... Le vert de la flore est partout, malgré l'humanité qui s'y est invitée. La couleur de mangue était invitante aussi...! Le jaune soleil en fin d'après-midi, le jaune de tous ces fruits juteux qui nous désaltèrent... Mais je retiens mon vert chlorophylle! ;) Pour ce qui est du modèle d'intervention... oui l'échange d'expertise est intéressante. Mais je me questionne à savoir s'il ne faut pas aller même à un autre niveau et accompagner les gens à développer leur propre expertise... Sinon on oublie une tonne de personnes qui n'ont pas eu la chance de développer une expertise en soi, mais qui ont une expérience incroyable. Bref, se baser davantage sur l'expérientiel pour aider les gens à développer une expertise empreinte du contexte dans lequel ils évoluent? Quelques bribes de réflexions... ;)

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