Chapitre 31: Retour aux pyramides


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Africa » Egypt » Lower Egypt » Giza
October 13th 2018
Published: October 29th 2018
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15:08, quelque part sur le Nil entre Louxor & Assouan.



La caresse du vent vient éclipser l'étreinte du soleil. Je suis heureux. Cela fait maintenant trois jours passés sur la terre des pharaons, à réaliser un énième rêve de gosse: partir à la découverte de l'Égypte , pays qui m'a fasciné depuis tout petit.



Pour découvrir ce pays qui reste potentiellement risqué, j'ai préféré ne pas partir à l'aventure tout seul avec mon sac à travers le désert, mais suis passé par le biais d'un groupe à travers un voyage organisé. Ca m'inquiète un peu parce que j'ai toujours voyagé en mode backpacker, et avec ce voyage organisé, je risque de perdre le degré de liberté et de flexibilité que le voyage en solo permet. Mais attendons un peu avant de sauter directement au bilan. Apres 4 heures de vol, j'atterris au Caire sous la lumière orangée d'une lune rousse où un représentant du groupe m'attend déjà à l'aéroport. On patiente 20 minutes pour récupérer d'autres membres du groupe arrivant d'un autre vol, puis c'est parti, l'aventure peut commencer.



Au péage pour sortir de l'aéroport, notre chauffeur, Ashraf, nous gratifie d'un grand sourire: "traffic can be a bit messy, please don't be scared". À peine sortis de l'aéroport, on réalise qu'il n'a pas menti car nous voilà engloutis dans un océan de voitures, scooters, taxis, camions, minivans, charrettes, transportant les cargaisons plus inimaginables les unes que les autres (des barils d'olives géants, une carcasse de voiture, des bancs d'école, un buffle et j'en passe). Tout ce petit monde se fraie un chemin dans la foule automobile affichant un mépris complet pour les règles de circulation les plus élémentaires. Alors que je compte cinq files de voitures zigzagant sur notre trois voies, Ashraf nous déclare fièrement; "many crashes in Egypt but no accidents". Mes compagnons de route ne semblent pas convaincus: j'entends ma voisine murmurer des "mad" or "crazy" ponctués de très Britishs "oow crikey" à chaque coup de frein. Après une heure, nous arrivons finalement à l'hôtel, un superbe Holiday Inn avec piscine et casino. Pas le temps d'en profiter car il est déjà 23:00 et on se lève tôt demain.



J'arrive dans ma chambre et fous la peur de sa vie à mon coloc endormi qui ne semblait pas au courant du partage de sa chambre. Quelques heures plus tard, me voilà réveillé par son alarme:

"Top o' the mornin to ya"

* 5:10 *

"Man, meeting's at 7:30, what are you doing" peine-je à grommeler.

"I know, I know !".

Super.

Heureusement il est discret et s'éclipse rapidement. Deux heures plus tard, ma mauvaise humeur s'envole, engloutie par un des meilleurs petit déjeuners de ma vie. Le programme de la journée est chargé, aussi sans traîner, on saute dans le bus: direction, les pyramides ! Je profite du trajet pour jeter un coup sur mes compagnons de route : entre 25 et 75 ans, ils représentent à peu près l'ensemble du Commonwealth (blanc): Anglais, Australiens, Kiwis, Canadiens et Sud-africains... je suis le seul Français/Européen non-Anglais. À travers la vitre, les rues défilent brodant une étonnante tapisserie urbaine, et je me rends compte que l'Égypte est bien plus pauvre que ce que je pensais. Le sol est jonché de déchets qui tapissent également les bords du Nil, et des milliers de bâtiments semblent abandonnés en cours de construction. Notre guide, Medo, nous révèle que le dernier étage est toujours en vrac (sans murs ni plafond, et avec les tiges de métal sortant du béton) pour pouvoir accueillir des petits enfants, au cas où la famille s'agrandit. Si on ajoute à ça les façades laissant transparaître les briques, les escaliers et le béton (à partir du moment où les murs extérieurs sont peints, les gens doivent payer des taxes supplémentaires), ça donne des quartiers assez moches.

Soudain, alors que je m'y attends le moins, je l'aperçois avec émotion. Dépassant à peine les toits environnants, elle prend une ampleur de plus en plus démesurée à mesure que le bus se rapproche, venant rabaisser au rang d'insecte le moindre bâtiment alentours. La pyramide de Kheops, rapidement suivie par sa "petite" sœur, la pyramide de Kephren.

Bâtie il y a plus de 4000 ans, elle représente la tombe mégalo d'un seul homme : le pharaon. Au fil des explications, je me rends compte que les Egyptiens étaient obsédés par la mort et l'au delà. Le jour de sa mort, le défunt était jugé par 14 juges. Si ces juges divins étaient incapables de trouver un accord, le cœur du défunt était pesé à l'aune de la plume de vérité. Si le cœur du défunt était plus lourd que la plume, il était dévoré par Amenti. S'il était plus léger en revanche, il reçoit la clé de l'au-delà (croix ankh), et est conduit à Osiris par Horus.

À sa mort, le corps du pharaon était entaillé au niveau de l'abdomen, et vidé de ses organes, placés dans des vases canopes. Le cerveau quant à lui était aspiré par le nez. Une fois lavé, le corps était recouvert de natron (un mélange de sel et de bicarbonate de soude) pour en vider toute l'eau et le sang restants. Au terme des 70 jours, il était parfumé de myrrhe et d'huiles essentielles, puis momifié dans sept étoffes successives dans lesquelles étaient glissés des amulettes et des talismans. Une fois parfaitement momifié, le corps était placé dans un sarcophage, puis un deuxième et potentiellement troisième. Le sarcophage était enfoui dans la pyramide, en compagnie d'autres objets utiles au pharaon dans sa vie dans l'au delà : un lit, des coffres, des bijoux et vêtements, des chars etc.



Apres l'imposante majesté des pyramides, le sphinx me paraît bien plus petit que ce que j'imaginais. On passe également par une usine de fabrication des papyrus, mais ça ressemble plus à des attrape-touristes qu'autre chose. Après avoir visité la nécropole de Saqqarah, le plus vieux complexe en pierre intact du monde, on finit enfin par déjeuner (à 16:12 le drame !!!) avant d'embarquer dans le train de nuit qui nous emmène à Assouan.



Dès que je rentre dans la cabine, je suis accueilli par un homme de soixante ans, qui s'avère être mon coloc de la veille. On discute un peu et Sergio, se révèle être une personne intéressante. D'origine italienne, il est né et a grandi à Adélaïde, dans le Sud de l'Australie, où il aide les immigrés à venir développer leur entreprise. Alors que je marque mon approbation et ma curiosité, il ajoute "yeah mate, it feels really good to be helping out people". Puis la conversation continue doucement vers le Brexit, puis l'Union Européenne en général: "I heard that migration is a big issue". Je commence à lui expliquer que si les chiffres ont drastiquement baissé depuis 2015, c'était un thème qui était toujours mis en avant par de nombreux dirigeants car porteur au niveau des électeurs. Et là, sans crier gare il se met à parler de la flotte militaire australienne qui a fait un blocus pour empêcher tout navire indonésien d'amener des migrants en Australie. Pardon? "Bah oui, pourquoi vous ne faites pas ça en Europe? Vous avez les capacités militaires pour le faire, et comme ça vous n'êtes plus emmerdés". Attends, c'est le même qui dix minutes plus tôt me disait à quel point ça lui faisait du bien d'aider les autres, ou j'ai raté une étape ?

Alors que je m'éclipse entre deux wagons pour regarder le paysage défiler sous mes yeux à travers la fenêtre du train, un autre membre du groupe vient m'aborder: "Ils sont vraiment à la ramasse hein?" dit il en pointant la fenêtre du menton. Euuuh... "S'ils étaient plus intelligents ils pourraient vraiment améliorer leurs conditions de vie". Autant je m'étais embarqué dans une discussion d'une heure où je répondais à Sergio point par point pour lui montrer les limites de son raisonnement, autant celui là je ne cherche même pas à essayer.

Allez un petit dernier pour la route : On n'est que le cinquième jour alors que j'écris ça, donc il y aura surement d'autres petites perles en perspective, mais ce matin une Canadienne du groupe à lâché un improbable "Est-ce que c'est raciste de dire que je m'attendais à croiser plus de Mohameds?" Commeeeeent ???



Le train finit par arriver à Assouan, et on part illico pour le temple de Philae dédié à la déesse Isis. À l'ombre des dattiers en fleurs, Medo nous expose les relations difficiles entre Seth et son frère Osiris. Mué par la jalousie, Seth piège Osiris dans un sarcophage pour découper son corps immobilisé en 14 morceaux, qu'il expédie dans chacune des provinces d'Égypte. À grand renfort de jeux de rôles, Medo nous explique comment Isis, l'épouse d'Osiris, aidée par son fils Horus et son alliée Hathor, parvient à récupérer chacune des pièces du corps d'Osiris pour le recomposer. Avec un sourire, je retombe avec douceur dans les méandres de la mythologie égyptienne qui avait façonné mes rêves d'enfants.

Sans traîner, on engloutit une espèce de cassolette d'agneau épicé avec des pommes de terre, et du riz avant d'aller se coucher à 22:00. Le réveil a 3:00 du matin est rude, mais le jeu en vaut la chandelle: c'est vers le mythique temple d'Abu Simbel que le bus s'enfonce dans la nuit.


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