Mahabaleshwar (De la Pollution et des Moutons Roses)


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December 27th 2006
Published: January 14th 2013
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Retour de mon ''soap’’ irréel ….

(Aurangabad to Pune... to Mahabaleshwar)

27 déc.

On a nos billets de bus en main pour retourner à Pune. Le "Top Class" svp. On se garantit un six heures de route full confort assis sur les deux bancs d’en avant. Du pur plaisir en prévision!

….

Du bonheur dans les transports en Inde? Impossible! On aurait dû s’en douter!

Le bus ne cesse d’arrêter et de faire embarquer tout plein de monde.

Il y a un film en hindi qui crie à tue-tête pour désennuyer les nombreux passagers sourds. À côté de moi, un bébé n’arrête pas de faire des sons comme un Ewok... argagagaga…

L’Enfer. Je grogne mon impatience en m’enfonçant des bouchons dans le fond des tympans.

J’ai la tête comme une casserole vide sur le rond d’un poêle allumé.



Par la fenêtre du bus, on voit le soleil se coucher. Au loin, des agriculteurs ont mis le feu à leurs champs. De l’immense lueur orangée s’échappe une boucane grisâtre.

Je suis au Moyen Âge. Des barbares brûlent un village de paille. J’entends les femmes hurler d’horreur.... J’ouvre les yeux… non, ce n’est pas les villageoises qui hurlent finalement.... c’est le foutu film en hindi!



On arrive à Pune. On se cherche un hôtel.

Il est minuit. On veut dormir.

On s’en trouve un foutrement miteux à un prix exorbitant. On dirait un crack-house.

C’est plus douillet de dormir par terre que sur les matelas.

Une coquerelle passe sous nos yeux. Elle nous souhaite la bonne nuit.

Je la remercie d’un coup de semelle.





Note à Moi-Même:

Remède contre la mauvaise humeur : avoir le ventre plein et avoir bien dormit. Sinon, je déchire mon linge comme Hulk et je deviens "SuuuuperFruuuu "!



"Experience is like a comb. You have it when you’re bald."





28 déc.

Réveil mélodique. La télé de notre voisin résonne. Voix étouffées. J’ai l’impression d’entendre quelqu’un parler sous l’eau.



À l’extérieur, le chant matinal des auto-rickshaws ronronne comme des hannetons qui passent. Leurs klaxons font le doux chuchotement d’une sonnette de bloc appartements (ou le "gzwwiiiiiik!" du jeu de société "Opération").

Un enfant chigne à en faire branler les murs de carton de la chambre (j’aimerais avoir un tampon de formol sous la main).

Pollution auditive.

Et le fan du plafond qui fait le métronome.... klok... klok...klok...

Ce n’est plus possible de dormir.

Impossible.



Il est 7h30 Am et je vais prendre de l’air à la fenêtre.

Un vieil indien brûle des détritus. Une épaisse fumée goudronnée monte et cache le pâle soleil. Son petit tas d’ordures pollue autant qu’un train au charbon.

Les murs extérieurs de l’hôtel sont tachés de suie.

C’est l’Inde qui dessine au fusain.



On décide de s’exiler à une autre "hill station" comme l’était Matheran. On a vraiment besoin de fuir la pollution des grandes villes.

On quitte donc pour un 4 heures de route vers Mahabaleshwar.



La mode est à la tuque chez les jeunes de Pune, même si il fait 30 degré celsius.

Notre voisine dans le bus porte un polar.

Je ne les comprends pas... j’aurais envie de me foutre à poil tellement on crève!



Quinze minutes après le départ de notre bus, j’aperçois un maigre corps de vieillard assoupis sur le trottoir. Il est en position fœtale dans ses haillons. Il a le visage figé comme une caricature, comme s’il avait été surpris par quelque chose. Il y a une mouche qui rôde autour de son trou d’égout qui lui sert de bouche. Sur sa face s’étale une barbe en broussaille... et des pupilles eau-de-chaux, comme un poisson mort, prennent place dans ses orbites.

Fucking shit. J’aperçois donc ici, aujourd’hui, mon premier vrai cadavre, là, sous le soleil de Pune. Et pas une victime d’accident cette fois. Cet homme est mort comme ça, sur le trottoir.

Autour du cadavre, les piétons demeurent complètement indifférents… mais moi, dans le bus, je suis pétrifié d’horreur. Ce pauvre homme s’est fait surprendre par la Grande Faucheuse en pleine rue!

Cet événement n’a duré que deux secondes... mais ces deux secondes seront suffisantes pour avoir ce visage, ce masque grimaçant imprégné dans ma mémoire comme une photo, macabre souvenir de la triste réalité des itinérants de l’Inde.



On arrive finalement à Mahabaleshwar, ville de 13 000 habitants en pleine montagne. On se trouve une chambre dans une auberge de type "vaste domaine familial". C’est calme, mais un brouhaha de garderie plane sur l’endroit.

Je n’aurai pas de difficulté à m’endormir ce soir... si le fantôme du vieil homme de Pune ne vient pas me hanter!





29 déc.

8h30 AM.

J’ai dormi comme un bébé. Pas de klaxon, pas de voisin bruyant, pas de marteau-piqueur qui corrige les rues... que la paix ici.

La sainte paix.



On déjeune au resto de l’hôtel ce matin. On dirait une cafétéria de camps d’été. Il y a plein d’enfants, plein de familles aisées, de pères en shorts et de jeunes filles en jeans. Mahabaleshwar est une destination vacances prisée pour les nantis de Mumbai.



On se lance dans une longue promenade dans la montagne pour pouvoir se dégourdir les jambes. Ici, les arbres couvrent les routes de leurs branches entremêlées comme des veines. Des lianes, câbles de bois, attachent les troncs les uns aux autres. C’est le décor exact du "Livre de la Jungle" de Kipling. Je ne serais donc pas surpris d’y voir Moogli s’élancer de liane en liane!

Sur notre route, un vendeur de fraises et de carottes essai de nous vendre sa récolte. Il arpente les rues avec ses deux paniers accrochés à un pôle de bois. Un panier de chaque côté et le pôle sur les épaules: effet de balancier.

Et si on lui achetait toutes ses fraises et aucune de ses carottes?





Au "marquet", je m’achète un jus mottonneux à l’aloès (?!), question de me désaltérer… et du même coup, probablement m’hydrater l’estomac aussi.

Devant nous, un berger et son troupeau passe dans la rue. Les brebis sont teintes en rose fluo. J’ai envie d’en mordre une pour voir si sa laine ne fonderait pas comme de la barbe-à-papa.





On retourne au même hôtel pour notre deuxième soirée à Mahabaleshwar.

J’ai l’étrange impression de dormir dans un cabanon.



Note à Moi-Même

Mahabaleshwar signifie "God of Great Power" en sanskrit. Ah oui...ah bon!



30 déc.

Le soleil est à peine levé lorsqu’on se fait réveiller par le crie d’un vendeur devant notre porte de chambre. On dirait du Rap au fast-forward. Il se promène devant l’hôtel avec des flasques d’huile d’olives et de vinaigre de vin. Peut-être qu’il vend de la salade?

...et non... On comprend finalement qu’il vend des massages de tête. Désolé, jamais de vinaigrette dans mes cheveux le matin.

...eee..."its against my religion", lui dis-je en me grattant la crinière.





On retourne au restaurant de l’hôtel pour déjeuner. L’endroit à des allures de cafétéria.

Je demande au serveur un "double milk coffee without sugar". Je reçois une mini tasse de café noir sucré.

Autour de notre table, les pères de famille rotent sans gêne et sans aucune retenue. Ça fait de l’écho dans le resto, comme ça en fait dans une église. Amen.





On se relance dans une autre longue promenade dans la forêt des environs. On marche durant un bon 6 heures pour se rendre à un "point de vue" sur l’horizon.



Mais on ne se rendra jamais à notre destination finalement. Sage décision de rebrousser chemin avant de se perdre!

La route est un tunnel.

On voit une chenille à fourrure qui ressemble à "biscuit" dans Passe-Partout. Elle fait le beigne lorsqu’on la prend en photo. J’imagine qu’elle se métamorphosera en un drôle de papillon poilu!





Alors qu’on se croit perdu dans la montagne, on aperçoit un jeune couple assis sous un arbre. La femme a le visage rosé et elle évite notre regard. L’homme est plutôt blême. Il croise les jambes. Ils ne s’attendaient pas à nous voir ces deux-là. Ouaip. Je crois que les tourtereaux ne faisaient pas que discuter dans la forêt finalement.

Les gens "non mariés" de l’Inde font ce qu’ils peuvent pour avoir de l’intimité faut croire!





31 déc.

L’hôtel est complet ce matin. On doit quitter pour 9h00 AM. Bon. C’est ça quand on ne réserve pas à la veille du jour de l’an!

À la réception, on nous demande pourquoi on part.

"Well, yesterday you said the hotel was full" dis-je au type du ‘’front desk’’ qui a les oreilles touffues comme si deux brocolis lui sortaient des ouïes.

"No no, its ok forrr toonight. No prooooooblem" qu’il me répond.

Bon, ça fait trois jours qu’ils nous font le coup. On est encore victime de la désorganisation indienne donc… à moins que ça soit un truc pour nous charger le plein prix à tous les soirs.

Bref, on aura notre chambre "cabanon" à l'arrivée de 2007.



Aujourd’hui, on se paye un taxi de style mini-Wesfalia, question de voir enfin des "Points de vue" sans risquer de se perdre.

Sur la route vers "Aurthers seat point" (à 4421 pieds), on aperçoit d’étranges pancartes routières. Il y a la "Don’t spit on the road", et la fameuse "Cleanliness is next to God". À Mahabaleshwar, on tente de conscientiser les indiens à moins polluer l’environnement.



Arrivé à ‘’Aurthers seat point’’, je remarque une poubelle qui s’ennuie dans la foule de touristes. Des milliers de papiers et de déchets multiples sont éparpillés sur le sol alors qu’un seul squelette sec de maïs se trouve au fond du triste panier.

Oups. Il semblerait que les pancartes n’ont pas l’impact espéré. C’est paradoxal à souhaits!





On se retrouve bientôt sur le rebord de la montagne, au ‘’point de vue’’ qu’on espérait rejoindre hier.

Il y a Marilou, moi et 4000 touristes indiens.

On n’est effectivement pas les seuls à avoir planifié de s’exiler ici pour le jour de l’an!

Les indiens hurlent. Leurs voix rebondissent sur les montagnes en face de nous.

ECHO echo.

Ça fait 8000 touristes indiens finalement.



Un type lance une capsule de liqueur dans le vide. Le bouchon dentelé flotte comme un ovni.

Ça rit.

Tant qu’à polluer, polluons avec grâce!



On soupe dans un resto indien quelconque du centre-ville de Mahabaleshwar. Le serveur essuie ma cuiller (mon unique ustensile) avec son pouce.

Je lui demande un riz "no spicy".

Je m’assure que ce riz sera "no spicy".

Le serveur m’assure que mon riz sera "no spicy".

Mon repas arrive et, affamé, je m’empresse de dévorer ce riz ‘’no spicy’’.

Picotements sur les lèvres. Ma bouche est une plaie qu’on vient de saler. Criss. Il y a une poignée de green chili qui me fait un pied-de-nez dans mon assiette.

Je crois que le serveur n’a pas compris le "no" dans le "no spicy".





On retourne à l’hôtel. J’ai une ampoule si grosse sous le pied droit que je ne serais pas surpris d’y voir pousser un ongle.





Notes à Moi-Même:

1-On ne lave pas en Inde. On essuie.

2-Il y a bel et bien du blé d’Inde en Inde. J attend désespérément de voir des cochons d’Inde.





1 janv. 2007:

Il est 10h55 Am. On est le premier janvier 2007 en Inde. Au Québec, il est 11h40 PM le 31 décembre 2006. J’ai 11h15 d’avance sur vous. Si mes calculs sont exacts... et si je retourne au Canada à la date prévue... je vivrai 11 heures et 15 minutes de plus que vous en 2007. Weird non?



Premier repas de 2007 : déjeuner jour de l’an à l’hôtel, formule buffet. On s’y risque.

Tout plein de mets inconnus se retrouvent dans mon assiette. Il y a d’abord une "giblotte" moelleuse aux allures de tapioca, et puis une soupe au "rouge" (?), et du gruau trop salé, et du riz piquant, et pis une pâte sucrée de légumineuses, et aussi des crêpes aux oignons et de la ratatouille... ouf... pas facile sur l’estomac ce matin. Où sont mes "Tums"?





On reprend un taxi mini-Wesfalia pour aller visiter le Fort Pratapgad situé à 22km de Mahabaleshwar.

On zigzag sur les routes montagnardes. Corniches en effondrement.

Ça tourne et ça nous retourne.

J’ai le buffet qui veut prendre de l’air.

Mais je ravale péniblement.



Il y a un mobile de pompons-clochettes pendu après le rétroviseur du taxi.

Dingeling! Dingelong!

Je suis assis dans une vache de tôle.



On voit un arbre peint en jaune tacheté de noir de style "lion totémique"... rien à ajouter....



Plus loin, deux jeunes indiens font traverser la route à leurs bovins. Mais la boite à lunch qui nous sert de transport ne ralentit pas pour des bovins.

Le plus vieux des deux indiens fouette le cul des vaches pour qu’elles pressent le pas.

Le plus jeune des deux indiens est plus lent à traverser la route. Il boite derrière le troupeau.
Et soudain, Clac! Le plus vieux fouette son confrère pour qu’il accélère la cadence!

Ouaip. Bovin ou humain, la différence est parfois très mince ici.





Le Fort Pratapgad est bien. Beaucoup de commerçants par contre. Ils essaient tous de nous vendre leur camelote : jolis chapeaux de paille à fleurs en plastique, marteaux gonflables, flûtes en bambou, pistolets à eau, petites voitures à la K-2000...

Je suis au marché aux puces à St-Eustache.

Je suis au Dollorama.

Et dire que ce sont les souvenirs que les riches indiens achèteront!





Je me paye un ‘’chicken burger’’ et ‘’french fries’’ à l’heure du lunch. Les cuisiniers ont saupoudré mes frites de fromage, et il y a des concombres dans mon burger. Marilou rit. C’est une surprise à chaque repas!

Un "holy man" vient nous quêter alors qu’on savoure notre dîner. Il porte une grande toge et une tuque fluo avec le logo d’ "orange crush" dessus. À la main droite, une canne lui sert d’appui, alors que la gauche tient un crachoir. Une barbe blanche en V lui fond du visage. La pointe a été teinte au henné, ce qui lui donne une couleur rouille. Entre les yeux, l’homme porte l’inévitable point orange hindou, un "life saver" comme troisième œil. Je le prends en photo.

Ça me coutera 5 roupies.





2 janv.

Le lever est pénible ce matin. J’ai fait un peu d’insomnie la nuit passée.

Je demande un yogourt aux bananes.

On m’apporte un bol de crémage à gâteau à la place.

Je pense à tous les diabétiques de la terre.



Aujourd’hui, c’est notre dernière journée de promenade dans les bois de Mahabaleshwar. On prend une route qu’on n’a pas encore empruntée.

On y croise un fermier et son troupeau de buffles pneumatiques à la peau noire de semelle-de-bottes. Un cabot maboul à trois pattes s’essouffle à les rattraper.

Un autre fermier (peut-être son frère) est camouflé au rebord du chemin. Il coupe de la mauvaise herbe avec sa serpe, question de se faire une salade.



Un papillon bleu-clair voltige dans un carrefour. Comme on s’approche, un millier de ses confrères s’envolent sans avertissement d’un immense chêne devant nous. Un essaim, un blizzard de papillons.

Nous sommes dans un conte fantastique.

Nous sommes Hensel et Gretel.





On passe au "marquet" pour se faire des provisions en prévision de la longue ride de city bus de demain. On y croise des indiens avec des foulards en mouton. Et puis on y croise aussi un indien avec un mouton en foulard. C’est magnifique!

On s’achète des cachous et des petits jus de fruits. Les noix sont enveloppées dans du vieux papier journal. Et bien. Ça nous fera de la lecture pour l’autobus!



On s’offre un excellent souper dans un restaurant où les tables sont recouvertes de tuiles de salle de bain.

Ils ont oublié d’amener le coca-cola que j’avais commandé.

Mais on a le double de salière/poivrière, et on a 8 cuillers. Ça s'annule j'imagine.





Il y a un Bruce Lee à la télé. On l’écoute un peu dans notre chambre d’hôtel… et puis Hiiiyaaaa!, dodo sur la planche de ply-wood qui me sert de matelat.



Etienne X

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