L'enfer sur terre


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August 4th 2008
Published: August 7th 2008
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Victimes de la prison de Tuol SlengVictimes de la prison de Tuol SlengVictimes de la prison de Tuol Sleng

Quelques uns parmi des miliers
Notre dernière destination a aussi été l'endroit le plus troublant qui m'a été donné de voir dans ma vie. Phnom Penh, capitale du Cambodge, en est aussi le reflet de son passé désolant et de son futur incertain. Malgré ses deux milions d'habitants, la ville a un caractère très rural. Éloignez vous à 5 kilometres du centre-ville et c'est tout comme être en campagne. Plus près du centre, des immeubles en décrépitude entourent des quartiers domicilaires entourés de barricades. Il ne semble y avoir que deux classes sociales: les riches et les pauvres. Les mandiants, souvent des amputés victimes des mines antipersonnelles, se déplacent en coutournant les camionettes Lexus, Land Rover et Mercedes stationnées par dizaines le long des rues. Nulle part ailleurs dans le monde, à part peut-être Beverly Hills, vous trouverez un aussi grand nombre de camionettes de luxe sur un si petit territoire que sur la rue Sisowath Quay à Phnom Penh. Celles-ci appartiennent apparemment aux amis et collegues de "son excellence". Le Cambodge se classe d'aileurs au 162e rang sur 180 pays en ce qui concerne la corruption (Canada 9e). Le CPP (Cambodian People Party), dirigé par le premier ministre Hun Sen, est officiellement au pouvoir depuis
Palais Royal Palais Royal Palais Royal

Hall du trone
1998, cinq ans après que ce dernier ait orchestré un coup d'état, exécutant alors plus de 40 adversaires politiques. Ils ont d'ailleurs remporté une troisième élection d'affilée dimanche dernier. Vous en avez peut-être entendu parler à la télévision. Apparement ils ont anoncé leur victoire avant même que les résultats du vote soit comptés et connus. Selon ce qui est écrit dans mon guide Footprint, la ligne du parti est celle-ci: "If we win by the law, then we win. If we lose by the law, we still must win". Et ça a l'air de bien fonctionner!

Malgré toute cette situation politique nébuleuse qui prévaut actuellement, le pays ne va pas trop mal si l'on compare à ce qui s'est passé il y a moins de 30 ans, alors que 20% de la population cambodgienne a été exterminée par le régime des Khmers Rouges, avec à sa tête Pol Pot et sa clique, dans l'un des évènements les plus tristes de l'histoire. Peu connu des occidentaux en comparaison avec l'holocauste des juifs, le Génocide Cambodgien est tout aussi terrible.

Au début des années 1970, les Cambodgiens fuient les campagnes pour se réfugier à Phnom Penh. Pourquoi? Parce que les
Palais RoyalPalais RoyalPalais Royal

Salle de danse
États-Unis, alors en guerre contre le nord Vietnam, décident de bombarder le Cambodge, un pays avec lequel ils ne sont pas en guerre, afin d'empêcher les Viet Congs de s'y réfugier. L'intensité de ces ¨bombardements préventifs¨ est néanmoins plus importante qu'elle ne l'a jamais été au Vietnam. Profitant de l'exode vers Phnom Penh, les Khmers Rouges, un parti politique communiste/guerilla s'empare de 60% du territoire Cambodgien préalablement contrôle par le gouvernement de Lon Nol, qui fuira le Cambodge devant l'avancement des Khmers Rouges le 1er avril 1975. Les 17 avril de la même année, les Khmers Rouges entrent à Phnom Penh, dont la population a augmenté de 600 000 à 2 000 000 d'habitants en raison des réfugiés, et annoncent faussement à la population que les américains vont bombarder la ville, entraînant une évacuation de la ville vers les campagnes. Les Khmers Rouges prennent alors le pouvoir et fonde le Kampuchéa Démocratique.

Là débute quatre ans de terreur. Les Khmers Rouges, avec Pol Pot à sa tête, ont l'idée saugrenue de revenir à ¨l'an zero¨ et de fonder une société dépourvue d'argent, de technologies modernes, de science, de médecine, d'art, de religions, de communications et d'éducation. Une société ou l'unique ressource est l'huile de bras des citoyens. Du communisme poussé à l'extrême. La haute organisation des Khmers Rouges, ou Angkar, met en marche son projet en banissant l'usage de pratiquement tout ce qui peut exister, en fermant les hopitaux, les écoles et les usines, en dissolvant les liens familiaux et en maintenant un climat de peur grâce à la violence, la torture et le meurtre.

Pour réaliser leur projet, l'Angkar compte sur le ¨peuple ancien¨, c'est à dire les paysans des campagnes sans aucune éducation, déjà soumis aux Khmers Rouges avant la prise de Phnom Penh. De l'autre côté, le ¨peuple nouveau¨, c'est à dire les gens des villes éduqués, représente une menace. Les Khmers Rouges ordonnent donc l'exécution des tous les intellectuels (médecins, ingénieurs, journalistes, professeurs, artistes, etc.) et des militaires de l'ancien régime. Ils en profitent aussi pour précéder à un nettoyage ethnique et exterminer tous les étrangers se trouvant au Cambodge, notamment les vietnamiens et les thailandais, mais aussi des anglais, américains et canadiens.

La terreur s'installe lentement. Tout le monde s'arrange pour avoir l'air le plus stupide possible et le plus maigre possible, pour ne pas être considéré comme appartenant au peuple nouveau.
Moines au Palais RoyalMoines au Palais RoyalMoines au Palais Royal

Ils ont le droit de boire du Coke ça a l'air...
Les gens cessent de porter des lunettes, de lire, de parler des langues étrangèrent. La paranoia s'installe. Certains dénoncent leur voisin, leur oncle, leur frère, leur mère, cherchant à sauver leur propre vie. Des populations entièrent disparaissent du jour au lendemain, évaporées au milieu de la nuit. Un soupçon, une fausse information ou un éternuement au mauvais moment et vous vous retrouvez avec une balle dans la tête. Les exécutions sont aussi rapides qu'arbitraires. Même faire partie des Khmers Rouges ne vous assure pas la vie. Des unités complètes sont emmenées par bus dans des champs avant d'être exécutés.

Tout cela perdure pendant près de quatre ans, sans que le monde extérieur en ait vent. Les histoires d'horreur des réfugiés qui arrivent à gagner la Thailande ne sont pas crus. C'est à la suite de l'invasion de Phnom Penh par le Vietnam en 1979 que la vérité sur ce qu'il se passait réellement toutes ces années au Cambodge éclatera. 20 492 fausse communes sont découvertes, contenant les restes de 1 112 829 victimes. Le nombre total des victimes est inconnu, mais est estimé à plus de deux millions, dont la moitiée ont péri par exécution. C'est donc plus ou moins 20%!d(MISSING)e la population cambodgienne qui a disparue en moins de quatre ans.

The methods and behaviour compare to that of the Nazis and Stalinists, but in the percentage of the population killed by a revolutionary movement, the Khmer Rouge holds an unchallenged record



Nous avons visité deux endroits à Phnom Penh qui ont été le théatre de ces autrocités. Le premier étant Choeung Ek, plus connu en tant que ¨Killing Fields¨, où des prisonniers étaient ammenés pour être exécutés. On encourageait les militaires à économiser les munitions alors les méthodes d'exécution étaient tout aussi variées que barbares. 17 000 personnes auraient été tuées ici et 8 895 dépouilles ont été retrouvées dans des fausses communes. Encore aujourd'hui on peut voir des os et des bouts de vetements un peu partout sur le site. Un mémorial contenant les cranes de 5000 victimes a aussi été érigé.

Le deuxième endroit est l'école secondaire Tuol Svay Prey, devenu la ¨Security Prison 21¨ sous les Khmers Rouges, puis qui est désormais le Musée du Génocide Tuol Sleng. Les classes ont été concertis en cellules et en salles de torture. Les prisoniers étaient ammenés à S-21 pour interrogatoire avant d'être exécuté, soit ici ou à Choeung Ek. On estime le nombre de prisonniers à 20 000 et ce pouvait être de jeunes enfants comme des vieillard. On prenait la photo de chacun et ceux-ci devaient donner leur biographie détaillée, de leur enfance jusqu'à leur arrestation. Les prisonniers étaient attachés à plusieurs par des chaines à une barre de métal au sol. Ils ne pouvaient pas parler ou bouger. La torture sous toutes ses formes étaient quotidiennes. Le but ultime était d'obtenir une confession. Une confession de quoi? Là est la question. La plupart des gardiens du S-21 étaient des jeunes entre 10 et 15 ans, facilement endoctrinables, qui devenaient rapidement particulièrement diaboliques. Sur les miliers de personnes emprisonées, seul 12 survivants sont connus.

Tuol Slong est particulièrement difficile à visiter. Des photos horribles sont présentent un peu partout. Deux immenses salles sont couvertes de toutes les photos des prisonniers, même des enfants. Certains ont l'air mort de peur sur leur photo. Malgré tout, c'est extrêmement intéressant à visiter puisque les nombreuses informations permettent de comprendre comment on en a pu arriver jusque là.

C'est étonnant de voir à quel point les cambodgiens ont l'air de bien prendre la vie malgré ce qui leur est arrivé il n'y a pas si longtemps. La majorité sont souriants, polis et pacifiques. Pourtant j'imagine que quand 20% de la population est tuée,
Killing FieldsKilling FieldsKilling Fields

Monument rempli d'ossements
ça doit toucher pratiquement tout le monde. Peut-être que le père de Mr. Ya a été tué par les Khmers Rouges, ou peut-être même qu'il était Khmer Rouge. J'imagine que ce serait facile pour eux d'avoir du ressentiement, notamment à l'égard des étrangers dont les gouvernements n'ont rien fait pour empêcher tout ça, et qui ont continué à supporter les Khmers Rouges bien après l'invasion vietnamienne.

Pour le reste, on a également visité le Palais Royal de Phnom Penh, ou demeure le roi du Cambodge Norodom Sihamoni. Plutôt impresionnant. On a croisé plusieurs moines boudhistes. On pensait qu'ils faisaient partie du décors mais finalement eux aussi jouaient aux touristes avec leurs caméras numériques. Il doit pas y avoir voeux de pauvreté dans le bouddhisme.

Je suis de retour à la maison après 32 heures, vingt-sept minutes et 13 secondes de voyagement. On a d'abord fait Phnom-Penh-Séoul. On a essayé de visiter un peu la ville, mais on avait pas beaucoup de temps et pratiquement tout était fermé alors on a pas vu grande chose. Pas grave, ça me fait quand même une étampe de la Corée du Sud dans mon paseport. Ce fut ensuite Séoul-Vancouver (10 heures) et Vancouver-Montréal (5 heures). Étonnament nos bagages se sont rendus à destination et j'ai pas été soupçconné de trafic d'opium et fouillé.

En gros le voyage a été un succès. On a rencontré pratiquement aucun obstacle et tout le monde s'entendait bien. L'Asie du sud-est est une région où il est très facile de voyager et c'est très sécuritaires, beaucoup plus qu'en Amérique du Sud. On a frappé du beau temps, seulement quelques heures de pluie en trois semaines, et tout ça durant la présumée saison des pluies. La température a pas été trop pire. C'était même rendu confortable (i.e. 31-32°) dans les derniers jours.

Je voudrais remercier tout le monde qui ont lu et qui ont laissé des commentaires.

À la prochaine (peut-être de l'Égypte)

Jòn Nâ Thàn



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Prison de Tuol Sleng Prison de Tuol Sleng
Prison de Tuol Sleng

"Security Office 21"
S-21S-21
S-21

Sans commentaire
Règlements à Tuol SlengRèglements à Tuol Sleng
Règlements à Tuol Sleng

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Khmers RougesKhmers Rouges
Khmers Rouges

Probablement 12-13 ans...
Symboles de Phnom PenhSymboles de Phnom Penh
Symboles de Phnom Penh

1-Armée/police à laquelle tu ne veux surtout pas avoir à faire 2-Véhicules utilitaires sports de luxe
De retour au CanadaDe retour au Canada
De retour au Canada

Rivière coulant à travers les montagnes au nord de Vancouver


8th August 2008

Désolée pour le délais, mais jviens toute juste de lire ton dernier blog puis ce fut très intéressant ton petit cours d'histoire. Bon retour sous la pluie !

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