Jiayang Narrow Gauge Steam Train / 嘉阳窄轨蒸汽火车, Chine (ou Le Chien qui Jongle sur un Monocycle)


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Asia » China » Sichuan » Chengdu
March 12th 2015
Published: March 18th 2015
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9 mars



Je m'embarque dans un périple imprévu aujourd'hui.

Voilà. C'est que Sally et le staff de l'auberge où je loge à Chengdu (le Flip Flop) ont louée une mini-van pour une excursion rarement (voire jamais) prisée par les touristes étrangers.

Ça fait des mois qu'ils ont prévu le coup.

Sally l'enjouée m'a demandé de me joindre à leur groupe: le plan c'est qu'au retour, ils passeront par Leshan, ville où je voulais me rendre aujourd'hui, de toute façon.

Tout ça fait du sens.

J'accepte donc l'invitation... et me retrouve, sans contrôle mais en confiance, dans une mini-van avec les 5 chinois de l'auberge.

La destination demeure nébuleuse, mais Sally m'a parlé d'un train.

Voilà tout.



C'est après un deux heures et demie de route que nous voilà à débarquer en pleine campagne, entourés de ces champs de fleurs jaunes en terrasse qui, encore une fois, couvrent le paysage dans les vallées.

Le train en question en est un datant du début de l'ère industriel, qui s'étouffe au charbon et qui pouffe sa vapeur comme un presto.

Comme la technologie a (par chance) changée, cette ferraille est aujourd'hui utilisée pour traîner des wagons saturés de touristes au delà des collines et des vallons en fleurs.



La promenade s'avèrera bien agréable, bien sûr.

Mais c'est surtout tout ces chinois intrigués par ma présence qui m'a légèrement traumatisé dans toute cette aventure.



C'est qu'on m'a toujours conseillé de demander aux gens avant de les prendre en photo.

Question de respect, bien sûr.

On ne photographie pas le monde comme on le fait pour des bêtes.

Ça va de soit.

Bon.

J'avoue que je l'ai peut-être fait quelque fois.



Et bien je dois maintenant vous dire qu'ici... les rôles sont remarquablement inversés.

Sans m'avertir, on me prenait donc en photo, quelques fois hypocritement, mais plus souvent qu'autrement, à deux pieds du visage.

Boom!

Comme des paparazzis.



Je suis un chien qui jongle sur un monocycle.

Je suis, sans doute, le premier blanc à débarquer dans le patelin du vieux train au charbon perdu dans un replis du Sichuan.

...



On quitte finalement la salissante aventure alors que ma face se trouve imprimée sur bien davantage de cartes mémoire que je l'espérais au départ.

J'imagine que je serai le sujet de conversation de quelques familles chinoises durant l'heure du souper de ce soir.

...



La mini-van doit me déposer à un hostel précis à Leshan.

En fait, comme il n'y a que de grands hôtels luxueux pour les étrangers ici, Sally l'enjouée m'a dénichée un hostel à chinois.

Bref, tu ne parles pas et ne lis pas mandarin, tu ne sais pas que ça existe cet endroit où pieuter.



Alors me voilà donc qui débarque devant un édifice de 50 étages, beaucoup trop neuf, protégé par des agents de sécurité moroses qui parlent fort en chinois.

Chambre d'hôte.

Sally m'a trouvé un appartement pour un soir, au vingt-troisième étage d'un bloc bétonné gris, ton sur ton avec le ciel sans soleil, pour 11 $ canadien la nuit.



Me voilà donc locataire d'un appartement chinois, décoré d'un majestueux sino-divan prune en minou, dans un salon vert pomme... et puis d'une salle de douche avec un sino-lavabo brun chocolat gravé de symboles linéaires chinois... et d'une sino-toilette turque où l'on évacue comme on ramasse un 10 cennes par terre.

Et des couvertes Hello Kitty aussi.

Tout ça pour moi.



Je m'assied sur le sofa mauve en minou, dans un silence presqu'angoissant.

Au bas du building, vingt-trois étages plus bas, les klaxons s'engueulent en écho.

Je n'ai aucune idée où je me trouve

en dehors des noms de la ville, du Pays et du Continent:

Leshan, Chine, Asie, Terre.



Ne me demandez pas l'adresse, ni même le numéro de téléphone où me rejoindre.

Je n'en sait rien.

Impossible de pointer le quartier où je me trouve sur la carte de la ville de Leshan non plus:

Je suis seul, au vingt-troisième étage d'un bloc appartement dans le Sichuan, China.



J'ai faim, et comme je ne sais pas où je suis... je me dis qu'il serait bien préférable de ne pas me perdre dans la ville.

Je me vois bien mal embarquer dans un sino-taxi et... hausser les épaules

au lieu de donner au chauffeur une adresse où me débarquer.



Mon plan est donc celui-ci: premier resto que je trouve, j'y mange.

Voilà.

Bon plan ça.

Je m'éloigne donc très peu de la série de blocs appartements trop neufs où je loge pour la nuit... et entre dans un grand resto d'une blancheur impeccable, où des familles mangent sous des néons, autour de tables où un rond de poêle au centre réchauffe le plat principal à partager.

La grappe de serveuse s'étonne à mon arrivée.

Elles ne savent plus laquelle doit m'inviter à entrer: elles le font donc toutes

mais en canon.



Et puis j'entre,

c'était ça le plan.

Les familles se retournent:

j'ai envie de me mettre à danser la claquette comme Fred Astaire.



Une et puis deux et puis trois serveuses m'invitent à m'assoir seul, à une table de 6.

On se met à me parler en chinois... en me présentant une feuille incompréhensible qui ressemble à un menu photocopié.

Je fais le sourd et muet.

Elles m'entourent alors et se mettent à parler entre-elles en m'observant.



Je suis un chien qui jongle sur un monocycle.



La plus expérimentée d'entre les serveuses me tend un vrai menu avec quelques images.

Enfin.

J'agrippe le condensé d'images et me met à tourner les pages, sous le regard attentif de l'attroupement.

J'entend au loin un roulement de tambour.



Je pointe une image presqu'au hasard: l'image a des allures de bouillabaisse.

Voilà.

Mon repas sera ça on dirait.

C'était ça le plan, non?



La serveuse est d'accord. Elle acquiesce.



J'attend très peu de temps avant que le met arrive à ma table.

Il m'attendait aux cuisines on dirait.

En fait, j'ai juste eu le temps de saluer les quelques enfants mal essuyés qui me fixait bouches béantes aux alentours.



Une serveuse dépose nerveusement une casserole gargantuesque au centre de ma table.

Ça pourrait aisément nourrir 6 personnes.

C'est insensé.

La toute petite serveuse doit certainement se dire, en ce moment même,

que les blancs ont d'inassouvissables estomacs de monstres, merde, pour commander un tel plat.



Et puis voilà qu'arrive la chaudière de riz...

et puis une infime gorgée de thé aussi, servit dans un verre aux allures de coquetier.



Le repas m'intimide.

Mon appétit n'arrive pas à la cheville de ce qu'on vient de déposer devant mes yeux orbités.

Des bouts de viande et des osselets, de la courge ramollit, du poivron et des oignons, des pois chiches et des frites (!)... noyés dans une sauce cramoisie et exagérément pimentée.

On dirait un amas de restants de fridg.



Comme il y a un début à tout, je me met à piger, inquiet, dans la fricassé.

Je ne sais pas trop quand j'aurai le droit de m'arrêter... pour ne pas offusquer personne d'en avoir trop laisser.



Je pince avec mes baguettes un bout de poulet.

Bizarre, je le croque comme un légume.

Aucune idée de ce que c'est au juste.



Les gens m'observent manger maladroitement ma bouilli peu frugale, morceau par morceau, avec mes baguettes huileuses qui me glissent parfois des doigts.



Je suis un chien qui jongle sur un monocycle, à qui on vient d'ajouter une balle à sa jonglerie.



À un certain moment, je devrai m'arrêter de manger

évidement

avant d'exploser.



Il me reste de la bouilli pour nourrir au minimum toutes les serveuses.

Et bien tant pis.

Pas question de me remplir les poches avec la bouillabaisse épicée

évidemment.



Je me lève et demande la facture:

ça me coûtera 20$ ce banquet solitaire.

Voilà.

Mais on me remet un gratteux au comptoir (!)...

et j'y gagne un 5 yuans (1$) !



Mon repas me coûtera donc un 19$ finalement.

Ça m'a fait sourire ce gain... mais certainement pas plus que le resto qui s'excite alors.



"Lucky" qu'une serveuse me dit (c'est un mot écrit sur le gratteux ça).

Un beau 1$ sur une facture imprévu de 20$,

il y a de quoi fêter!





Etienne X


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