Louxor الأقصر, Egypte (De Temples et de Sépultures)

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25 Nov

(Toujours en felouque sur le Nil)

6hAM.

Armada, capitaine de la felouque, a déjà largué les amarres.

Je me dérouille à peine, sorti depuis peu de sous mes deux gros tapis utilisés comme couvertures.

Un filet doux et orangé orne les palmiers de la berge. Sur l'eau, une fine bruine se décolle du Nil au travers de laquelle s'aperçoit un pêcheur, seul sur sa barque silencieuse. Une délicate buée voltige aussi sur l'eau de ma tasse matinale dans laquelle Armada a, sans filtre, ébouillanté des feuilles de thé.

Toujours endormi, le vent laissera l'onde fluviale en miroir, du moins jusqu'au retour du plein soleil.

Le capitaine n'a pas encore ouvert la grande voile: il nous laissera glisser au large alors que, cigarette au bec, il nous fera bouillir des oeufs à la coque.



Après le déjeuner, je quitte Armada alors qu'il a accroché son voilier à une route de campagne où passent des calèches et des mulets effacés sous des ballots d'herbage. Il m'appelera un de ses amis tuktuk qui lui, trouvera sans problème le moyen de me surcharger, comme ça, loin de tout autres options de déplacement.

Je me relance dans la vie bruyante de l'Égypte alors que le capitaine, dans son mutisme habituel, regagnera le large en s'allumant sa trompette de hachisch prévue pour son retour sur Aswan. Le vent se lèvera dès lors sur le fleuve.

15 années de navigation sur le Nil a rendu le marin bien solitaire.

...

Les quais de la petite gare de Kom Ombo sont pratiquement vides à cette heure-ci.

Quelques jalabiyas sont là, sortis de leur routine d'agriculteur pour peut-être rejoindre la belle-famille à Louxor.

Une fillette tord une bouteille de plastique vide en ricanant alors que sa maman-poule en tchador surveille l'arrivée du train. On se sourit la femme voilée et moi. Elles intimident les madames cachées sous leurs longs tissus noirs: on ne sait pas trop comment agir avec elles, dans un monde où l'homme a tous les pouvoirs.

Je prend place dans le train alors qu'un vieux turban vient s'accoter à moi. Sa femme voilée est assise devant lui, à côté d'un autre homme qui tient mordicus à son banc. Ce dernier refuse de changer de place. Le vieux turban grommele: c'est SA femme à LUI. Nerveusement, il fouillonne les mines de son nez en faisant des boulettes avec le minerai.

Dehors, des jardins de choux gros comme des globes terrestres s'additionnent le long d'un Nil qui rétrécit.

Dans le corridor serré des wagons, des vendeurs itinérants passent et repassent en se faisant sévèrement secouer par le mouvement de balancier du train. Deux gamins cherchent à vendre des masques jetables. Les deux gamins ne sont pas masqués (ni aucun des passagers du train en fait... sauf moi et les niquabs): les affaires ne sont pas très bonnes pour les vendeurs de masques à Covid en Égypte.



J'arrive enfin à la très touristiques Louxor, là où se sont fait les plus remarquables découvertes archéologiques du vingtième siècle.

La ville est bruyante et tumultueuse, contrastant gravement avec mes derniers jours méditatifs passés sur la felouque d'Armada.

Les vendeurs-velcro sont ici plus que jamais insistants. L'économie de Louxor roule tant que les touristes sont au rendez-vous.



Note à Moi-Même:

Ici, TOUT se paye cash. Ne pensez surtout pas payer une bouteille d'eau à crédit, dans un supermarché.



26-27 Nov

Je passerai trois jours ici: un passionné d'égyptologie pourrait aisément y passer plusieurs semaines voire plusieurs mois.

Sur la côte ouest de Louxor, la vallée des Rois et des Reines regroupent les tombes des Grands Pharaons, de Toutânkhamon à Ramsès II, sur un tableau aveuglant de montagnes brûlées aux allures de grande carrière à ciel ouvert.

Jamais il ne pleut dans ce décor lunaire.

Sous les étages de pierres condensées, l'extraordinaire se dévoile dans des grottes tapissées de gravures rupestres des Dieux égyptiens à tête de chacals ou de balbuzards. Les pâles couleurs vieilles de 3000 ans sont toujours étonnamment visibles. Sous la terre, protégées des éléments, les histoires racontées sur les murs n'ont pratiquement pas été altérées. Les mystères des Pharaons fascinent. Il fallait avoir un sacré flair d'archéologue pour retrouver les sépultures des Grands Rois d'Égypte dans ce vide désertique.

Ou être carrément béni des Dieux.

Hors des grottes, des poignées de travailleurs presque momifiés, creusent toujours, avec leurs pics et leurs pelles, rappelant les vieilles photos en noir et blanc des premières découvertes du début 1900.

Les recherches sont loin d'être terminées dans les vallées funèbres de Louxor.



Sur la côte est, collé à la ville, le Temple d'Amon se connecte au complexe des Temples de Karnak par la longue Allée des Sphinx (longue de 3 kilomètres sous le soleil). Les sites sont grandioses. Les obélisques oblongs comme des missiles, les imposants cerbères de roc et les hiéroglyphes partout gravés sur les murs donnent l'étrange impression d'être dans un décor de cinéma.

Déjà-vu. Cleopatra en 1963, Stargate en 1994, The Mummy en 1999, Astérix & Obélix: Mission Cleopatre en 2002.

Jeudi dernier, un spectacle immense a eu lieu dans le Temple d'Amon pour l'inauguration officielle de la mythique Allée des Sphinx. La délégation présidentielle, en première ligne, exigeait une sécurité accrue pour l'événement. Pour le weekend, jamais la ville n'aura vu autant de policiers et de militaires prêt à répliquer en cas d'assaut terroriste.

Autour des complexes, des bérets montant la garde aux vingt mètres me regardent passer d'un regard sombre, bouche enfouit sous leurs très noires moustaches de généraux. Alors que je marche le long de la corniche, le convoi des grands ministres passe devant moi, sur une rue vidée de son trafic par les militaires. Cette fois, des rangées de sentinelles en veston-cravate, mains sur leur pistolet, me regardent passer d'un oeil soucieux d'agents secrets.

Caire, Nid d'espions une fois de plus.



Notes à Moi-Même:

1-Dans la Vallée des Rois et dans les grottes, INTERDIT de PHOTOGRAPHIER

(PS: les photos prises avec cellulaires sont autorisées)

2- Pas le droit de photographier sur les sites égyptiens? Pas de problème: soudoyez un gardien.



Etienne X

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